N°. XV. Anonym [Jean Rousset de Missy / Nicolas de Guedeville] Moralische Wochenschriften Klaus-Dieter Ertler Herausgeber Hannah Bakanitsch Mitarbeiter Elisabeth Hobisch Herausgeber Veronika Mussner Mitarbeiter Barbara Thuswalder Mitarbeiter Sarah Lang Gerlinde Schneider Martina Scholger Johannes Stigler Gunter Vasold Datenmodellierung Applikationsentwicklung Institut für Romanistik, Universität Graz Zentrum für Informationsmodellierung, Universität Graz Graz 27.04.2018 o:mws.6497 Anonym: Le Censeur ou Caractères des Mœurs de la Haye. La Haye: Henri Scheurleer, 1715, 113-120 Le Censeur ou Caractères des Mœurs de la Haye 1 015 1715 [1714] Frankreich Ebene 1 Ebene 2 Ebene 3 Ebene 4 Ebene 5 Ebene 6 Allgemeine Erzählung Selbstportrait Fremdportrait Dialog Allegorisches Erzählen Traumerzählung Fabelerzählung Satirisches Erzählen Exemplarisches Erzählen Utopische Erzählung Metatextualität Zitat/Motto Leserbrief Graz, Austria French Sitten und Bräuche Costumi Manners and Customs Costumbres Mœurs et coutumes France Meaux Meaux 2.87885,48.96014 Netherlands The Hague The Hague 4.29861,52.07667 France Paris Paris 2.3488,48.85341 France 2.0,46.0 Netherlands Amsterdam Amsterdam 4.88969,52.37403 Netherlands Groningen Groningen 6.56667,53.21917 France Montpellier Montpellier 3.87723,43.61092

N°. xv.

Le Lundi 18. de Juin 1714.

Empruntons la plume de Boileau pour entamer ce Discours-ci.

C’est à vous mon Esprit à qui je veux parler, Vous avez des défauts que je ne puis celer ;Je ris quand je vous vois si foible & si stérile,Prendre sur vous le soin de réformer la Ville.Tourner en ridicule un Pédant, un Jaloux,Jusques sur vos Docteurs porter vos billeux coups,Dans vos discours chagrins démasquer l’hipocrite,Et ne regarder rien que d’un œil d’héraclite.Vous vous flatez, peut-être, en votre Vanité,D’aller comme un Horace à l’immortalité :Mais il eut cent talens & la nature avare,Ne vous a rien donné qu’un peut d’humeur bizare.Quel est donc votre but ? répondez mon esprit ;Vous imaginez-vous que ce mordant Ecrit Rappelle de l’éxil la Vertu, la Justice,Et réprime l’Ardeur qu’a F * * pour le vice ;Laissez, laissez Saurin réformer l’Univers,Il fait du cœur humain tous les ressorts divers :Les Gens de son habit, sans craindre la Censure, Ont droit de Censurer l’impie & le parjure ;Ces Docteurs sont païez pour ataquer l’erreur,Faites votre Métier, & qu’ils fassent le leur ;Quel démon vous irrite & vous porte à médire ?Etes-vous possédé de la rage d’écrire ?Il est d’autres sujets . . . Mais . . . ha ! je vous entens,Vous ne pouvez souffrir les défauts de ce tems,A combattre le faux, c’est ce qui vous atache,Ce que vous écrivez le vrai seul vous l’arache :Mais savez-vous aussi comme on parle de vous ?Et de combien de gens vous armez le couroux.Mon Esprit, plus de bruit ; digérez votre bile,Je le veux je l’ordonne, il faut changer de stile.

A la vérité on se lasse d’entendre un donneur d’avis prêcher toûjours sur le même ton, & ne rien démordre de sa sévérité : accommodons-nous donc au goût du Siécle, de ce Siécle poli où nous avons, dit-on, le bonheur de vivre. Mais à propos de Poli, si nous traitions cette matiére ? Elle ne me paroît pas susceptible de beaucoup d’invectives. Entrons en matiére. Il me semble qu’il y a peu de chose aussi équivoque que la Politesse : chacun s’en fait l’idée qu’il lui plaît ; cependant on peut dire qu’il y en a de deux sortes, l’une générale, & l’autre particuliére : la premiére n’a rien que de louable, à mon avis ; & je le mettrois volontiers en paralelle avec la Charité, cette Reine des plus grandes Vertus ; en effet, étant réglée par la raison, & sur l’amour de nous-mêmes, la Politesse est circonspecte comme la charité, elle est complaisante comme elle, elle est affable & officieuse comme elle, en un mot rien ne lui ressemble mieux, & rien n’a plus de charme dans la Société civile ; joint à cela qu’elle a seule le droit de rendre le mérite agréable & de le faire aimer, puis que le seul manque de Politesse détruit l’estime que de grandes qualitez devroient faire naître.

