Zitiervorschlag: Justus Van Effen (Hrsg.): "No. 4", in: Le Nouveau Spectateur français, Vol.1\004 (1723-1725), S. 49-64, ediert in: Ertler, Klaus-Dieter / Fischer-Pernkopf, Michaela (Hrsg.): Die "Spectators" im internationalen Kontext. Digitale Edition, Graz 2011- . hdl.handle.net/11471/513.20.1758 [aufgerufen am: ].
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No. 4
Zitat/Motto► Quemvis mediâ crue turbâ,
Auto ob avaritiam, aut miserâ ambitione laborat,
Hic nuptarum insanit amoribus. Hor.
Saisisez le premier que vous trouverez dans une grande foule, vous le trouverez esclave de l’ambition, ou de la volupté. ◀Zitat/Motto
Ebene 2► Ebene 3► Brief/Leserbrief► Lettre,
Monsieur,
« J’ai considéré mille fois avec étonnement que la qualité, dont ceux qui s’appellent créatures raisonnables font le [50] moins de cas, est la qualité d’homme. Riche, noble, savant, spirituel, beau, bienfait, Prince, Magistrat ; voila des accessoires de l’homme, qui absorbent toutes nos réflexions, & qui usurpent toute notre estime. C’est de ce point de vûë, que nous nous examinions nous-mêmes, & que nous regardons les autres mortels. Mille exemples parlans nous convainquent de cette triste vérité. Supposés à un homme l’esprit le plus judicieux, le plus pénétrant, le plus enrichi d’utiles connoissances : donnés lui une ame ferme, noble, capable de démêler toutes les illusions, & de vaincre tous les obstacles, qui le détournent de la route de la vertu ; ajoutés y une figure plate, un air embarassé ; n’est il pas certain que cette seule enveloppe désabreable avilira entierement, aux yeux du peuple, des qualités si dignes d’estime & d’admiration. Se sauveront-elles de la raillerie de ceux-là même, qui ne passent pas pour être entièrement brouillés avec le sens commun ? Prétons cette même figure disgraciée à un riche faquin, joignons à la bassesse de ses penchans la sottise & l’ignorance ; il est sûr que ses richesses éclipseront & sa laideur & ses défauts, & qu’elles nous arracheront des sentimens assés semblables à l’estime & à la vénération. Ceux qui ont une idée si fausse & si honteuse, de leur propre grandeur & [51] de la ma esté de l’être raisonnable, méritent-ils le titre d’hommes ? est-on digne de ce nom glorieux, quand on retranche de la classe des choses estimables, la qualité fondamentale de l’homme, qui donne seule le prix à toutes les autres qualités, qui peuvent enrichir sa nature, & à tous les avantages qui peuvent contribuer à son bonheur, ce n’est que parce que nous sommes hommes, que la beauté, le bien, la vigueur, l’esprit, le rang deviennent des sources de notre felicité.
Cette réflexion m’ai fait former autrefois le plan d’une petite Pièce de Théatre intitulée le Nouveau Diogène. Des occupations plus pressantes m’ont empêché de remplir tout mon projèt, & je n’en ai fait que quelques Scènes, dont celle que je vous communique ici me paroît la moins mauvaise vous en ferez l’usage que vous trouverez à propos. »
Ebene 4► Le Nouveau Diogene.
Il est, à ce qu’on dit, des hommes à foison :
C’est un vrai paradoxe, ou ma visière est terne ;
Ou sont-ils ? aujourd’hui Diogène Moderne
J’en vais chercher. Que ma Lanterne
Soit le flambeau de la raison.
Où tournerai-je d’abord mes pas ? Se-[52]ra-ce vers ce peuple à jargon agréable, vers ces bagatelles animées, dont le caractère distinctif est la politesse & la galanterie, qui ne juge que par sentiment, à qui un gout faux & inconstant pour les plaisirs tient lieu de principes, qui ne raisonne encore quelquefois que pour extravaguer plus sérieusement qu’à l’ordinaire ; ce n’est là qu’un peuple de marionettes.
