Le Nouveau Spectateur français: No. 21
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No. 21.
Zitat/Motto
Est modus in rebus sunt
certi deique fines, Quos ultra citraque nequit consistere
rectum. Hor. Il y a de certaines bornes dans les
objets, il y a des limites en deça & un dela desquelles ce
qui est bon, & juste, ne sauroit subsister.
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Ce quo’on trouve de plus
extraordinaire dans les esprits même de la meilleure trempe,
c’est cette noble force de garder un juste milieu, & de
suivre d’une manière généreuse & desintéressée, la route que
nous marque le flambeau de l’évidence. Les jugemens
de l’ame humaine vont le plus souvent vers les extrêmitez, à
mesure que la Passion les entraine. On trouve dans le celébre
Monsieur De la Motte un sensible exemple de cette triste vérité.
Rien de plus different, & même de plus diametralement opposé
que l’idée, que differentes parties du Public se forment de son
genie & de ses Productions. Ses Partisans ne reconnoissent
rien de superieur à son esprit, à ses talens & à son gout. A
peine soupçonnent-ils ses ouvrages d’avoir quelques taches,
quelques imperfections ; Ses fautes mêmes sont des beautez ; son
genie seul renferme le merite des beaux Esprits Anciens &
Modernes, dans tous les genres d’écrire, il atteint au plus haut
dégré, & il n’y a que la jalousie la plus aveugle, qui
puisse lui disputer le premier rang sur la Parnasse. Au
sentiment de la Cabale qui lui est contraire, il n’y a dans les
productions de Monsieur de la Motte, qu’un faux air d’esprit,
qui frappe & qui éblouit un Lecteur peu pénétrant ; Dans le
fond cet Auteur est aussi pitoyable Profateur, que miserable
Poëte ; dis-je, il n’est pas Poëte seulement & il semble
n’avoir essayé ses minces talents dans toutes les differentes
branches du bel Esprit, que pour demontrer, qu’il étoit
incapable de réussir dans aucune. Rien de plus outré que ces deux jugemens directement contraires, rien de plus
éloigné du veritable point de vuë, duquel une raison clame peut
considérer le merite de cet illustre Ecrivain. Ceux qui
idolatrent Monsieur De la Motte sont coupables certainement ou
d’une complaisance bien aveugle ou d’un grand manque de
discernement. Pour ceux qui cherchent à anéantir sa réputation,
il me semble qu’ils doivent nous être suspects de se laisser
séduire par des illusions plus honteuses. Un défaut de goût
& de lumieres ne sauroit produire seul cet effet. Il n’est
gueres possible que du moins les Chefs de cette cabale n’aïent
les yeux couverts du voile d’une maligne jalousie, ou qu’une
criante injustice ne les anime à démentir leurs propres lumieres
par leurs discours imposteurs. Pour ce qui regarde une foule de
Petits-Maitres, Beux-Esprits apprentifs, à qui le seul nom de
Monsieur de la Motte donne un air moqueur & dédaigneux, je
crois peu nécessaire de les honorer ici de quelque attention.
