Louis Couturat an Hugo Schuchardt (50-02008)

von Louis Couturat

an Hugo Schuchardt

Unbekannt

30. 05. 1907

language Französisch

Schlagwörter: language Plansprachenlanguage Esperantolanguage Volapüklanguage Russisch Diels, Hermann Schuchardt, Hugo (1907)

Zitiervorschlag: Louis Couturat an Hugo Schuchardt (50-02008). Unbekannt, 30. 05. 1907. Hrsg. von Frank-Rutger Hausmann (2018). In: Bernhard Hurch (Hrsg.): Hugo Schuchardt Archiv. Online unter https://gams.uni-graz.at/o:hsa.letter.7049, abgerufen am 16. 04. 2024. Handle: hdl.handle.net/11471/518.10.1.7049.


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Copie de ma lettre à M. le Prof. Leskien (30 mai 1907).1

Monsieur et honoré Collègue,

Je viens de lire le petit article que vous avez publié „Zur Kritik des Esperanto“;2 je le regrette sincèrement pour vous, car il n’ajoutera rien à votre gloire de philologue. Vous dites que vous avez essayé d’apprendre l’Esperanto; vous n’avez sans doute pas consacré beaucoup de temps et de soin à cet essai, car vous commettez des erreurs que tout Espérantiste pourrait relever, et vous ignorez des choses qui se trouvent dans tous les manuels. Il serait trop long de rectifier toutes vos assertions; je ne prendrai qu’un exemple typique. Vous critiquez le mot „preĝejo“, église (Kirche), littéralement: lieu de prière (Betort), parce qu’il constituerait un contresens dans cette phrase: „Le pape est le chef de l’Eglise catholique“. C’est là une faute qu’un novice ne commettrait pas; car il trouverait dans son Wörterbuch deutsch-esperanto „Kirche (Gebäude), preĝejo; (Gemeinschaft), eklezio“; et dans son Wörterbuch esperanto-deutsch: „eklezio, Kirche (die Gemeinschaft der Gläubigen, nicht das Gebäude; vgl. preĝejo)“. C’est clair, et à la portée d’un enfant de dix ans. Et du même coup, l’élève espérantiste apprend à distinguer deux concepts bien différents, que nos langues confondent. C’est pour cela qu’on a pu dire avec raison que l’Esperanto est une école de logique, et qu’il sera le latin de la démocratie. Mais tout cela vous a échappé, dans votre empressement à critiquer une langue que vous jugez sans doute indigne de l’attention d’un philologue. Tout ce que vous en dites prouve que vous l’avez étudiée d’une manière bien superficielle et bien légère; mais alors vous n’avez pas le droit de citer votre expérience personnelle comme probante; car vous n’y avez certainement pas consacré „des mois“ ni même „des semaines“; et vous devriez vous en rapporter à ceux qui, comme moi et tant d’autres, ont réellement fait l’expérience, et sont arrivés à posséder l’Esp. à fond en quelques mois, et à le manier bien mieux et plus facilement qu’aucune des langues mortes ou vivantes qu’ils ont étudiées pendant 9 ou 10 ans. De même, vous jugez la phonétique de l’Esperanto du fond de votre cabinet, alors que pour pouvoir le faire avec quelque compétence, il faudrait avoir assisté |2| (comme moi) à l’un des Congrès espérantistes, où se trouvent réunis des gens de 20 nations différentes; et alors vous auriez constaté „par expérience“ que ni les finales aj, oj, n’offrent la moindre difficulté aux Français, ni les finales as, is, os, ne sont escamotées par les Anglais, ni les tio, kio, etc. ne sont prononcés par personne comme tjo, kjo, parce que l’accent est sur l’i. C’est donc vous qui raisonnez et jugez „sur le papier“; et vous ne reprocheriez pas au Dr Zamenhof d’avoir élaboré sa langue „sur le papier“, si vous saviez qu’avant de la publier il l’a soumise à des années d’épreuve et d’essais oraux, auxquels elle doit sans doute son harmonie remarquable, reconnue par le Prof. Diels lui-même (voir la lettre du Dr Zamenhof à Borovko, à la fin des Esperantaj Prozaĵoj).3 Mais vous paraissez connaître aussi mal l’histoire de l’Esperanto que la langue elle-même. Que dire d’un philologue qui entreprend d’aprécier une langue sans l’avoir sérieusement  étudiée? Que penseriez-vous de moi, si je me permettais de parler d’une de ces langues slaves où vous êtes passé maître, après avoir jeté un rapide coup d’œil sur un manuel quelconque? Faut-il donc croire que les philologues perdent, en présence d’une langue „artificielle“, toute la conscience scientifique qu’ils apportent à l’étude du moindre dialecte cafre ou polynésien, ou de l’argot des faubouriens et des „Apaches“? M. le Prof. Brugmann distingue entre les spécialistes, seuls compétents, et les „dilettantes“; mais il apparaît qu’en cette circonstance vous et lui appartenez aux dilettantes.