En est-il ainsi de l’autre genre de Politesse ? Pour en juger il ne faut que savoir que l’une n’est qu’une copie très imparfaite de l’autre, qu’elle ne dépend que du caprice, & ne consiste qu’en grimaces étudiées, en petites façons précieuses, en délicatesse affectée, en air, en minauderies. C’est pourquoi bien des gens passent pour polis, qui n’ont que le dehors de la Politesse, & que souvent de fort mal-honnêtes gens ont les plus belles aparences du monde. Ainsi cette sorte de Politesse est une trompeuse. Car qu’on me fréquente ces sortes de faux Polis ; on les trouve doux, honnêtes, oficieux, engageans, tant qu’on les admire, qu’on donne dans leur sens, qu’on leur acorde tout : Mais ose-t-on les contredire, on les trouve les plus brutaux, les plus incivils, les plus rebutans qu’on puisse s’imaginer.

Comme cette sorte de Politesse n’est qu’une feinte, je ne m’étonne pas que les Femmes la possédent si parfaitement, ni de ce qu’on a dit que c’est à leur école qu’il faut que les jeunes gens aprennent à devenir Polis. Ceci pouvoit être vrai autre fois, mais qu’il le soit aujourd’hui, c’est ce qu’on me permettra de nier. A force de vouloir faire les Polies, elles ont donné dans le libertinage ; mais l’expérience leur aprend, que ce n’est pas par cès maniéres relâchées qu’on peut fixer les Hommes.

Un autre défaut que je rencontre dans la Politesse à la mode, c’est qu’il faut que l’Amour & le Tendre soient toûjours de la Partie, voilà ce qui a corompu la Politesse ; telle est cependant cette Politesse si vantée, & qui met notre Siécle au dessus de tous ceux qui l’ont précédé ; de quoi ne tire-t-on pas vanité ?

Démoclés âgé de soixante-&-dix ans vivoit heureux dans un Château qu’il avoit à quatre lieuës de Meaux ; respecté des Gentilshommes du voisinage, il en étoit comme le petit Roi. Un ancien Ami arivé de la Cour vient troubler ce repos. Il commence par se récrier sur l’antique des habits de Démoclés, & insensiblement il passe à ses maniéres, tout est censuré, tout est jugé du dernier ridicule & de la plus basse impolitesse ; ha, ce n’est pas ainsi qu’on vit à la Cour ! dit cet Ami. Nos maniéres sont bien rectifiées depuis que vous vivez ici comme un reclus. Démoclés est un parfait honnête Homme ; mais il fait un grand cas de la Politesse, qui distingue un Homme de Qualité d’un Manant. Il vient à Paris à soixante-&-dix ans pour y étudier les belles maniéres. Instruit par son Ami qu’il ne peut réüssir s’il ne prend leçon de quelque Belle : Démoclés se rend à tout ce que l’on veut ; & parmi un Esquadron de Belles qu’on lui fait voir à la Comédie, il jette le mouchoir à la jeune Lucette.

Par parenthése, il me souvient d’une certaine Mére de Famille qui voulant, quoi qu’il en coûte, rendre son Fils poli, & persuadée que les Femmes seules peuvent perfectionner un si grand Ouvrage, résolut de louër une de cès Demoiselles qui savent leur monde, à peu près comme on louë une Gouvernante, ou une Femmes de chambre, pour instruire dans cet Art son Fils qui entroit dans sa dixhuitiéme année ; deux de mes Amis & moi emploïâmes en vain toute notre éloquence pour l’en dissuader ; elle craignoit trop pour la santé de son cher Fils, disoit-elle, s’il fréquentoit chez plusieurs de ces Préceptrices en politesse, & pour cette seule raison elle vouloit lui en donner une dans la maison. Voila ce qu’on apelle une Mére aisée. Le Fils a admirablement bien profité, il sait les belles maniéres, mais les belles maniéres du second ordre, qui donnent un certain je ne sai quoi qui couvre seulement toute la diformité des mœurs les plus lascives & les plus perduës.