C’est la mode qui est l’unique arbitre de leurs opinions
passageres. Ils décrient cet Autheur par le méme Principe qui
leur fait porter de petits chapeux. Je ne crois pas être plus
éclairé ni que les admirateurs les plus excessifs de Monsieur De
la Motte, ni que ces censeurs les plus amers & les plus
injustes ; J’ose m’imaginer pourtant que je suis plus en état
qu’eux de bien péser son mérite, parce qu’aucune passion, & si j’ose dire, aucun préjugé ne fait sortir mon
jugement de son équilibre. Dans cette situation calme, je me
fais fort de prouver à des Lecteurs un peu équitables, que
Monsieur De la Motte est un des Autheurs François qui fait le
plus d’honneur à son Siécle. Qu’il a une belle imagination
soutenue par un esprit juste, net, judicieux, que généralement
parlant son stile clair & expressif se proportionne avec art
à la nature de ses sujets. Enfin que dans tous les genres
d’écrire qu’il a essayez, il est au dessus du mediocre, que dans
quelques-uns il excelle & trouve parmi ses contemporains peu
de genies qui l’égalent. On peut considerer cet illustre
Ecrivain & comme Prosateur & comme Poëte ; j’ai été
autrefois d’opinion qu’il avoit plus de talens pour écrire en
Prose, qu’en Vers. Il semble avoir fait des efforts pour oter
cette idée à ses Lecteurs. De petits discours de sa façon, qui
ont paru depuis peu, m’ont semblé peu naturels & defigurez
par l’affectation de certaines phrases peu ordinaires, &
même un peu précieuses. Cette fausse beauté n’avilit pas ce
qu’il a écrit autrefois. Dans son discours sur la Poësie &
dans tout ce qu’il a donné au public sur Homere, & pour se
defendre contre les attaques brusques & impétueuses de la
Savante Dacier, on voit regner un stile net, aisé, mesuré,
Harmonieux, varié avec art. Que pour le fond du
Proces, il ait eu tort ou raison, on trouve dans la maniere,
dont il plaide sa cause, la plus grande & la plus véritable
justesse d’esprit. Rien de plus débarassé que ses conseptions ;
elles sont exprimées dans des termes si propres, si naturels, si
convenables aux sujets, que les idées semblent passer de son
esprit dans le notre dans toute leur Spiritualité, pour
m’exprimer ainsi ; & sans l’enveloppe des paroles. J’avouë,
que dans ces piéces, on ne découvre pas cette profondeur de
raisonnemens, cet art de puiser une vérité dans ses prémiers
principes, qui éclate dans l’admirable ouvrage de l’Abbé
Terasson ; Ouvrage, que j’ose appeller la plus excellente
Poëtique qui ait vu le jour, quoiqu’il ait le malheur d’être
décredité par un stile, qui n’étoit pas assez à la mode. C’est
ainsi qu’un travers d’esprit trop en vogue, méprise l’homme du
merite le plus accompli, lorsque son habit n’est pas du bon gout
regnant. Il est étonnant que notre Autheur dans un âge plus
avancé ait quitté ce stile dicté par la nature, & par le
genie de la Langue, pour donner dans une diction plus
quintessencié & plus puerile. Je n’en saurois trouver la
source que dans une excessive complaisance de l’Autheur pour le
gout public, qui a été inondé depuis quelque temps d’un stile
affecté, & précieusement sententieux, qu’on a
approuvé par dégout pour les bonnes choses & par un amour
peu sensé pour l’extraordinaire. Monsieur de Fontenelle est un
des hommes du siécle le plus respectable pour ses lumieres &
pour son genie ; Je crois pourtant que le mauvais gout en
question derive de l’imitation de sa maniere d’écrire. Elle a
fait sur les François le même effet que produisit celle de
Seneque sous les Romains fatigués du stile male & naturel du
siécle d’Auguste. Monsieur de Fontenelle veut avoir toujours de
l’esprit & de la finesse, & rarement le veut-il en
