On m’a communiqué des
réflexions qui ne peuvent entrer dans aucun Ouvrage, aussi naturellement
que dans celui-ci. Je ne veux pas les priver de l’honneur qu’elles
méritent. L’homme qui m’a fait l’honneur de me les adresser, & que
je crois galant-homme, signe sa lette <sic>
On ne donne point son cœur ; il échappe. Ce n’est pour tant pas une excuse pour ceux ou celles dont le cœur s’échappe vers des objets vicieux. On n’aime point de pareils objets sans y consentir un peu, & ce consentement est une faute.
Quand une fois l’amour a tourné la tête à une fille qui manque
d’esprit, elle devient capable de tout.
Pour moi, dit
Qu’une Vivandiere épouse un brutal, cela est tout simple : qu’une
jeune personne élevée avec beaucoup de douceur & de soin, épouse
un ava-
Si l’injustice des jugemens des hommes ne suffit pas pour nous en consoler, il y a encore une ressource, leur contradiction continuelle, & leur facilité à louer des actions ridicules ou condamnables.
Le Conquérant enchaîne les Rois qu’il a vaincus ; le
marmiton se plaît à étriller le marmiton qui
lui résiste : tout cela est naturel ; mais il ne l’est pas de le
regarder comme tel, parce que nous n’avons pas assez d’esprit pour
bien connoître la nature.
Une coquette est l’esclave de ceux même qu’elle méprise : quelle
bassesse ! quel ridicule esclavage ! & que d’hommes partagent
cette sorte de servitude ! il suffit, pour n’en pas douter, de voir
combien nous sommes avides de
Ce jeune Abbé tout enflé de lui-même, & qui ne présume pas qu’une tête tonsurée puisse renfermer un esprit fort plat, a sans doute ses raisons de craindre de se communiquer. Il redoute & dédaigne l’orgueil des hommes : mais n’est-il pas mille fois plus orgueilleux qu’eux?
Il y a des gens d’une vanité assez complette pour être étonnés de trouver de l’esprit à ceux qu’ils ne connoissent pas.
Il y a des filles de roturier, dont le sort est triste & singulier. Elles sont riches, elles sont jeunes, elles sont jolies, elles dédaignent la roture, & personne ne songe à elles ; elles restent filles : je ne sçais par quelle fatalité certaines gens ne leur tiennent compte ni de leur fortune, ni de leur jeunesse, ni de leur figure, ni du mépris dont elles honorent leurs semblables.
Un homme particulier est assez souvent un homme de mérite, & plus souvent encore un homme vertueux.
Les plus grands & les plus vastes génies, les ames les plus
fortes & les
Il y a des esprits que l’adversité ne peut faire plier ; ils sont
rares : elle ne sert qu’à les rendre plus roides & plus
inflexibles : mais
L’intérêt peut faire sortir de grandes qualités, de grands talens ; non pas, que je pense, des vertus.
Est-ce aimer la vertu & haïr le vice, que de s’emporter contre certains déreglemens, & même contre certains crimes qui nuisent à nos intérêts ?
L’éducation manque presque tou-
Que sert la plus jolie figure à une fille qui manque d’éducation ? L’esprit même laisse encore ce défaut. Elle finit presque toujours par être le partage des sots.
Une Bourgeoise parvenue & qui manque d’un certain esprit, est
embarrassée de sa qualité ; les honneurs la gênent &
l’accablent ; elle prend la hauteur & l’affectation pour la
décence & la grandeur : elle est déplacée & ridicule parmi
les grands, & ne se laisse plus approcher des petits ; elle se
contrefait, se tourmente pour cela ; elle n’est plus elle-même,
& ne sera jamais ce qu’elle veut être. Disons du moins pour son
Il faut bien que les sots sentent leur sottise & le mérite des autres ; ils ne peuvent le souffrir ; ils s’effarouchent en voyant un homme d’esprit ; ils ne tiennent point en place, & se hérissent comme par instinct.
Vous négligez la fortune, vous la laissez échapper pour ne pas renoncer à la vertu ; vous êtes bien singulier ?
L’esprit intriguant & l’esprit romanesque sont très-compatibles avec la bêtise.
On est bien embarrassé avec certaines gens, on pourroit dire avec la plûpart des gens : si vous faites des sottises, ils se moquent de vous ; & ils ne vous pardonnent pas d’avoir bien fait.
On blâme le vice & on laisse-là la vertu, sur-tout si elle est indigente ; elle est alors souvent persécutée, & se sauve chez les pauvres où elle est encore un peu respectée.
Les fats courent la surface de la terre ; il y en a de bien
des sortes. Il y a le fat bel esprit, pédant & impertinent tout
à la fois : il y a le fat pétri d’ambition, d’orgueil, de dureté, ou
A voir l’ingratitude, l’injustice, la dureté & la malice des hommes, ne diroit-on pas qu’ils se dispensent légitimement de l’amour & des égards qu’ils se doivent les uns aux autres ?
L’une des marques de la médiocrité d’esprit, est de trop s’observer soi-même.
On voit répandues dans le monde
Il se trouve des gens dont l’esprit est très-médiocre, & qui veulent pourtant primer ; mais qui sont assez prudens pour ne chercher à éclipser que les sots : ils sont donc immédiatement au-dessus des sots.
La réserve & le rengorgement ne sont souvent que l’impuissance
d’être aimable.
Que de soins ! philosophie, tu soutiens que le bien & le
mal ne sont que des mots vuides de sens, que des phantomes imaginés
par
Fin du sixieme Volume.