Sugestão de citação: Justus Van Effen (Ed.): "XI. Dialogue", em: Le Nouveau Spectateur français, Vol.3\011 (1723-1725), S. 226-231, etidado em: Ertler, Klaus-Dieter / Fischer-Pernkopf, Michaela (Ed.): Os "Spectators" no contexto internacional. Edição Digital, Graz 2011- . hdl.handle.net/11471/513.20.2045 [consultado em: ].
Nível 1►
XI. Dialogue.
Nível 2► Satire► Diálogo► Metatextualidade► De Licidas qui bâtit, & d’un Architecte. ◀Metatextualidade
Licidas, L’Architecte.
Licidas.
C’est donc là le plan de mes appartemens ? cela me paroît assez bien ; mais il me semble que je ne vois pas de chambre commode où je puisse coucher, ni de cabinet pour me retirer quand je voudrai travailler à mes affaires.
L’architecte.
Hé si, Monsieur ! Voulez-vous bâtir en Bourgeois ? Est-ce pour leur commodité que les gens de bon goût se logent aujourd’hui ; Voyez la beauté de cette enfilade. Pouvoit-on mieux ménager le terrain : vous gâteriez tous si vous vouliez des chambres & des cabinets de commodité : Cela seroit bon, si [227] vous aviez assez d’etenduë pour bâtir en retour, mais à peine en avez-vous assez pour cinq piéces de plein-pied & une galerie : vous n’en sçauriez avoir moins si vous voulez être bien logé.
Mais si au lieu de cette galerie, nous faisions un appartement commode ?
L’architecte.
Cela se peut faire ; mais vous gâterez votre maison, au lieu qu’en faisant une galerie, vous aurez un appartement d’une longueur raisonnable, & dont toutes les pieces se découvriront d’un coup d’œil.
Je comprends que cela sera beau à la vûë.
L’architecte.
Beau ? cela sera magnifique : personne n’entrera chez vous qui ne s’écrie, dès l’antichambre, que vous êtes superbement logé, c’est tout ce que doit souhaiter un homme de bon goût qui cherche une maison. [228]
Il faudra donc disposer une de ces cinq pieces de maniere que j’y puisse coucher commodément ; il faudra trouver dans un autre de la place pour un bureau & des armoires à papiers.
L’architecte.
Ah ! Monsieur, gardez-vous en bien, toutes ce vilenies-là gâteroient votre appartement ; ce n’est-pas que vous ne puissiez placer un lit dans la quatriéme de vos pieces, j’y donnerai assez de profondeur pour cela, & vous mettrez un bureau & des armoires, si vous voulez, dans la cinquiéme ; mais pour y coucher & pour avoir des papiers, cela ne se peut.
Comment ! je ne pourrai ni coucher ni travailler à mes affaires dans mon appartement ?
L’architecte.
Non, Monsieur ; nul homme de bon goût n’a aujourd’hui dans ces sortes d’appartemens ni un lit pour coucher, ni un bureau pour travailler. [229]
Il faut donc n’y mettre ni lit, ni bureau, ni armoires ?
L’architecte.
Hé ! de quoi les meubleriez-vous ? tout cela est necessaire pour meubles un appartement, mais non pas pour s’en servir.
Il n’est pas permis de se servir de ses meubles ?
L’architecte.
Non, quand on veut être bien logé : les lits, les bureaux, les armoires ne servent que de parade ; voïez Monsieur de . . . . qui est un Financier de si bon goût ; il a un bureau de six pieds de long, qui lui revient à quatre mille six cens livres, & deux armoires à papiers d’un dessein exquis, qui lui ont coûté près de dix mille francs ; le bureau est placé à son jour, il a ses armoires sous sa main, mais il se garde bien de s’en servir ; son bureau n’est bon tout au plus que pour écrire une lettre, & il n’a dans ses armoires à papiers que du vin de Canarie . [230]
Mais, Monsieur l’Architecte, où coucherai je donc, & où pourrai je travailler ?
L’architecte.
Laissez-moi faire, je vous dispose dans le comble trois jolies petites pieces ; car vous ne voulez pas de second étage ; il faut donner assez de hauteur à votre appartement pour ne laisser au-dessus que des chambres en galletas ; c’est-là que vous pourrez coucher & travailler.
Ah ! j’y ferois trop incommodé, j’aime à coucher commodément ; je crains le froid, le chaud, & toutes les incommoditez d’un galletas.
L’architecte.
Et seriez vous moins incommodé dans votre grand appartement ? il faut, vous le sçavez, qu’il soit percé des deux côtez, & que les fenêtres soient ouvertes jusqu’en bas : d’ailleurs les portes, selon les mesures que j’ai prises, doivent avoir douze pieds de haut, c’est-à-dire un pied moins que les fenêtres. Croïez-vous, dans un appartement si ouvert, vous pouvoir garentir du froid & du chaud ? [231]
Mais si nous l’ouvrions moins : si les fenêtres & les portes. . . .
L’architecte.
Quoi ! vous voudriez renoncer au plaisir & à la gloire de faire voir tout d’un coup à ceux qui entreront chez vous, la beauté d’un appartement ouvert de tous côtez ? C’est-là tout ce que vous devez vous proposer en vous logeant.
Moi, je voudrois qu’il me fût permis de me loger pour être logé.
L’architecte.
Cela étoit bon autrefois, où l’on n’avoit point de goût ; croïez-moi, Monsieur, vous vous consolerez bien-tôt l’incommodité d’un galletas, par le plaisir d’entendre dire à tout le monde que votre appartement est magnifique. ◀Diálogo ◀Satire ◀Nível 2 ◀Nível 1