Irai-je chez’cette nation farouche & bisarre, qui n’est jamais d’accord avec elle, qui ne paroit raisonner juste, que pour braver la raison avec plus d’insolence, qui croit tout le bon sens de l’univers concentré chez elle, qui se jette brusquement, d’une extremité dans l’autre, qui aujourd’hui veut des chapeaux sur le modele d’Arlequin & qui demain trouvera celui du Docteur Baloüard trop petit pour couvrir ces têtes évaporées ? Peut-être y trouverois-je mon affaire, mais il faudroit chercher long-tems.
Est-ce dans ces païs, où les figures humaines sont évaluées sur l’étiquète des cendres de leurs Ayeux ? Eh si donc ! je n’y voi que des Titres qui mangent, qui boivent & qui vont à la chasse.
Je trouverai mieux mon compte apparemment chez ces Républicains autrefois si estimables ? J’y vois des airs sages, une démarche posée un habillement modeste, ne seroit-ce pas là mes gens ? Non, [53] non, ils allient l’avarice au luxe, & ils mettent en vieilles porcellaines ce qu’ils épargnent sur l’éducation de leurs enfans. ce n’est pas un dehors réglé que je cherche ; je veux des hommes.
Mais cette recherche est trop vague, examinons les premiers qui s’offriront à nos yeux. Est-ce ce champignon du Mississipi, dont les yeux fascinés par ses millions, prennent un carosse à six chevaux pour un grand Seigneur, un habit brodé pour un genie du premier ordre, des bas à coin d’or pour de la politesse, & un homme de mérite mal habillé pour ce qu’il est lui-même sans qu’il s’en doute. Ce n’est là qu’un coffre fort ; Hominem quæro.
Est-ce cet Auteur en titre d’office, ce caustique doucereux, qui vous accable d’un compliment in folio, dont aussi-tôt il chante la Palinodie dans une brochure, au risque d’en sentir battre la mesure sur ses épaules. Ce n’est qu’un concours fortuit d’éloges & de censures. Hominem quæro.
Seroit-ce ce composé de formalités dévotes, qu’on trouve toujours plaqué comme une Solle contre la muraille d’une Eglise, qui en y passant douze heures par y semaines croit payer au Ciel l’équivalent de toutes les vertus, & acheter le privilège de manquer à tous ses devoirs ? Si au Diable ? Hominem quæro.
[54] Est-ce ce Philosophe d’étalage, qui s’érige en Pédagogue du genre humain, qui demande aux autres une force d’esprit & une grandeur d’ame, dont son propre cœur est le véritable revers, & qui est l’original des imperfections dont il fait des copies si ressemblantes ? Tournons notre lanterne d’un autre côté. Hominem quæro.
Seroit-ce cet Animal dont l’esprit est immédiatement au dessus du rien, qui n’en a precisement que ce qu’il en faut pour comprendre la premiere règle d’arithmétique, qui a su faire de cette sublime érudition un moïen sur de parvenir, mais qui absorbé par ce seul objet, ignore ce qu’il est, d’où il vient & ou il va. C’est un fort habile Négotiant ; mais Hominem quæro.
Est-ce cette contradiction incarnée, cet impertinent melange de pieté & d’extravagance, de grandes maximes & de petits sentimens, de qui la Fortune arrache des plaintes à mesure quelle le comble de ses faveurs, qui, en ne se refusant rien de ce qui peut satisfaire sa bisarre humeur, trouve le malheureux sécrèt de faire enrager domestiques, amis, enfans, femme, & d’enrager lui-même ? Evitons au plus vîte ce monstre. Hominem quæro.
Est-ce un habit galonné de poudre & de tabac, ce petit gentilhomme déhanché, qui a dans sa poche la liste de toutes les [55] Nymphes du bois, & de toutes les filles demi-castor d’une Ville entière, qui se fait un honneur exquis d’être cru mille fois plus digne d’infamie qu’il ne l’est réellement. Je vois ce que c’est ; c’est un petit-maitre. Hominem quæro.
M’y voici sans doute ? Quel port grave ; quelle mine serieuse ; quel air pensif ; c’est Caritidés. Il fait le Grec, l’Arabe, le Persan, mais que dit-il dans toutes ces langues ? des sottises. C’est tout au plus un Dictionnaire ambulant. Hominem quæro.