Mais revenons à Démoclés ; on le vit paroître tout d’un coup avec sa Belle dans toutes les Assemblées ; il changea ses cheveux gris pour une longue Pérruque blonde, l’habit gris, court, & étroit, pour un ample Juste-au-corps à la mode, il prit la Tabatiére, les Gands blancs à frange d’or, assista réguliérement à la Comédie ; là placé dans un Balcon à côté de sa Nimphe, pendant que l’Ami qui ne le quitoit pas plus que son ombre, en contoit à la Suivante, Démoclés tâchoit de profiter des leçons du ridicule de Mr. Nigaudinet, & autres Personnages qui étoient une véritable copie de lui-même ; qu’il étoit beau de voir ce grison avec ses minauderies afectées, rire par imitation quand Lucette rioit, se redresser quand elle se redressoit, lui dire de tems en tems le mot à l’oreille, lui présenter l’Orgeat & l’Orange, pendant que l’Ami les présentoit à la Suivante. Il est vrai que toutes leurs grimaces faisoient oublier Arlequin & atiroient tous les yeux des Specateurs, & c’est alors que Démoclés, malgré un certain rouge qui étoit un reste de honte, se félicitoit, croïant être devenu l’Homme de France le plus poli, parce qu’il avoit atiré les yeux de tout le Parterre. Je voudrois conduire Démoclés dans les Assemblées de Jeu, où son Ami & Lucette lui ont apris qu’il est d’un Homme poli de perdre agréablement son argent ; mais je m’aperçois qu’il faut finir ici l’Histoire véritable de Démoclés, qui ne prit à Paris qu’un certain air faux, propre seulement à donner un nouveau lustre à son ridicule.

Il me semble, quoi que je fasse, que j’entends déja quelque faux pénétrant s’écrier, à d’autres, Mr. le Censeur, vous ne nous dépaïserez pas si aisément, la Haïe, la Haïe est le Paris dont vous voudriez nous bercer, & le Plain est le lieu où s’est passé la Séne, je crois déja deviner qui est Démoclés & Lucette. Que dirai-je à cela ?

Par bien, dit le Meunier, est bien fou de Cerveau, Qui prétend contenter tout le monde & son Pére,J’ai voulu essaïer si par quelque maniére,J’y pourai réüssir, mais las ! peut-être envain,Ainsi, soit qu’on en parle, ou qu’on n’en parle point,J’en veux faire à ma tête . . . . . . Avertissement.

On trouve chez H. Scheurleer, Libraire à la Haye, l’incomparable Elixir salutis de Montpellier, qui se fait uniquement par Mr. Jaques Fabre à Groningue, & surpasse de beaucoup en Vertu celui du Docteur Anglois Ant. Dafti, selon le témoignage de plusieurs Personnes qui se sont servis de l’un & de l’autre. Il se vend 24. sous la Bouteille.

A la Haye,

Chez Henri Scheurleer.

Et à Amsterdam chez Jean Wolters1714.

