Article XI. Armand de Boisbeleau de La Chapelle Moralische Wochenschriften Klaus-Dieter Ertler Herausgeber Michaela Fischer Herausgeber Michael Hammer Mitarbeiter Elisabeth Hobisch Mitarbeiter Katharina Jechsmayr Mitarbeiter Pia Mayer Mitarbeiter Sarah Lang Gerlinde Schneider Martina Scholger Johannes Stigler Gunter Vasold Datenmodellierung Applikationsentwicklung Institut für Romanistik, Universität Graz Zentrum für Informationsmodellierung, Universität Graz Graz 30.07.2019

o:mws.7917

Armand de Boisbeleau de La Chapelle: Le Philosophe Nouvelliste, traduit de l’Anglois de Mr. Steele par A.D.L.C. Tome Second. Amsterdam: François Changuion 1735, 114-121, Le Philosophe nouvelliste 2 011 1735 Frankreich
Ebene 1 Ebene 2 Ebene 3 Ebene 4 Ebene 5 Ebene 6 Allgemeine Erzählung Selbstportrait Fremdportrait Dialog Allegorisches Erzählen Traumerzählung Fabelerzählung Satirisches Erzählen Exemplarisches Erzählen Utopische Erzählung Metatextualität Zitat/Motto Leserbrief Graz, Austria French Männerbild Immagine di Uomini Image of Men Imagen de Hombres Image de l'homme Imagem masculina Philosophie Filosofia Philosophy Filosofía Philosophie Filosofía France 2.0,46.0

Article XI.

Du Samedi 23. au Mardi 26. Juillet 1709.

Du Caffé de Guillaume, 24. Juillet.

A peine étois-je entré dans cette Mai-son, que neuf ou dix personnes m’ont fait voir une petite Pièce en Vers, qu’elles m’ont dit qu’un Anonyme leur avoit fait tenir par la Poste. On etoit fort en peine qui pouvoit être l’Auteur de cet Ouvrage, & chacun tâchoit de le deviner. Mais tout le monde est tombé d’accord que cet Auteur avoit eu raison de donner à sa Pièce le Titre qu’il lui a donné de Supplement à une Gazette. On a trouvé en cela beaucoup de bon sens, parce que les Supplements contiennent d’ordinaire, les choses importantes que l’on a omises dans le Corps de l’Ouvrage, ou qui n’y ont pas été suffisamment expliquées. Or comme il s’agit ici de décrire la Marche d’une Armée sans Tambour & sans Trompette, & que cependant il n’est rien dit du tout de cette particularité dans les Vers suivans, on voit bien que le Poëte a dû nommer sa Pièce un Supplement, non parce que c’en est un à la Lettre, mais parce que c’en est un en Figure, par le besoin que l’on en auroit pour deviner sa pensée. Les Ecrivains du commun suppléent à ce qui manque à leur Livres, par des Préfaces qu’ils mettent à la tête du Volume. Il seroit plus naturel de le faire à la fin du Volume, puis que de l’autre maniere on demande pardon d’une faute que l’on n’a point encore commise.

Quoi qu’il en soit nous n’avons point de Poëte du premier rang, à qui les Conjectures n’ayent attribué cette production. On n’a pu pourtant savoir au juste le nom de celui qui l’a faite ; mais quelqu’un de la Compagnie a recité deux Vers de Hudibras est le Titre d’un Poëme burlesque où le Parti opposé à Charles I. est tourné en ridicule. L’Auteur de cette Piece est Samuel Butler, né en 1612. & mort en 1680.Hudibras, qui en ont decouvert à peu près le rang & les qualitez. Voici ces deux Vers,

C’est le nom que Butler donne à l’un des ridicules Heros de son Poëme, & c’étoit aussi le nom d’un Brigadier Général, au temps que le Sr. Bickerstaff écrivoit ceci.Crowder, du Violon jouant Vaille que Vaille Conduisoit au combat la guerrière Canaille.

La Piece, au reste, repond merveilleusement au sujet & au Titre. Car il ne se peut rien qui ressemble mieux à une Armée qui Marche sans battre la Quais-se, qu’un Ecrit où l’on parle sans rien dire.