Seroit-ce ce Poëte subalterne, qui paroît croire que les autres ne sauroient rien faire de bon, parce qu’il ne fait rien que de mauvais ; qui se vange du mépris du public par celui qu’il affecte pour ses confrères qui se distinguent, & qui mesure sa haine pour eux à la supériorité de leur merite ? non. Je connois celui-ci : c’est l’Auteur du Parnasse vangé. Hominem quæro.
Est-ce ce vieux Silene, qui ne vit, qui ne parle, & qui ne pense, qu’après qu’il a bu, dont le vin est devenu l’humide radical, qui dans l’habitude de boire a trouvé un contrepoison contre l’yvresse. Excepté qu’il ne raisonne que lorsqu’il est plein, ce n’est qu’un tonneau à vin, qui roule dans les rues. Hominem quæro.
[56] Seroit-ce par hazard cet Illustre dont le cerveau est un vrai Alambic, qui met de l’esprit par tout, qui vous donne le bon jour en stile figuré, & qui voudroit, mettre des pensées jusques dans l’exercice des fonctions animales ? Est-ce un homme ? Non, c’est une boule de savon, dont la superficie brille des couleurs les plus vives à mesure qu’elle est mince. Hominem quæro.
Est-ce ce Damoiseau pour qui le dérangement d’une boucle de ses cheveux est la chute de l’Univers, & qui … » ◀Ebene 4 ◀Brief/Leserbrief ◀Ebene 3
Zitat/Motto► Mais quand je chercherois du Pérou jusqu’à Rome,
Ce seroit même chose, ou je n’y comprends rien.
Que cherchai-je après tout ? Ce n’est qu’un homme. Eh bien !
Tout ce que j’ai trouvé c’est la justement l’homme. ◀Zitat/Motto
Metatextualität► Je ne puis que remercier l’Auteur de cette scene du joli présent qu’il m’a fait, & j’espère que le Public lui en aura la même obligation. Il me permettra pourtant de lui dire que, si j’avois osé disposer entierement de sa Pièce, j’aurois pris la liberté d’en retrancher les articles qui regardent des Peuples entiers. Ces sortes de censures sont odieuses, & quoiqu’elles ne choquent qu’un amour aveugle & déraisonnable, que tous les Mortels ont pour la Nation, dont ils ne font souvent [57] qu’une partie très-peu considérable, on peut épargner ce chagrin à leur fausse delicatesse. Elle va si loin que j’ai vu des gens soutenir avec une patience de Stoïcien les titres les plus odieux, qu’on prodiguoit à leur infamie particulière, & prêts à se couper la gorge avec tout homme assés insolent pour lancer quelques traits railleurs contre la societé dont ils étoient membres indignes. J’ai vu le même foible, quoique dans un moindre degré, deshonorer le caractère de parfaitement honnêtes gens, qui n’avoient rien à démêler avec les vices qu’on reprochoit à leur nation. ◀Metatextualität
Les gens de bien devroient se mettre fortement dans l’esprit que le peuple, auquel ils appartiennent, & avec lequel ils ont les relations les plus étroites, sont toutes les personnes qui leur ressemblent. La vertu est la patrie générale de tous les gens vertueux. J’avoue qu’une certaine portion d’amour de préférence pour nos compatriotes, est naturelle, légitime, & même d’une grande utilité. Un cœur bien placé & sensible ne sauroit s’en défendre, il ne le doit pas même. Dans tous les peuples, malgré la variété infinie des caractères particuliers, il regne un caractère général, une certaine conformité de naturel, une familiarité avec les mêmes mœurs, les mêmes coutumes, le même air, la même nourriture, les mêmes sons articulés. L’Intérêt de tous les particuliers y découle du [58] même intérêt général, & toutes ces causes réunies donnent à chaque individu une espece de droit de proprieté sur toute la Nation. C’est là la source de l’amour de la Patrie, & de ce zèle héroïque qui porte les braves gens à courir à sa défense, au péril de leur propre vie, & qui la sauvent quelquefois d’une ruine qui paroissoit inévitable. Ce zèle pour nos compatriotes est donc souverainement utile & digne des plus grands éloges.
