Hor. Lib. I. Ep. XVII. 23.
C’est-à-dire, Aristippe prenoit toute sorte de caractères, & se faisoit à tout, ils s’accomodoit de toute sorte d’état, & tout lui convenoit.
Voïez le LII. Discours pag. 342.pour avoir traité
« Oh, le charmant Personnage ! Mais ajoûte-t-elle, voici l’endroit que j’admire le plus, lorsqu’il commence à tourmenter Lovoit, & à copier les airs ridicules du Chevalier Fopling : N’est-ce pas une jolie Satire, de vouloir être lui-même un Sot pour se rendre agréable,
« Y a-t-il rien de plus extravagant, de plus enjoué & de plus digne d’un petit Maître, que ce nouveau trait ? »
Il y auroit eu sans doute de la temerité, pour un homme de mon humeur à m’opposer à ce torrent de paroles qui sortoient de la bouche de ma belle Ennemie ; mais son discours me fournit bien de quoi reflechir, après que je l’eus quittée. Je ne pûs m’empêcher de faire attention, en particulier, aux fausses idées que la plûpart des gens ont, (surtout le beau Sexe), de ce qu’on appelle un Gentilhomme bien fait ; de tourner le sujet de tous les côtez, & de m’en former une idée exacte & précise.
Il me semble donc qu’un Homme ne devroit jamais avoir l’estime des autres ; pour aucune action contraire aux Maximes reçues dans le Païs où il demeure. Tout ce qui est opposé aux regles éternelles de Dorimant un vrai Païsan, sur ce qu’il donne à la Vendeuse d’Oranges l’épithéte de grosse Tripiere : J’aurois dû soutenir que l’Humanité engage un honnête Homme à ne faire aucun reproche à qui que ce soit, pour des choses qui peuvent être communes aux Personnes qui ont le plus de merite & de vertu. Lorsqu’un Gentilhomme dit des grossieretez, c’est en vain qu’il a des Habits magnifiques : On doit toujours préferer les ornemens de l’Esprit à ceux du Corps. Les paroles qui sentent une imagination dépravée, choquent plus la Politesse, que les Habits les plus négligez. Mais on est si éloigné d’en avoir cette idée, même entre les Personnes de qualité, que Brailleur.Vocifer passe pour un Gentilhomme bien fait & poli. Il parle fort haut, il est altier, civil, doucereux, brutal & complaisant tour à tour, suivant que son petit Genie & son excessive Impudence le menent. Il a d’ailleurs la réputation d’Homme d’esprit, auprès de celles de nos Dames qui n’en ont guères, parcequ’il est toujours en doute, & qu’il ne décide rien. Il hausse les épaules pour insinuer qu’il est d’un autre avis, & il réfute avec un grand air de suffisance, lors Vocifer fût un si grand Athée. Il n’y a personne qui n’ait remarqué une foule de ces Impertinens dans toutes les Assemblées ; mais ne seroit-il pas digne de notre attention d’examiner quelle influence auroit dans les Compagnies & tout ce qui regarde la Société civile, un Homme imbu de tous les principes que l’Honneur, la Bienséance & la Religion inspirent ?
l’Inconnu.Ignutus. Ses actions cachées & celles qui paroissent aux yeux de tout le monde, tirent leur source de nobles & de puissans Motifs. Il les doit toutes à l’esperance ferme & inébranlable qu’il a d’une Vie à venir. Son bon Naturel, fortifié par le Sentiment de la Vertu, produit le même effet sur lui, que la négligence de tout ce qui est honnête & digne de nos soins produit sur quantité d’autres. Fixe & déterminé qu’il est sur toutes les matieres de quelque importance, on remarque dans
Celui qui peut envisager avec plaisir l’incertitude de son existence ici-bas, & se promettre que sa dissolution lui sera quelque jour fort avantageuse, peut tout faire dans ce monde de bonne grace, d’un air desinteressé, & en galant Homme. Il ne regarde pas sa vie comme un état malheureux, passager, de courte durée, mêlé de vains plaisirs & de peines réelles ; mais il la considere sous une toute autre face ; ses chagrins disparoissent bien-tôt, & ses joïes sont pour l’Eternité. Il n’a pas une idée triste & affligeante de la Mort ; il est prêt à lui résigner tous ses plaisirs, & à passer de cette courte Nuit à un Jour qui ne finira jamais. C’est à dire, que plus un Homme a de Vertu, plus il est disposé naturellement à être civil, honnête & agreable. Un Homme qui possede de grands biens a la mine contente & un air assuré, que celui oui est réduit à l’étroit & dans la misere ne sauroit jamais prendre. Il en est de même à l’égard de l’Esprit ; celui qui se gouverne, par les regles éternelles du bon Sens & de la Raison, ne peut qu’avoir, dans ses paroles & dans ses actions, quelque
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