Sur le Marché de l’Armée de Tournay, sans Tambour & sans Trompette :Ou Supplément à la Gazette de Bruxelles.

Cette Piece est d’un goût si ridicule dans l’Originale, que si l’on me pardonne de l’avoir traduite, on ne trouvera pas mauvais que je n’y aye mis ni plus d’esprit ni plus de bon sens.Si je pouvois, d’un Stile naturel,

Peindre cet illustre Mortel, Son Esprit, ses Desseins, son Adresse admirable ; En le voyant si sage en tout, Et de ce qu’il entreprend venant sans peine à bout L’Univers le prendroit pour une chose incroyable. Les beaux projets se présentent à lui Tels que le souffle du Midi Qui du Chaud d’un beau jour combat la Violence. Ce vent, d’une utile fierté Dirige, avec douceur, les ardeurs de l’Eté, Et quand l’Air est plus pur, il s’envole en silence. De son Esprit telle est l’immensité Que calme & profond, sa bonté Trouve pour tous les maux un remede facile. La Fortune en a beau gronder. Elle-même, toujours contrainte de ceder Admire son grand Sens, & son Humeur tranquille. Ce dernier coup est des grands qu’il a faits. L’Eclat n’en passera jamais, S’il se trouve un Edmond Waller, né le 13. Mars 1606., & mort le 20. Octobre 1687., étoit un Poete très-estimé, à la Cour de Charles I. de Cromwel, & de Charles II. Voyez son Eloge, dans Mr. de Sr. Evremont. Oeu. Mel. To. II. pag. 16. Ed. Lond. 1705.Waller pour lui rendre justice, Peut on mieux attraper les gens ? On voit bien qu’ils sont moins malheureux qu’imprudens, Et prendre ainsi Tournay n’est pas tour de Novice. Cet ascendant, Madame, est, non l’effet D’un or que l’on seme en secret ; Mais celui des Conseils d’une Reine pieuse Votre seul but est d’abaisser L’Ennemi de l’Europe, & de faire cesser Un regne de débats, & d’infamie affreuse.

Du Caffé de St. James, 24. Juillet.

Mes Confréres, de la spirituelle Societé des Nouvellistes, ayant déja instruit le Public, en termes aussi forts qu’élegans, que la Ville de Tournay capitula le 28. de ce Mois N. S. il ne me reste plus qu’à feliciter les honnêtes gens, qui frequentent cette Maison, de l’esperance d’y remercier bien tôt Mr. Withers étoit alors Major Général, dans les Armées de la Gr. Bretagne & parvint ensuite au grade de Brigadier, & de Lieutenant Général.Mr. Withers des grands services qu’il à rendus, dans cette rencontre, à la Patrie. Personne ne merite mieux de ses Amis qu’un Homme qui comme lui, se fait distinguer à l’Armée non moins par la douceur avec laquelle il y commande, que par la belle dépense qu’il y fait avec tant de genérosité. Mylord Duc Jean, Duc d’Argyle en Ecosse, & crée en 1705. Baron de Chatam, & Comte de Greenwich, en Angleterre est né en 1682. & a commencé presque au sortir de l’Enfance, a paroitre d’une façon distinguée, tant dans les affaires d’Etat, que dans les Armées.d’Argyle a eu aussi beau-coup de part à la reduction de cette Place importante. On découvre, avec plaisir, dans ce jeune Seigneur, ce tour singulier d’Esprit, & cette grandeur d’ame, qui rendent, si utiles à l’Etat, les personnes de son rang & de sa Naissance. La Noblesse lui paroitroit un vain Titre, si elle n’étoit pas accompagnée des Vertus éminentes par lesquelles seules on devroit l’aquerir. Ce Mais, paroitra ridicule, à moins de savoir qu’il y avoit alors entre les Ducs de Marlborough & d’Argyle une mesintelligence qui fut augmentée par les flatteurs du dernier, & dont les Ennemis du premier profiterent pour fortifier le nombre de grosse Têtes que l’on ligua contre lui. Ces gens là en louant la bravoure que le Duc d’Argyle avoit fait paroitre à la Bataille de Malplaquet, affectoient d’imputer à Mylord Marlborough d’avoir exposé ce jeune Seigneur dans un des Endroits les plus dangereux, à dessein de l’y faite perir.Mais si la reputation de nos Armes est montée au plus haut point de la gloire, & si les personnes de la plus grande qualité desirent avec passion, d’y avoir quelque part, nous en sommes certainement redevables au merite & à la capacité de nôtre grand Général. Comme les Chymistes ont fait plusieurs découvertes utiles, en cherchant la Pierre Philosophale qu’ils ne trouveront jamais, & comme les idées chimeriques d’une Amitié parfaitement desinteressée, ont fait faire aux Hommes mille belles actions, qui semblent presque incroyables, on peut dire la même chose de la grandeur, & de la reputation de Mylord Marlborough. Personne n’espere d’y atteindre, & cependant cet Exemple ne laisse pas que d’animer tout le monde à se surpasser soi-même.