N°. xv. Le Lundi 18. de Juin 1714. Empruntons la plume de Boileau pour entamer ce Discours-ci. C’est à vous mon Esprit à qui je veux parler, Vous avez des défauts que je ne puis celer ;Je ris quand je vous vois si foible & si stérile,Prendre sur vous le soin de réformer la Ville.Tourner en ridicule un Pédant, un Jaloux,Jusques sur vos Docteurs porter vos billeux coups,Dans vos discours chagrins démasquer l’hipocrite,Et ne regarder rien que d’un œil d’héraclite.Vous vous flatez, peut-être, en votre Vanité,D’aller comme un Horace à l’immortalité :Mais il eut cent talens & la nature avare,Ne vous a rien donné qu’un peut d’humeur bizare.Quel est donc votre but ? répondez mon esprit ;Vous imaginez-vous que ce mordant Ecrit Rappelle de l’éxil la Vertu, la Justice,Et réprime l’Ardeur qu’a F * * pour le vice ;Laissez, laissez Saurin réformer l’Univers,Il fait du cœur humain tous les ressorts divers :Les Gens de son habit, sans craindre la Censure, Ont droit de Censurer l’impie & le parjure ;Ces Docteurs sont païez pour ataquer l’erreur,Faites votre Métier, & qu’ils fassent le leur ;Quel démon vous irrite & vous porte à médire ?Etes-vous possédé de la rage d’écrire ?Il est d’autres sujets . . . Mais . . . ha ! je vous entens,Vous ne pouvez souffrir les défauts de ce tems,A combattre le faux, c’est ce qui vous atache,Ce que vous écrivez le vrai seul vous l’arache :Mais savez-vous aussi comme on parle de vous ?Et de combien de gens vous armez le couroux.Mon Esprit, plus de bruit ; digérez votre bile,Je le veux je l’ordonne, il faut changer de stile. A la vérité on se lasse d’entendre un donneur d’avis prêcher toûjours sur le même ton, & ne rien démordre de sa sévérité : accommodons-nous donc au goût du Siécle, de ce Siécle poli où nous avons, dit-on, le bonheur de vivre. Mais à propos de Poli, si nous traitions cette matiére ? Elle ne me paroît pas susceptible de beaucoup d’invectives. Entrons en matiére. Il me semble qu’il y a peu de chose aussi équivoque que la Politesse : chacun s’en fait l’idée qu’il lui plaît ; cependant on peut dire qu’il y en a de deux sortes, l’une générale, & l’autre particuliére : la premiére n’a rien que de louable, à mon avis ; & je le mettrois volontiers en paralelle avec la Charité, cette Reine des plus grandes Vertus ; en effet, étant réglée par la raison, & sur l’amour de nous-mêmes, la Politesse est circonspecte comme la charité, elle est complaisante comme elle, elle est affable & officieuse comme elle, en un mot rien ne lui ressemble mieux, & rien n’a plus de charme dans la Société civile ; joint à cela qu’elle a seule le droit de rendre le mérite agréable & de le faire aimer, puis que le seul manque de Politesse détruit l’estime que de grandes qualitez devroient faire naître. En est-il ainsi de l’autre genre de Politesse ? Pour en juger il ne faut que savoir que l’une n’est qu’une copie très imparfaite de l’autre, qu’elle ne dépend que du caprice, & ne consiste qu’en grimaces étudiées, en petites façons précieuses, en délicatesse affectée, en air, en minauderies. C’est pourquoi bien des gens passent pour polis, qui n’ont que le dehors de la Politesse, & que souvent de fort mal-honnêtes gens ont les plus belles aparences du monde. Ainsi cette sorte de Politesse est une trompeuse. Car qu’on me fréquente ces sortes de faux Polis ; on les trouve doux, honnêtes, oficieux, engageans, tant qu’on les admire, qu’on donne dans leur sens, qu’on leur acorde tout : Mais ose-t-on les contredire, on les trouve les plus brutaux, les plus incivils, les plus rebutans qu’on puisse s’imaginer. Comme cette sorte de Politesse n’est qu’une feinte, je ne m’étonne pas que les Femmes la possédent si parfaitement, ni de ce qu’on a dit que c’est à leur école qu’il faut que les jeunes gens aprennent à devenir Polis. Ceci pouvoit être vrai autre fois, mais qu’il le soit aujourd’hui, c’est ce qu’on me permettra de nier. A force de vouloir faire les Polies, elles ont donné dans le libertinage ; mais l’expérience leur aprend, que ce n’est pas par cès maniéres relâchées qu’on peut fixer les Hommes. Un autre défaut que je rencontre dans la Politesse à la mode, c’est qu’il faut que l’Amour & le Tendre soient toûjours de la Partie, voilà ce qui a corompu la Politesse ; telle est cependant cette Politesse si vantée, & qui met notre Siécle au dessus de tous ceux qui l’ont précédé ; de quoi ne tire-t-on pas vanité ? Démoclés âgé de soixante-&-dix ans vivoit heureux dans un Château