vain ; les petites periodes coupées ont un air d’esprit, mais
qu’on les creuse, cet air est peu souvent trompeur ; Il
n’imprime pas toute sa pensées, il en laisse deviner une partie
à son Lecteur. Mais d’ordinaire la pénétration du Lecteur ne s’y
exerce pas sans fruit, elle découvre ce qu’on lui a caché pour
la surprendre plus agréablement, & elle le découvre sans
équivoque, d’une manière fixe & détermiée. D’ailleurs quand
cet excellent Autheur hazarde une expression ou une phrase ; ce
n’est point uniquement pour se distinguer par l’ostentation d’un
Langage peu commun. On voit que son but est d’épargner les
expressions, de gagner de la brieveté & de la précision,
& de fortifier sa pensée par des idées accessoires. Le
brillant de ce stile paroit avoir frappé & le public &
la foule des Autheurs, qui paroissent s’être donné le
mot pour écrire dans ce gout. Ils n’ont pas taché seulement de
l’attrapper dans des Lettres, dans des Dialogues, & dans ces
sortes d’Ouvrsages, ou le stile coupé, & les termes hazardez
tendent à imiter la conversation : Non ; il n’y presque qu’un
stile en France qui s’est étendu sur toutes sortes de
productions de l’esprit ; Histoires, Nouvelles, Harangues,
Sermons, raisonnemens, tout a été exprimé en petites periodes ;
tout a revetu un art de sentence. L’on diroit que la France
entiére est devenuë pulmonique, & que tous les Autheurs
songent à ménager la poitrine foible, & le défaut d’haleine
de leurs Lecteurs. On ne se servoit autrefois de sentences, que
comme un employe des joyaux precieux, pour relever la grace d’un
habit ; Mais à present on couvre tout de pierreries. Par malheur
ce ne sont gueres que des Cristaux, qui ont quelque éclat dans
l’éloignement, & à qui l’examen fait perdre tout leur prix
imaginaire. Un grand nombre d’Auteurs les plus modernes,
imitateurs du stile de Fontenelle n’ent ont attrapé que le
corps, sans en saisir l’esprit. Leur especes de sentences ;
consues bout à bout, donnent bien souvent de l’obscurité au lieu
de délicatesse ; bien souvent on en tire deux ou trois sens
également probables ; quelquefois l’idée qu’on croit y
entrevoir, s’évanouit à mesure qu’on peut y penetrer, ce sont des Enigmes, qui n’ont point de mot. S’ils
employent un terme ordinaire, ce n’est que pour suppléer à ce
que l’idée qu’ils veulent exprimer a de commun, & si cette
expression n’obscursit pas leur pensée, elle n’est tout au plus
que l’équivalent d’un autre terme plus autorisé par l’usage.
Quand il arrive même que ce stile coupé sert a nous communiquer
des idées claires & déterminées, je crois qu’on se trompe en
s’imaginant qu’il est plus concis & qu’il exprime d’avantage
qu’un stile dont les periodes ont une juste grandeur. Il n’y a
qu’un nombre mediocre de grandes veritez que les seuls esprits
superieurs peuvent renfermer toutes entieres dans un nombre fort
borné de paroles. Les autres idées n’en sont pas susceptibles ;
si pour les exprimer, au lieu d’une periode bien liée, on veut
en employer quater ou cinq, on a besoin de plusieurs termes
auxiliaires ; chacune de ces periodes ne renferme qu’une partie
décousue de l’idée, qu’on veut exciter ; & de cette maniere
quelques limitées que soient ces parcelles du stile, on court
risque avec de l’esprit & des lumieres d’y renfermer un sens
encore moins étendu. Ce stile coupé, par consequent, doit être
fort souvent long à force d’être court, & ces petites
periodes peuvent donner facilement dans un véritable verbiage.
Ajoutons qu’elles excluent du discours cette agréable
varieté si nécessaire pour soutenir l’attention, & que
quelques brillantes qu’elles puissent être par les pensées elles
fatiguent bientôt l’oreille par une rebutante uniformité.