Article XI. Du Samedi 23. au Mardi 26. Juillet 1709. Du Caffé de Guillaume, 24. Juillet. A peine étois-je entré dans cette Mai-son, que neuf ou dix personnes m’ont fait voir une petite Pièce en Vers, qu’elles m’ont dit qu’un Anonyme leur avoit fait tenir par la Poste. On etoit fort en peine qui pouvoit être l’Auteur de cet Ouvrage, & chacun tâchoit de le deviner. Mais tout le monde est tombé d’accord que cet Auteur avoit eu raison de donner à sa Pièce le Titre qu’il lui a donné de Supplement à une Gazette. On a trouvé en cela beaucoup de bon sens, parce que les Supplements contiennent d’ordinaire, les choses importantes que l’on a omises dans le Corps de l’Ouvrage, ou qui n’y ont pas été suffisamment expliquées. Or comme il s’agit ici de décrire la Marche d’une Armée sans Tambour & sans Trompette, & que cependant il n’est rien dit du tout de cette particularité dans les Vers suivans, on voit bien que le Poëte a dû nommer sa Pièce un Supplement, non parce que c’en est un à la Lettre, mais parce que c’en est un en Figure, par le besoin que l’on en auroit pour deviner sa pensée. Les Ecrivains du commun suppléent à ce qui manque à leur Livres, par des Préfaces qu’ils mettent à la tête du Volume. Il seroit plus naturel de le faire à la fin du Volume, puis que de l’autre maniere on demande pardon d’une faute que l’on n’a point encore commise. Quoi qu’il en soit nous n’avons point de Poëte du premier rang, à qui les Conjectures n’ayent attribué cette production. On n’a pu pourtant savoir au juste le nom de celui qui l’a faite ; mais quelqu’un de la Compagnie a recité deux Vers de Hudibras est le Titre d’un Poëme burlesque où le Parti opposé à Charles I. est tourné en ridicule. L’Auteur de cette Piece est Samuel Butler, né en 1612. & mort en 1680.Hudibras, qui en ont decouvert à peu près le rang & les qualitez. Voici ces deux Vers, C’est le nom que Butler donne à l’un des ridicules Heros de son Poëme, & c’étoit aussi le nom d’un Brigadier Général, au temps que le Sr. Bickerstaff écrivoit ceci.Crowder, du Violon jouant Vaille que Vaille Conduisoit au combat la guerrière Canaille. La Piece, au reste, repond merveilleusement au sujet & au Titre. Car il ne se peut rien qui ressemble mieux à une Armée qui Marche sans battre la Quais-se, qu’un Ecrit où l’on parle sans rien dire. Sur le Marché de l’Armée de Tournay, sans Tambour & sans Trompette :Ou Supplément à la Gazette de Bruxelles. Cette Piece est d’un goût si ridicule dans l’Originale, que si l’on me pardonne de l’avoir traduite, on ne trouvera pas mauvais que je n’y aye mis ni plus d’esprit ni plus de bon sens.Si je pouvois, d’un Stile naturel, Peindre cet illustre Mortel, Son Esprit, ses Desseins, son Adresse admirable ; En le voyant si sage en tout, Et de ce qu’il entreprend venant sans peine à bout L’Univers le prendroit pour une chose incroyable. Les beaux projets se présentent à lui Tels que le souffle du Midi Qui du Chaud d’un beau jour combat la Violence. Ce vent, d’une utile fierté Dirige, avec douceur, les ardeurs de l’Eté, Et quand l’Air est plus pur, il s’envole en silence. De son Esprit telle est l’immensité Que calme & profond, sa bonté Trouve pour tous les maux un remede facile. La Fortune en a beau gronder. Elle-même, toujours contrainte de ceder Admire son grand Sens, & son Humeur tranquille. Ce dernier coup est des grands qu’il a faits. L’Eclat n’en