Cette opinion déplaira sans doute à une classe de Philosophes, qui réfléchissent sur tous les sujets d’une manière abstraite & qui, pour me servir des termes de Terence, faciunt intelligendo, ut nihil intelligant. A force de comprendre, ils ne comprennent rien : en raisonnant sur les devoirs des hommes, ils arrachent les hommes du genre humain qui les environne ; ils brisent les liens qui les attachent les uns aux autres, & ils ne combinent pas leurs maximes métaphysiques avec les circonstances où nous nous trouvons, & que nous ne sommes pas les maîtres de changer. Le Philosophe est citoyen de l’Univers ; pourquoi préférera-t’il des gens nés sous un tel climat, à des gens accoutumés à respirer un autre air ? Que lui importe que le commerce sorte de sa patrie, pour enrichir un autre peuple ? Tous les peuples de la Terre doivent lui être également chers. Il doit vaincre cette sensibilité incommode pour ses compatriotes, & rester [59] dans le calme, pourvu qu’il puisse mener, dans quelque endroit une vie aisée, & tranquille. Ces maximes paroissent plausibles, quand on les considére en elles mêmes. Peut-être conviendroient-elles à des intelligences pures, qui n’auroient aucun besoin à remplir, & qui seroient inaccessibles à toute impression extérieure ; mais si elles étoient suivies pas des hommes rangés en différens corps, & qui ne sauroient trouver leur bonheur particulier, que dans le bonheur général de tout un Peuple, ces corps se détacheroient bien-tôt, & chacun trouveroit son desastre particulier dans une catastrophe générale. La raison ne suffit pas à des hommes placés dans de pareilles circonstances ; il nous faut, pour hâter les opérations de notre raison, des instincts, des passions nées avec nous, ou excitées nécessairement par la situation où nous sommes mis par la Providence. Ces instincts, ces passions sont les liaisons de la Societé, elle fraïent à notre raisonnement la route des devoirs mutuels, qui affermissent la felicité du genre-humain. Le sage ne doit point travailler à détruire ces heureux instincts : ils lui sont naturels, Il les trouve dans le fond de son être ; c’est l’ouvrage du Créateur aussi bien que la raison. Il doit en faire usage, & les rendre véritablement utiles à lui & aux-autres, en les dirigeant, avec attention, à leur véritable [60] but, & à ne point souffrir que leur impetuosité arrache à son bon sens les rênes de sa conduite.
Conformément à cette règle, un homme éclairé peut préférer, toutes choses égales, un compatriote à un étranger ; mais cette préférence doit cesser dès que dans l’étranger il découvre le moindre dégré de merite de plus ; quand on reproche à sa nation des vices honteux, il peut en être mortifié ; mais il a tort de donner dans l’emportement, & de se laisser contraindre par l’amour de sa Patrie à défendre l’injustice & à plaider pour le crime.
Une autre considération doit nous porter encore à nous posséder dans cette occasion. Tout l’Univers crève pour ainsi dire, d’hommes extravagans & vicieux, c’est une vérité aussi triste que palpable. Chaque peuple brave la raison & la vertu à sa manière. Mais si toutes les nations ont leurs vices distinctifs, toutes les nations ont aussi de belles qualités qui les caractérisent. Le reproche peut parcourir tout l’Univers, il trouvera à peu près par tout la même occupation. Si l’Eloge veut faire le même voïage, on peut assurer qu’il ne sera nulle part dans une oisiveté parfaite. En censurant nos compatriotes, on censure pour ainsi dire, tout le genre humain ; on ne considère le vice, où tous les hommes ont à peu près une égale portion, que [61] sous une de ses faces particulières, & l’on ne songe point à disputer à notre nation les vertus qui lui sont particulièrement familières.
Si quelqu’un est assés fou, ou assés injuste, pour outrer la censure, & pour inonder un peuple de vice, sans lui reconnoitre aucune qualité estimable, il ne mérite que du mépris ou de la pitié ; & des invectives ne sauroient avoir la moindre prise sur un esprit raisonnable.
