Zitiervorschlag: Anonyme (Claude de Crébillon) (Hrsg.): "N°. 6.", in: La Bigarure, Vol.10\006 (1751), S. 41-48, ediert in: Ertler, Klaus-Dieter / Hobisch, Elisabeth (Hrsg.): Die "Spectators" im internationalen Kontext. Digitale Edition, Graz 2011- . hdl.handle.net/11471/513.20.5098 [aufgerufen am: ].
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N°. 6.
Ebene 2► Brief/Leserbrief► TOut ce qui porte l’empreinte du génie ayant droit de vous plaire, surtout lorsqu’il est encore marqué au coin de la Nouveauté & de l’utilité, je crois vous faire plaisir, Monsieur, de vous faire part d’une nouvelle invention qui porte ces trois caracteres. C’est une Boussole, d’une nouvelle construction, que M. Antheaulme vient de presenter à notre Academie des Sciences, & dont voici la description.
Allgemeine Erzählung► Ceux qui ont inventé la Boussole ordinaire se sont attachez surtout à donner à l’Aiguille Aimantée toute la mobilité possible, persuadez que c’étoit l’unique moyen de faciliter sa direction, dans les gros tems. Mais on est obligé de convenir que si cette grande mobilité est alors utile, & même essentielle, elle occasionne en même tems des écarts fréquents, & expose à des meprises dangereuses, la Boussole, lorsqu’elle est une fois détournée de sa direction, ne la reprenant qu’après un grand nombre de vibrations. Depuis vingt ans l’Auteur a cherché les moyens de remedier à cet inconvenient, & croit l’avoir trouvé. Voici comment.
Du fond de sa Boussole part un petit pillier de cuivre, délié, assez gros néanmoins, à son extré-[42]mité, pour que l’on puisse menager une cavité capable de recevoir un grain d’Agate, de forme Cylindrique, d’une ligne & demie de diametre, qu’on y attache avec de la cire d’Espagne. On creuse cette Agate, en forme d’un Cône, dont l’ouverture est d’une grande ligne, & la profondeur, qui est aussi d’une ligne, se termine, par le fond, en une pointe mousse formant comme un Hemisphere concave dont l’espace égale la grosseur de la tête d’une Epingle fine. Cette petite Coupole est destinée à recevoir le pivot d’un Balancier dont l’Axe est une Aiguille d’acier trempé, longue de cinq lignes, & de la grosseur d’une grosse aiguille à coudre, dont les deux extrémitez, servant toutes deux de pivot, doivent se terminer en pointe très déliée, & cependant un peu obtuse pour l’empêcher de s’émousser par le frottement. Le milieu de cet Axe doit être taraudé, pour le faire entrer à vis dans le centre du Balancier construit de la maniere suivante.
Comme il doit être très leger, & en même tems, assez solide, pour suporter les ébranlements & les secousses que la Boussole peut éprouver dans le Vaisseau, il faut le faire d’une seule piece de cuivre, écroué, & mince, divisé en trois branches d’environ trois quarts de ligne de largeur qui, se réunissant en leur origine à tiers point, y forment une petite plaque d’une ligne & demie de diametre, un peu plus épaisse que les branches, dont le centre est taraudé, pour recevoir l’Axe, ou Aiguille à double pointe. L’extrémité de chaque branche doit être à vis pour porter un petit poids de cuivre qu’on puisse, au besoin, éloigner, ou approcher, du centre du Balancier. On plie ensuite ces trois branches, en forme d’Axe abaissé vers la pointe [43] inferieure du pivot qui est au milieu ; ce qui le maintient exactement à plomb ; & s’il n’y étoit pas assez, on acheve de l’y mettre en éloignant, ou raprochant du centre, les petits poids.
La pointe superieure du pivot est destinée à recevoir la chape de la Rose. On peut se servir, pour faire cette chape, d’une Agate, ou d’une pierre de Medoc. On y creuse aussi une cavité en forme de Cône, de deux lignes de profondeur, & d’autant d’évasement, en observant pour le fond la même chose que pour le premier grain d’Agate, dont il est parlé ci-dessus. La forme exterieure de cette chape est, à peu près, la même que la forme interieure, excepté vers le bord, que l’on fait plus aprochant du Cylindre pour y placer & arrêter la Rose.
Il n’est pas nécessaire de dire que la Rose doit être très légére. Pour la rendre telle, on enferme entre deux papiers, sur les quels elle est destinée, une feuille de Tole d’Irlande, très mince, dont le diametre soit plus petit de deux lignes que les papiers, afin que les bords de ceux-ci ne se décolent point ; ce qui autrement pouroit arriver, le Tole ne prenant pas aisément la colle.
