Temperat horis :
Unde nil majus generatur
ipso ;
Nec viget quicquam simile, aut secundum.
Hor. L. I. Ode XII. 15.
C’est lui qui gouverne la Terre & la
Mer ; & qui par le tempérament admirable les quatre Saisons,
entretient & conserve le Monde. Il n’engendre rien de plus grand
que lui, rien ne vit hors de lui, qui l’égale ou qui en
aproche.
Simonide, interrogé par
Si l’on examine l’idée que les Philosophes avoient de l’Etre suprême, par les lumieres de la Raison, on verra qu’elle se réduit à ceci : Qu’il possede toutes les perfections d’un Etre spirituel ; Mais comme nous n’avons point d’idée de ces perfections, à moins qu’elles ne se découvrent dans nos Ames, nous joignons à chacune le titre d’infini, & ce qui est une Faculté dans l’Esprit de l’Homme devient un Atribut de la Divinité. Notre existence est bornée au tems & au lieu, l’Etre suprême remplit tout de sa presence infinie, & habite dans l’Eternité. Nous jouïssons de quelque pouvoir & d’une legere connoissance ; l’Etre suprême est tout-puissant & connoit toutes choses. En un mot, toutes les perfections de nos Ames réunies ensemble, avec le titre d’infini que nous y joignons par-dessus, forment l’idée que nous avons du souverain Monarque de l’Univers.
Quoi que tout Homme qui réflechit puisse avoir fait cette remarque,
je produirai à cette occasion l’Autorité de Mr. l’Entendement Humain, traduit par Mr.
Coste, p. 377. §.
93.Si nous examinons, dit-il, l’idée que nous avons
de cet Etre suprême & incompréhensible, nous trouverons que
nous l’aquérons par la même voie, & que les Idées
complexes que nous avons de
Dieu
& des Esprits dégagez de la matiere, sont
composées des Idées simples que nous
recevons de la Réflexion. Par exemple, après avoir formé, par la
considération de ce que nous éprouvons en nous-mêmes, les idées
d’existence & de durée, de connoissance, de
puissance, de plaisir, de bonheur, & de plusieurs autres
qualitez & vertus, qu’il est plus avantageaux d’avoir que de
n’avoir pas, lors que nous voulons former de l’Etre suprême
l’idée la plus convenable, qu’il nous est possible d’imaginer,
nous étendons chacune de ces Idées par le moyen de celle que
nous avons de l’Infini, & joignant toutes ces Idées
ensemble, nous formons notre Idée complexe du Dieu.
Il n’est pas impossible qu’il y ait une grande variété de Perfections spirituelles, outre celles qui se trouvent dans nos Ames ; mais il est impossible que nous aïons l’idée d’aucune sorte de Perfection, à moins qu’il n’y en ait quelque petit raïon & quelque leger femence en nous-mêmes. Il faudroit donc pousser la rémérité jusques à l’excès, si nous décidions que tous les Atributs de l’Etre suprême se bornent à ceux que nos concevons dans son idée. On peut bien assûrer une chose, que, s’il y a quelque sorte de Perfection qui ne soit pas tracée dans nos Ames, elle apartient à la Nature Divine dans tout son étenduë.
Plusieurs grands Philosophes on cru que l’Ame séparée du Corps peut
avoir de nouvelles Facultez, qu’elle ne sauroit mettre en usage
durant cette Vie ; mais si ces Facul-Sa
grandeur ne connoit point de bornes : La plus exaltée de
ses Créatures ne peut la sonder, & il n’y a que lui seul que se
puisse comprendre.
Les réflexions de Jesus Fils de Sirach, envisagées sous cette vûe, sont
très-justes & bien-sublimes. Ecclesiastiques, Chap. XI.III.
15. 36. suivant la traduction de Mr. de
Saci.Il a fait, dit-il, que tout
tend à sa fin par un ordre stable, & sa parole regle toutes
choses. Nous mulitplierons les discours, & les paroles nous
manqueront ; mais l’abregé de tout ce qui se peut dire est qu’il
est l’ame de tout. Que pouvons-nous dire pour relever sa
gloire ? Car le Tout-puissant est au-dessus de tous ses
ouvrages. Le Seigneur est terrible, il est souverainement grand,
& sa puissance est merveilleuse. Portez la gloire du
Seigneur le plus haut que vous pouvrez, elle éclatera au-dessus,
(& sa
magnificence ne peut être assez admirée.) Vous,
qui benissez le Seigneur, relevez sa grandeur autant que vous
pourrez ; car il est au-dessus de toutes louanges. En relevant
sa grandeur, fortisiez-vous de plus en plus : ne vous laissez
point dans cet exercice ; car vous ne comprenarez jamais ce
qu’il est. Qui le pourra voir & le representer tel qu’il
est ? Qui dira sa grandeur selon qu’elle est dès le
commencement ? Beaucoup de ses ouvrages nous sont cachez qui
sont plus grands que ceux que nous connoissons ; car nous n’en
voyons qu’un petit nombre.
Je n’ai parlé jusques-ici de l’Etre suprême que suivant les lumieres de la Raison & de la Philosopie. Si nous voulons aprofondir toutes les merveilles de sa Miséricorde, il faut avoir recours à la Revélation, qui nous le represente, non seulement comme un Etre environné de gloire & d’une puissance infinie, mais comme plein de bonté & de justice dans ses Dispensations envers le Genre Humain. Ceci est à la portée de tout le monde, & qui qu’on ne sauroit trop méditer là-dessus, je me bornerai au respect & à l’adoration que toutes ses Créatures lui doivent. Pour nous en former une sainte habitude, nous dévrions souvent le rappeler dans nos Esprits, & nous humilier, en sa presence, à la vûe de notre indignité & de ses adorables perfections. Un tel respect gravé dans le cœur est une sorte de Priere continuelle ; & fait partie du service raisonnable que l’Ame doit à celui qui l’a créée.
Feu Mr. Sermon prononcé aux funérailles d’un
Gentilhomme qui faisoit honneur à sa Patrie, & qui a été un des
plus actifs, aussi bien qu’un des plus heureux Observateurs des
Ouvrages de la Nature qu’il y ait jamais eu dans notre Isle. Voici
de quelle maniere le Prédicateur y parle de ce Philosophe Chrétien.
Tout le monde fait la véneration que les Juifs
avoient pour un si grand Nom, si saint & si admirable. Ils ne
vouloient pas même soufrir qu’il entrât dans leurs Discours de
piété. Que peut-on donc penser de ceux qui emploient en Nom si
auguste & si redoutable au milieu de la Colere ou de la Joie,
& lors qu’ils sont animez des Passions les plus impertinentes ?
Que dira-t-on de ceux qui l’admetent dans les Questions & les
Asseverations les plus familieres, dans les Discours & les
Ouvrages les plus badins & les plus enjouez ; pour ne rien dire
de ceux que le profanent par des Sermens Diaboliques & des
Parjures abominables ? Ce seroit insulter la Raison que de vouloir
dépeindre l’horreur & l’infamie d’une telle pratique. Il sufit
de la nommer, pour en convaincre tous ceux en qui les lumieres de la
Nature no sont pas absolument éteintes, & ausquels il reste
encore quelque Principe de Religion.
O.