Monsieur de la Motte auroit senti ces veritez, s’il a voit fait
reflexion ; Il auroit evité un malheur, qui le confond
quelquesfois avec des esprits qui lui sont inferieurs de toutes
manieres, & il se seroit dérobé à des censures, qui ne
péchent que du côté de l’excez & de l’amertume. Il est temps
de le considerer comme Poëte. J’ai déjà insinué qu’on lui
conteste ce titre ; Je puis protester du moins qu’une vingtaine
de jeunes-gens pleins de feu & de vivacité, m’ont assuré que
dans les ouvrages de Monsieur De la Motte, il n’y a pas la
moindre trace de ce qu’on appelle genie Poëtique Il est vrai que
lorsqu’on leur demande ce que c’est que ce génie, ils ne
daignent point vous en donner la definition. Ils prétendent que
ce sont là de ces choses qui dépendent du gout, & non pas de
la raison, & qu’il faut sentir plûtôt, que concevoir. Ils
s’arrogent même la prérogative de se moquer de ceux qui
établissant la même maxime, se croïent authorisez à avoir un
gout & un sentiment tout comme eux, quoiqu’ils goutent &
qu’ils sentent d’une manière fort differente. Ces derniers
croïent qu’un argument qui consiste dans un souris
moqueur, ou dans une maniere dedaigneuse de hausser les épqules
leur sied aussi bien qu’à qui que ce soit ; & des gens, plus
asservis à la raison que les uns & les autres, ne pensent
pas se donner de trop grands airs en se moquant également de ces
deux classes de gens de bon gout. Je ne veux pas prendre parti
directement dans cette dispute, mais j’ose déclarer, que selon
moi le gout en matiere de bel esprit, n’est pas de ces gouts,
dont il ne soit pas permis de disputer ; que ce gout étant la
règle d’une beauté essentielle, ne sauroit être arbitraire ; que
s’il lui est permis de sentir, indépendenment d’un raisonnement
dans les formes, il doit de necessité avoir recours à ce
raisonnement, quand on lui dispute son infaillibilité ; que ce
gout est faux quand il ose se mettre à l’opposite de la raison ;
& incertain, quand il est incapable de se lier à des
principes incontestables ; Je m’imagine par conséquent qu’il
faut donner une exacte definition de L’Esprit Poëtique avant que
de pouvoir decider sans audace les questions ; Si ! Monsieur de
la Motte est Poëte, & dans quel degré il est Poëte, dans les
différentes branches de la Poësie ? Pour ne rien embrouiller
ici, je croi qu’il faut distinguer d’abord entre l’Esprit
Poëtiqe, & l’Esprit Versificateur. L’un n’est pas l’autre.
Que de Versificateurs, par exemple, qui ne sont pas Poëtes !
L’une & l’autre de ces qualitez, cependant, sont absolument
nécessaires pour constituer le caractere entier
d’un homme qui réussit dans la Poësie. La nature du génie
Poëtique consiste dans le feu, dans la force, & dans la
richesse de l’imagination poussée à un degré extraordinaire.
C’est une imagination qui saisit avec vivacité les differents
raports des objects, qui ramasse avec rapidité des couleurs,
& des images pour les peindre & pour les rendre propres
à faire sur les ames les impressions, qui soient convenables à
leur nature. Si ce tour d’imagination est assez étendu pour
embrasser toutes sortes d’objets, on peut l’appeller un génie
Poëtique Universel. Si faute d’étenduë, ou par l’habitude d’une
application particuliere, la fertilité de cette imagination ne
se répend que sur les objets d’une certaine classe elle ne forme
qu’un génie Poëtique Particulier. C’est ainsi qu’il y a un génie
Poëtique pour la Pastorale : il y en a un pour la Satire, il y
en a un pour le Poëme Epique. Je viens de dépeindre le caractere
le plus essentiel de mon sujet ; Pour former tout à fait le
Poëte, ce caractere doit être uni au talent particulier de
menager au langage une certaine harmonie variée avec art, &
qui réponde à la nature des Tableaux, qu’on veut faire passer de
son imagination dans celle des autres, voilà le Poëte, mais il
faut que le Poëte soit sensé. Comme l’on ne sauroit peindre ce
que l’on ignore, il faut encore, pour que le tour de
génie, dont il est question, produise le beau feu Poëtique,
qu’il soit accompagné & soutenu par un esprit pénétrant,
éclairé, exact & judicieux.. Sans un tel guide,
l’imagination Poëtique prendroit le plus souvent de faux
rapports pour des rapports réels, il entasseroit sans choix les
images & les couleurs ; il en emploïeroit dont les unes
renversoient les impressions produites par les autres, & il
feroit voir d’une maniere frappante, que rien n’est plus
approchant du langage des Dieux, que le langage des foux.