L’Aiguille Aimantée que l’on attache à cette Rose doit être faite d’une largeur & d’une épaisseur égale dans toute sa longueur, excepté ses deux extrémitez qui se terminent en pointe un peu camuse ; & vers le milieu il est à propos de menager un renflement en largeur, afin de pouvoir y percer un trou de trois lignes de diametre sans l’affoiblir. On donne deux lignes de largeur, & trois quarts de ligne d’épaisseur. Je crois pouvoir faire observer, ajoute M. Antheaulme, que l’Aiguille Aimantée avec les barres Ma-[44]gnetiques a beaucoup plus de force directrice, que celles qui sont Aimantées à la maniere ordinaire.
Il faut arrêter la chape dans la Rose avant que d’attacher l’Aiguille Aimantée. Voici comme l’on s’y prend On perce, au centre de la Rose, un trou un peu plus petit que le diametre du bord exterieur de la chape ; après quoi, par dessous, on fait entrer cette chape qu’on recouvre auparavant d’un pain à cacheter, le quel se trouvant pris entre la Rose & la Chape les colle ensemble, lorsqu’il est sec, aussi fortement que la sertissure retient un diamant dans le chaton. On prend garde que la chappe n’excede pas dessous la Rose & en arrête l’Aiguille Aimantée à l’ordinaire. Il est même assez commode de ménager dans l’Aiguille, près de ses deux extrémitez, de petites oreilles percées chacune d’un petit trou pour l’attacher sur la Rose avec des pointes de cuivre à tête. ◀Allgemeine Erzählung
Voila, Monsieur, une nouvelle perfection don ée <sic> à la Boussole, qui, si elle réussit, se a <sic>, sans contredit, d’une grande utilité pour nos Navigateurs à qui elle épargnera bien des peines & bien des fatigues occasionnées par le derangement que la violence des Tempêtes cause toujours dans les Boussoles ordinaires. Comme on ne sçauroit avoir trop de reconnoissance pour tous ceux qui s’apliquent à perfectionner les Arts & les Sciences, & surtout un Art aussi essentiel & aussi utile que celui de la Navigation, il n’y a point de nation commerçante qui ne doive s’interresser au succès de cette découverte que M. Antheaulme a soumise aux lumieres de notre Academie qui est actuellement occupée à l’examiner. . . .
Metatextualität► A propos d’Académie, je ne sçai si je vous ai [45] marqué que celle de Berlin avoit mis au nombre de ses Membres deux de nos Beaux Esprits, grands Metaphysiciens, & qui, pour l’avoir trop été, se sont fait des affaires avec un certain Corps qui n’aima jamais les Raisonneurs. ◀Metatextualität Le premier est M Toussaint, Auteur de l’excellent Livre des Mœurs, qui a fait tant de bruit, & dont on a fait, en peu de tems, un grand nombre d’éditions. Le second est M. Diderot, Auteur de quelques autres ouvrages qui n’ont pas moins éclaté, & qui est actuellement occupé à la direction du fameux Dictionnaire Encyclopedique dont il nous a donné dernierement le prospectus. Quelques personnes ont paru étonnées que notre Academie des Quarante ne leur ait pas fait cet honneur ; à quoi l’on a repondu par l’Epigramme suivante qu’on vient de me remettre.
Epigramme.
Ebene 3► Sçait-on pourquoi les Prussiens,
Disoit-on à certain Caustique,
Plûtot que les Parisiens,
Donnent le titre Academique ?
Oh ! oui, reprit le Satirique :
C’est qu’en Prusse on veut, pour tout bien,
Que le sçavoir soit un Arbitre unique
Pour le nom d’Académicien. ◀Ebene 3
L’usage où sont Messieurs nos Quarante de ne donner des places dans leur Corps qu’aux Cand dats <sic> qui les sollicitent, & qui souvent les obtiennent plutôt par leurs brigues, que par leur mérite, a occasionné cette Epigramme dans la quelle on leur reproche cet abus qui, à dire le vrai, ne leur fait point honneur.
Il n’en est pas de même d’une petite piéce qui roule ici, depuis quelques jours, & qui en fait beaucoup à son illustre auteur. C’est une Lettre [46] Pastorale de M. le Cardinal de Tencin, Archevêque de Lyon, & Ministre d’Etat. Metatextualität► Vous aurez, sans doute, appris par les Nouvelles publiques, que ce Prélat a demandé & obtenu du Roi la permission de se retirer dans son Dioceze, pour y consacrer à Dieu, à son salut, & au soin de son Troupeau le reste des jours que la Providence lui a destinez. ◀Metatextualität Voici cette petite piéce, qui est ici fort estimée, sur tout à cause de la noble simplicité de son stile, dans la quelle on reconnoit encore celui du Ministre d’Etat.
Lettre
De S. E. Mgr. le Cardinal de Tencin, Archevêque, & Comte de Lyon, Primat de France, Commandeur de l’Ordre du S. Esprit, Ministre d’Etat, Proviseur de Sorbonne, Adressée aux Fidelles de son Diocèse.
Versailles 8 Mai 1751.