qu’il avoit à quatre lieuës de Meaux ; respecté des Gentilshommes du voisinage, il en étoit comme le petit Roi. Un ancien Ami arivé de la Cour vient troubler ce repos. Il commence par se récrier sur l’antique des habits de Démoclés, & insensiblement il passe à ses maniéres, tout est censuré, tout est jugé du dernier ridicule & de la plus basse impolitesse ; ha, ce n’est pas ainsi qu’on vit à la Cour ! dit cet Ami. Nos maniéres sont bien rectifiées depuis que vous vivez ici comme un reclus. Démoclés est un parfait honnête Homme ; mais il fait un grand cas de la Politesse, qui distingue un Homme de Qualité d’un Manant. Il vient à Paris à soixante-&-dix ans pour y étudier les belles maniéres. Instruit par son Ami qu’il ne peut réüssir s’il ne prend leçon de quelque Belle : Démoclés se rend à tout ce que l’on veut ; & parmi un Esquadron de Belles qu’on lui fait voir à la Comédie, il jette le mouchoir à la jeune Lucette. Par parenthése, il me souvient d’une certaine Mére de Famille qui voulant, quoi qu’il en coûte, rendre son Fils poli, & persuadée que les Femmes seules peuvent perfectionner un si grand Ouvrage, résolut de louër une de cès Demoiselles qui savent leur monde, à peu près comme on louë une Gouvernante, ou une Femmes de chambre, pour instruire dans cet Art son Fils qui entroit dans sa dixhuitiéme année ; deux de mes Amis & moi emploïâmes en vain toute notre éloquence pour l’en dissuader ; elle craignoit trop pour la santé de son cher Fils, disoit-elle, s’il fréquentoit chez plusieurs de ces Préceptrices en politesse, & pour cette seule raison elle vouloit lui en donner une dans la maison. Voila ce qu’on apelle une Mére aisée. Le Fils a admirablement bien profité, il sait les belles maniéres, mais les belles maniéres du second ordre, qui donnent un certain je ne sai quoi qui couvre seulement toute la diformité des mœurs les plus lascives & les plus perduës. Mais revenons à Démoclés ; on le vit paroître tout d’un coup avec sa Belle dans toutes les Assemblées ; il changea ses cheveux gris pour une longue Pérruque blonde, l’habit gris, court, & étroit, pour un ample Juste-au-corps à la mode, il prit la Tabatiére, les Gands blancs à frange d’or, assista réguliérement à la Comédie ; là placé dans un Balcon à côté de sa Nimphe, pendant que l’Ami qui ne le quitoit pas plus que son ombre, en contoit à la Suivante, Démoclés tâchoit de profiter des leçons du ridicule de Mr. Nigaudinet, & autres Personnages qui étoient une véritable copie de lui-même ; qu’il étoit beau de voir ce grison avec ses minauderies afectées, rire par imitation quand Lucette rioit, se redresser quand elle se redressoit, lui dire de tems en tems le mot à l’oreille, lui présenter l’Orgeat & l’Orange, pendant que l’Ami les présentoit à la Suivante. Il est vrai que toutes leurs grimaces faisoient oublier Arlequin & atiroient tous les yeux des Specateurs, & c’est alors que Démoclés, malgré un certain rouge qui étoit un reste de honte, se félicitoit, croïant être devenu l’Homme de France le plus poli, parce qu’il avoit atiré les yeux de tout le Parterre. Je voudrois conduire Démoclés dans les Assemblées de Jeu, où son Ami & Lucette lui ont apris qu’il est d’un Homme poli de perdre agréablement son argent ; mais je m’aperçois qu’il faut finir ici l’Histoire véritable de Démoclés, qui ne prit à Paris qu’un certain air faux, propre seulement à donner un nouveau lustre à son ridicule. Il me semble, quoi que je fasse, que j’entends déja quelque faux pénétrant s’écrier, à d’autres, Mr. le Censeur, vous ne nous dépaïserez pas si aisément, la Haïe, la Haïe est le Paris dont vous voudriez nous bercer, & le Plain est le lieu où s’est passé la Séne, je crois déja deviner qui est Démoclés & Lucette. Que dirai-je à cela ? Par bien, dit le Meunier, est bien fou de Cerveau, Qui prétend contenter tout le monde & son Pére,J’ai voulu essaïer si par quelque maniére,J’y pourai réüssir, mais las ! peut-être envain,Ainsi, soit qu’on en parle, ou qu’on n’en parle point,J’en veux faire à ma tête . . . . . . Avertissement. On trouve chez H. Scheurleer, Libraire à la Haye, l’incomparable Elixir salutis de Montpellier, qui se fait uniquement par Mr. Jaques Fabre à Groningue, & surpasse de beaucoup en Vertu celui du Docteur Anglois Ant. Dafti, selon le témoignage de plusieurs Personnes qui se sont servis de l’un & de l’autre. Il se vend 24. sous la Bouteille. A la Haye, Chez Henri Scheurleer. Et à Amsterdam chez Jean Wolters1714.