Jusques ici le génie Poëtique peut briller dans une Prose
harmonieuse & cadancée. On en voit un exemple frappant dans
les Avantures de Telémaque, qu’on peut nommer à juste titre un
Poëme Epique, & l’on auroit tort de refuser encore ce nom à
l’élegante & nombreuse traduction que Me. Dacier a faite des
Poëmes d’Homere. Dans le langage ordinaire pourtant on n’apelle
pas un tel Ecrivain Poëte a moins qu’il ne joigne au génie
Poëtique le génie Versificateur, qu’il est bon de décrire aussi
en peu de Paroles. C’est le talent d’assujettir avec facilité un
discours harmonieux à de certains pieds. & à de certaines
mesures que prescrivent des regles authorisées par le gout &
par l’Usage général d’une Nation. Pour achever entiérement le
caractere du Poëte pris dans le sens le plus général, il faut encore, chez la plûpart des peuples modernes,
qu’il joigne aux talents, dont nous venons de parler celui de
faire tomber ses vers sur des sons semblables plus ou moins
limitez, selon que le gout général de chaque païs en decide.
C’est sur ces principes que j’ai taché de démêler d’une manière
nette & simple, qu’on peut juger jusqu’à quel degré Monsieur
De la Motte est Poëte dans les differents genres de son art. Je
commencerai par examiner dans quelles branches de la
Versification, & de la Poësie, Monsieur De la Motte réussit
le moins. Je croi qu’en général les vers Alexandrins ne sont pas
son fort. Il est certain que dans tous les ouvrages qu’il a
composée dans cette mesure il y a de très beaux vers : Il y en a
même des tirades entières qui ne sont pas inferieures aux
morceaux les plus soutenus de Racine. Mais en récompense il s’y
en trouve un nombre bien plus grand d’un peu foibles & pour
l’expression & pour le sens, sur tout sin on les compare
avec la force & avec la plenitude de ses Vers Liriques. On
diroit ordinairement qu’il étend sur tout un vers Alexandrin la
portion de sens qu’il est accoutumé de resserrer dans les petits
Vers de ses Odes. Ces termes dont il allonge ses grands Vers ne
sont pas proprement des chevilles, & des termes vuides ; ce
sont des expressions qui ne sont ni assez propres ni assez nerveuses, & qui paroissent trainer le sens
jusqu’à la fin de la ligne, ou de toute la periode. Ce défaut
dans la versification n’exclut pas des ouvrages, qu’il a fait
dans ces sortes de Vers, le feu Poëtique ni la varieté des
images ramassées avec choix, ornées de la beauté des pensées,
& soutenuës d’un grande justesse d’esprit. Ce merite doit se
découvrir, selon moi, à tout esprit équitalbe & eclairé,
jusques dans son imitation de l’Iliade, que j’ose trouver la
production la moins estimable qui soit sortie de sa plume. J’y
trouve des descriptions, où la beauté du genie, &
l’exactitude du discernement éclatent à l’envi ; la plûpart des
caractères des Heros y sont parfaitement bien liez & rendus
interessants par des traits frappants & convenables ; Mais
j’avouë que le détail, quoique beau en plusieurs endroits,
languit dans un grand nombre d’autres. Il y a trop d’esprit ;
faute difficile à commettre, mais qui fait autant de tort à un
Ouvrage de cette nature que le froid le plus ennuieux. Ces
traits d’esprit son très-souvent dignes d’admiration en
eux-mêmes ; l’on y decouvre quelque-fois cet assortiment du
nouveau & du juste, qui fait la beauté essentielle des
pensées ; mais ils sont déplacez ; ils n’ont point de rapport
avec la gravité du Poëme épique, dont une simplicité noble &
soutenuë est le merite essentiel. Les fleurs qui étalées avec menagement dans d’autres ouvrages de Poësie,
font un effet très agréable, amusent ici trop l’esprit à en
démêler l’art & la finesse, & ne permettent pas à
l’imagination d’exciter de grands mouvements dans le cœur.