passera jamais, S’il se trouve un Edmond Waller, né le 13. Mars 1606., & mort le 20. Octobre 1687., étoit un Poete très-estimé, à la Cour de Charles I. de Cromwel, & de Charles II. Voyez son Eloge, dans Mr. de Sr. Evremont. Oeu. Mel. To. II. pag. 16. Ed. Lond. 1705.Waller pour lui rendre justice, Peut on mieux attraper les gens ? On voit bien qu’ils sont moins malheureux qu’imprudens, Et prendre ainsi Tournay n’est pas tour de Novice. Cet ascendant, Madame, est, non l’effet D’un or que l’on seme en secret ; Mais celui des Conseils d’une Reine pieuse Votre seul but est d’abaisser L’Ennemi de l’Europe, & de faire cesser Un regne de débats, & d’infamie affreuse. Du Caffé de St. James, 24. Juillet. Mes Confréres, de la spirituelle Societé des Nouvellistes, ayant déja instruit le Public, en termes aussi forts qu’élegans, que la Ville de Tournay capitula le 28. de ce Mois N. S. il ne me reste plus qu’à feliciter les honnêtes gens, qui frequentent cette Maison, de l’esperance d’y remercier bien tôt Mr. Withers étoit alors Major Général, dans les Armées de la Gr. Bretagne & parvint ensuite au grade de Brigadier, & de Lieutenant Général.Mr. Withers des grands services qu’il à rendus, dans cette rencontre, à la Patrie. Personne ne merite mieux de ses Amis qu’un Homme qui comme lui, se fait distinguer à l’Armée non moins par la douceur avec laquelle il y commande, que par la belle dépense qu’il y fait avec tant de genérosité. Mylord Duc Jean, Duc d’Argyle en Ecosse, & crée en 1705. Baron de Chatam, & Comte de Greenwich, en Angleterre est né en 1682. & a commencé presque au sortir de l’Enfance, a paroitre d’une façon distinguée, tant dans les affaires d’Etat, que dans les Armées.d’Argyle a eu aussi beau-coup de part à la reduction de cette Place importante. On découvre, avec plaisir, dans ce jeune Seigneur, ce tour singulier d’Esprit, & cette grandeur d’ame, qui rendent, si utiles à l’Etat, les personnes de son rang & de sa Naissance. La Noblesse lui paroitroit un vain Titre, si elle n’étoit pas accompagnée des Vertus éminentes par lesquelles seules on devroit l’aquerir. Ce Mais, paroitra ridicule, à moins de savoir qu’il y avoit alors entre les Ducs de Marlborough & d’Argyle une mesintelligence qui fut augmentée par les flatteurs du dernier, & dont les Ennemis du premier profiterent pour fortifier le nombre de grosse Têtes que l’on ligua contre lui. Ces gens là en louant la bravoure que le Duc d’Argyle avoit fait paroitre à la Bataille de Malplaquet, affectoient d’imputer à Mylord Marlborough d’avoir exposé ce jeune Seigneur dans un des Endroits les plus dangereux, à dessein de l’y faite perir.Mais si la reputation de nos Armes est montée au plus haut point de la gloire, & si les personnes de la plus grande qualité desirent avec passion, d’y avoir quelque part, nous en sommes certainement redevables au merite & à la capacité de nôtre grand Général. Comme les Chymistes ont fait plusieurs découvertes utiles, en cherchant la Pierre Philosophale qu’ils ne trouveront jamais, & comme les idées chimeriques d’une Amitié parfaitement desinteressée, ont fait faire aux Hommes mille belles actions, qui semblent presque incroyables, on peut dire la même chose de la grandeur, & de la reputation de Mylord Marlborough. Personne n’espere d’y atteindre, & cependant cet Exemple ne laisse pas que d’animer tout le monde à se surpasser soi-même.