Qu’on me permette de passer à une matière, qui a de la connexion avec le sujèt dont je viens de parler. Les chaires des Prédicateurs retentissent de la corruption humaine, les livres de morale en regorgent ; Cette corruption est grande, il n’en faut pas douter. Il est surprenant même que des Etres qui ont dans leur nature, des moïens surs pour connoitre leurs véritablés intérêts, s’y trompent avec une stupidité si brutale, ou s’en écartent avec une si indigne foiblesse. Je croi pourtant avoir remarqué que cette corruption est moins générale, & moins excessive qu’on ne la dépeint d’ordinaire. Je ne dirai rien de cette ridicule déclamation qui fait le panégyrique de tous les siecles passés, pour jetter tout le fardeau du crime sur le notre. Ce qui décrédite sufisamment cette impertinente Rhétorique, c’est qu’elle a ébloui toutes les générations passées, com-[62]me elle en impose à celle-ci. Graces au bon-sens superieur de notre age, elle ne fait plus la moindre impression sur ceux qui se sont un peu familiarisés avec l’Histoire & le bon-sens. Ceux qui cherchent des hommes, & qui n’en trouvent point, ne les cherchent pas bien ; il y en a encore un bon nombre, mais la Lanterne, dont il faut se servir pour deterrer l’homme c’est l’humanité. Il n’y a qu’une vertu raisonnée, qui soit capable d’apercevoir les gens vertueux. Si l’on ne veut accorder le titre d’homme qu’à ceux qui ont assés de force d’esprit pour répondre par toute leur conduite à une raison si exacte & si étenduë, j’avoüe que je ne trouve pas un seul homme au monde. Je laisse à ceux qui se sentent eux-mêmes dans cette sublime perfection, de chercher leurs semblables ; mais je pense que les hommes ne sont pas fort rares, si l’on veut bien honorer d’un nom si beau ceux, qui connoissent le prix de leur raison, qui respectent leur propre excellence, & qui veulent bien faire des efforts sérieux & assidus, pour augmenter les lumières & la vigueur de leur ame.
Qui sont ceux qui se plaignent avec le plus d’amertume de la dépravation du cœur humain ? sont-ce les personnes qui se distinguent par un raisonnement exact & par [63] une haute sagesse. Point du tout ; ces déclamateurs sont bien souvent des gens, dont la conduite des hommes choque les vices, & non pas la vertu ? Un chicaneur de profession, un plaideur acharné, parle avec horreur des juges, il soutient hardiment qu’il n’y a plus de justice dans le monde ; s’il gangoit seulement dix procés de suite, il rétabliroit les juges dans leur honneur, & Astrée reviendroit à coup sûr sur la terre. L’Orgueilleux qui voudroit inspirer à tous les hommes le profond respect qu’il a pour lui-même, découvre dans tous les hommes une hauteur impertinente ; une insupportable fierté. S’il entrevoit encore quelque-part un reste de modestie, c’est dans ces ames rampantes, qui par la bassesse de leurs sentimens deshonorent la grandeur de leur Etre.
Un Prodigue, qui cherche en vain chez ses amis des secours pour soutenir ses folles dépenses, accable d’invectives la tiedeur, & l’insensibilité des hommes d’à-présent, & il ne voit de vrais amis, des amis héroïques que dans l’antiquité la plus reculée. Un avare prête de l’avarice à tous ceux qui ne sont pas d’humeur à satisfaire son avidité pour les richesses. Enfin de quelle humeur sont ceux qui nous fatiguent le plus de leurs invectives, contre les gens brutaux, roides, obstinés ? ne sont-ce pas des personnes farouches, inflexibles, opiniâtres ?
[64] Ce n’est point là l’unique classe de ceux qui font des tableaux outrés de la corruption du siécle ; Il y en a plusieurs autres, qui valent bien la peine qu’on demeste leur caractere ; Metatextualität► Il ne sera pas inutile non plus de faire voir en détail de quelle manière une humanité éclairée est seule capable de nous guider dans la recherche des véritables hommes. Mais cette matière et si abondante qu’il faut bien que je la reserve pour une autre fois. ◀Metatextualität ◀Ebene 2 ◀Ebene 1