Ebene 3► « Les causes de notre absence vous étoient connues, Mes Très Chers Freres. Elles écartoient les reproches que vous auriez pû nous faire. Quoique éloignez de vous, nous avons tâché de nous rendre toujours presents par notre attention, par nos soins, par notre vigilance. Cependant notre cœur n’étoit pas satisfait. Il soupiroit sans cesse vers vous ; & nous attendions le moment où nous pourions nous retrouver au milieu de notre Troupeau, pour finir nos jours avec lui. Le Roi a bien voulu nous en accorder la permission ; & nous avons surmonté la douleur de nous éloigner d’un si bon Maitre ; douleur extrême, dont on ne peut bien juger que quand on a eu le bonheur d’approcher de S. M. & d’être témoin de sa bonté, de sa douceur, de son affabilité, de sa moderation, de sa justice, de son amour [47] pour la Religion, de tant de faits glorieux, & de tant de rares qualitez qui le rendent de tous les Princes le plus grand ; &, s’il étoit permis de parler ainsi de son Souverain, l’homme du monde le plus aimable.
Il est bien consolant pour nous de pouvoir, en arrivant, vous annoncer la grace du Jubilé. Vous recevrez bientôt notre Mandement, & nos Instructions sur ce sujet. Notre retour pouvoit-il avoir lieu sous de plus heureux auspices ? Le fruit que vous en retirerez mettra le comble à notre consolation. Sur ce, nous prions Dieu qu’il verse sur vous, Mes très chers Freres, ses plus abondantes Bénédictions
P. Card. de Tencin. ◀Ebene 3
Les deux amours au bal.
Ebene 3► Deux habitans du païs de Cithère,
Amours nommés en langage vulgaire,
De par Venus ayant commission,
Alloient remplir chacun leur mission.
L’un de plaisirs & de fêtes avide,
Ne respiroit que le monde & le bruit ;
L’autre, toujours doux, modeste, timide,
Fuyoit la foule & l’éclat qui la suit.
Nos Voyageurs avoient fait longue traite ;
(Amours ne sont de roc ou de metal)
Où ferons-nous, ce soir, notre retraite ?
Dit l’un des deux, à voix basse & discrete. . . . .
Où ? d’un ton haut, lui repond l’autre ? . . . au Bal.
De gîte, Ami, là nous n’aurons disette.
C’étoit alors le tems du Carnaval.
Vers du M . . . soudain prenant sa route,
Comme un éclair ce Dieu perce la voute
D’un Cabinet de cent feux éclairé ;
D’objets brillants le Bal étoit paré ;
Les Ris les Jeux, se mêlant dans la danse,
En folâtrant en marquoient la cadence.
[48] Là, notre Amour, l’amateur du fracas,
Le turbulent, j entens <sic>, non le modeste,
Notre Amour, dis-je, animant tout au geste,
Mettant en œuvre & bruns & blonds appas,
Que sçai je enfin ? toute la Mechanique
Dont ces Dieux-là se servent en tel cas,
Pas ne tarda qu’il ne trouva pratique.
Mais là, tandis qu’exerçant ses talens
De plus d’un cœur il vit s’ouvrir l’entrée,
Son compagnon, Amour du bon vieux tems,
Du tems jadis, renouvellé d’Astrée,
Dans son maintien, tremblant mal assuré
Baisse les yeux, en un coin retiré.
Envain pour lui son air demande grace,
Point de pitié pour le pauvre étranger ;
Nul cœur n’est là qui s’offre à l’heberger ;
Nul, je dis trop ; en un il trouva place,
En un je dis, & ce cœur fut le mien.
Ne demandez, Iris, par quel moyen
Ce jeune enfant sçut chez moi s’introduire ;
S’il me surprit, si je le voulus bien,
Point ne sçaurois au juste vous le dire,
Hors vous, alors mes yeux ne voyoient rien. ◀Ebene 3
J’ai l’honneur d’être &c.
Paris ce 28 Mai 1751.
◀Brief/Leserbrief ◀Ebene 2
Livres Nouveaux
Qui se trouvent à la Haye chez Pierre Gosse Junior, Libraire de S. A. . <sic>
Histoire Generale d’Espagne, traduite de l’Espagnol de Jean de Terreras, enrichie de notes Historiques & Critiques par Mr. d’Hermilly, 4. 10 vol. fig. Paris 1751.
Oeuvres de Medecine de Mr. de la Mettrie, 4. Berlin 1751.
Histoire des Revolutions de l’Empire des Arabes, par Mr. l’Abbé de Marigny, 12. 2 vol. Paris 1750.
Cours de Chymie, pour servir d’Introduction à cette Science, par Nicolas le Fevre, cinquième Edition, revue, Corrigée & augmentée d’un grand nombre d’Operations & enrichie de figures, par Mr. du Monstrier, 12. 5 vol. Paris 1750.
Spectacle de la Nature 12. tome huitième separement, Paris 1750.
Jeudi ce 3 Juin 1751.
◀Ebene 1