Louis Bridel an Hugo Schuchardt (01-01367)

von Louis Bridel

an Hugo Schuchardt

Genf

23. 01. 1894

language Französisch

Zitiervorschlag: Louis Bridel an Hugo Schuchardt (01-01367). Genf, 23. 01. 1894. Hrsg. von Frank-Rutger Hausmann (2021). In: Bernhard Hurch (Hrsg.): Hugo Schuchardt Archiv. Online unter https://gams.uni-graz.at/o:hsa.letter.9758, abgerufen am 01. 12. 2023. Handle: hdl.handle.net/11471/518.10.1.9758.


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Genève, 23 janvier 94
24 rue de Candolle

Monsieur, cher cousin et honoré collègue,

Merci pour l’envoi de votre brochure „Weltsprache“1 que je viens de lire avec grand plaisir. La question m’intéresse vivement. Je suis de ceux qui espèrent pour l’humanité: une religion, un droit, une langue … non seulement je l’espère, mais j’y crois, ce qui est beaucoup plus grave! aux yeux des hommes „sages“ de notre époque.

La „société nouvelle“ qui se prépare exigera un instrument d’échange intellectuel international. Quel sera-t-il? je n’en sais rien. Mais il faudra bien qu’il soit!

En cherchant à me rendre compte de ce qu’il faut entendre par l’expression si fréquemment employée de nos jours „les sciences sociales“: quelles sont les sciences diverses ou les disciplines qui rentrent sous cet intitulé – j’ai trouvé: la morale, la législation, l’économique, la pédagogie etc. … Et puis, je me suis demandé: et la linguistique? La réponse à2|2| laquelle je suis arrivé est celle-ci: Si une langue internationale ou universelle est chose possible à créer, la linguistique est „science sociale“, par un de ces côtés tout au moins; sinon, non.

Je ne sais trop ce que vaut cette manière de voir ou de comprendre les choses. Malheureusement, mes connaissances linguistiques et philologiques sont presque nulles! – mais ce que je vois, c’est que les dialectes disparaissent au profit des langues nationales; tout comme le lois ou les coutumes locales ont disparu ou disparaissent au profit de conspirations nationales. Et j’en conclus que les langues nationales disparaîtront aussi, tout comme les législations nationales, au profit d’une langue générale et d’un droit universel.

Mais comment arriverons-nous à la langue internationale (ou universelle)? – je n’y vois plur clair … Pour le droit, cela me paraît être relativement plus simple.

Veuillez excuser mes réflexions plus ou moins intéressantes! et croyez-moi, cher monsieur, votre dévoué3

Louis Bridel


1 Hugo Schuchardt, Weltsprache und Weltsprachen. An Gustav Meyer, Strassburg: Trübner, 1894.

2 Am linken Rand: „Si vous êtes partiellement d’origine romane, je suis de mon côté à moitié allemand, ma mère était née Köster-de Neufville de Francfort s/M. J’ai donc appris la langue allemande en même temps que le français. Cela soit dit pour établir ou plutôt pour constater un ,trait-d’union‘ entre nous“.

3 Am linken Rand: J’espère que Madame votre mère est en bonne santé. Est-elle toujours à Gotha? Veuillez, je vous prie, la saluer respectueuesement de ma part lorsque vous lui écrivez.

Faksimiles: Universitätsbibliothek Graz Abteilung für Sondersammlungen, Creative commons CC BY-NC https://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/ (Sig. 01367)