Cætera, ni Catia est, demissa veste tegentis.
Une Dame Romaine, à moins qu’elle ne soit galante de profession, ne montre jamais que son visage, & couvre le reste de son corps d’une Robbe, qui va jusqu’à terre.
On séme des bruits très desavantageux de mon Lion, à cause que pendant quelques jours il a suspendu ses rugissemens ; un de mes Amis me man-
Il y a encore certaines gens aussi ennemis du Lion que de son Maître, qui debitent dans le monde, qu’il meurt de faim, & qu’à peine il a avalé un seul bon morceau en quinze jours de tems. Je déclare ici, que tous ces rapports sont faux, & sans aucun fondement ; & puisque j’ose démentir la Voix publique, je dois encore protester au Lecteur, que l’Histoire du Billet de Banque de deux cens livres parvenu jusqu’à moi, par la gueule du Lion, est un Conte fait à plaisir. La véritable raison de son silence est celle-ci : Ses Sifleurs ne lui ont mis dans la bouche, que de vilaines paroles, qu’il n’auroit pas pu repeter après eux sans choquer les régles les plus communes de la Politesse, & de la Bienséance. Malgré les sages avis que j’ai donnez à mes Correspondans, plusieurs d’entr’eux lui ont glissé dans la gueule un tas d’imperti-Whig le plus Anti-monarchique qui ait jamais songé à renverser l’heureuse forme de nôtre Gouvernement ; certaines gens ont porté leur noire malice assez loin, pour l’animer contre son propre Maître. Mais comme je me suis engagé à ne point souffrir qu’il attaque la réputation de quique ce soit, mes Lecteurs peuvent se persuader que j’aurai grand soin, qu’il ne se jette pas sur la mienne.
Pour donner cependant au Public une satisfaction aussi générale, qu’il me sera posible ; j’ai resolu de faire, d’une de chambres du Caffé, la Bibliotheque de mon Lion, & d’y placer les differens pacquets de Lettres, qu’on lui addresse, sans que je trouve à propos de les communiquer a mes Lecteurs, ce seront des Memoires secrets, qui auront leur prix avec le temps, & qui pourront donner de grandes lumiéres aux Historiens fu-
Monsieur,
Il faut que je vous dise, pour vôtre satisfaction, que vôtre Lion est devenu une espece d’Epouventail pour les Dames de nôtre ville. Quand mon Epouse revient du Jeu à une heure induë, je lui dis à l’oreille d’un ton entre serieux & badin, que je donnerai de ses nouvelles au Lion, & je vous assure, que cette menace n’est pas sans effet. Au nom de vôtre amour pour le Genre Humain, ne donnez point repos au beau Sexe, Piéce modeste à une petite bande de Mousseline de la largeur d’un doit, foible barriere, que les plus sages d’entr’elles opposent encore à la nudité, qui gagne tous les jours du terrain ? Hélas ce pauvre reste du tour de gorge baisse continuellement, & qui sait où il voudra bien s’arrester <sic> à la fin.
Vous saurez, Monsieur, que je fais Commerce en Marchandises de Tour de gorge d’une raisonnable largeur. Peu de temps après j’épousai une très jolie personne, mais qui a le defaut de pousser toûjours la mode, jusqu’à la derniere extrémité ; j’étois ravi de penser, que mon titre de Mari, me feroit faire tous les jours chez mon aimable Femme
Mais voici quelque chose de bien plus chagrinant pour moi. Au lieu d’être plus familier que tout autre avec les charmes de ma Femme, il se trouve que je le suis moins. Quand elle est au logis, elle est affublée d’un tas prodigieux de Cornettes, de Mouchoirs & de robbes de Chambres, & ce n’est que l’après dînée qu’elle se dépouille, pour s’étaler en public. Ce n’est qu’à force
Permettez-moi de vous dire, Monsieur, qu’il y a de vôtre faute à tout cela. Vous vous y êtes mal pris ; ce n’étoit pas en decouvrant ce que cette mode a de contraire à la pudeur, que vous deviez songer à la réformer. Si vous voulez que les femmes deviennent vos Proselytes, prouvez leur, que si elles veulent attrapper des Maris il ne faut pas qu’elles montrent tous leurs apas, avant le Mariage ; je suis sur, que si ma Femme avant que je l’eusse épousée, avoit été habillée, comme elle l’est à présent, la grande moitié de ma curiosité auroit été satisfaite. Bien des gens ont été détournez de dépenser leur argent à quelque spectacle par les tableaux, qu’ils voyoient devant la porte. J’ai vû plus d’une fois des personnes tellement attentives à ces objets, qu’elles pouvoient voir pour rien, qu’à peine prêtoient-elles l’oreille au maitre du jeu, qui s’egosilloit à crier : Entrez donc, Messieurs, Entrez.
Je vous ai dit au commencement de ma lettre jusqu’où les Mahometantes portent la modestie de leur habillement, &
Vous savez, Monsieur, qu’au commencement du dernier siecle, il y avoit parmi nous une Secte d’hommes, qui s’appelloient Adamites, & qui marchoient dans les ruës sants <sic> habits ! Si vous n’y mettez ordre, cette Heresie pourroit bien s’emparer de l’autre sexe, puisque deja nous voyons par tout un si grand nombre de Femmes, qui paroissent avoir un vif penchant à se rendre Evites.
Je suis.