Veuillez agréer, etc. 4

Communiqué à titre de document à M Schuchardt, avec les respectueux compliments de
Louis Couturat

P. S. Je vous remercie de votre dernière lettre; je serais heureux de recevoir votre article de l‘ Allg. Zeitung.5 – La lettre ci-dessus relève seulement quelques-uns des erreurs matérielles commises par M. Leskien au sujet de l’Esperanto. Pourquoi parler d’une langue qu’on ne connaît pas. Il est si facile de se taire!


1 August Leskien (1840-1916), deutscher Indogermanist und Slawist in Leipzig. Vgl. HSA 06419-06438, seine Briefe an Schuchardt, bes. 18-06436 (30.5.1907), 19-06437 (3.4.1908), die, was die Plansprachen-Frage angeht, recht versöhnlich klingen.

2 August Leskien, „Zur Kritik des Esperanto“ (Teil II von Karl Brugmann / August Leskien, Zur Kritik der künstlichen Weltsprachen, Straßburg: Trübner, 1907, 31-38) . Leskien fasst seine Kritik wie folgt zusammen (S. 37): „[D]as Esperanto zeigt, daß sein Erfinder, ohne jede lautphysiologische Beobachtung und ohne Erfahrung aus der wirklichen Sprachenwelt, sich die prinzipiellen Vorfragen, die vor der Aufstellung einer Weltsprache zu erledigen wären, gar nicht aufgeworfen hat. Er hat, gebunden an die Vorstellungen, die er aus der Schulgrammatik mitgebracht hat, sein Elaborat auf dem Papier gemacht, ohne eine Ahnung, was in der Sprache – nach Maßgabe der vorhandenen, beobachteten menschlichen Sprachen – als schwer oder leicht, als nötig oder unnötig, als zweckmßig oder unzweckmäßig betrachtet werden kann. Sein Werk ist daher ein gänzlich mißlungener Versuch, das Problem einer Weltsprache zu lösen“ (37). – Beide Autoren bringen die kritische Sicht der meisten damaligen Sprachwissenschaftler gegenüber Plansprachen zum Ausdruck; man lese z. B. die Rezension ihrer Schrift von Richard M. Meyer (Anzeiger für indogermanische Sprach- und Altertumskunde. Beiblatt zu den indogermanischen Forschungen 22, 1907/08, 1-2) : „ Brugmann und Leskien fassen nun, wie vor ihnen Gustav Meyer, theoretische und praktische Bedenken übersichtlich und klar zusammen – Brugmann die gegen die sprachlichen ,Homunculi‘ überhaupt, Leskien gegen den dermaligen Favoriten ,Esperanto‘, der wohl trotz der Zurufe begeisterter Chemiker und Mathematiker wie ,Volapük‘ und Genossen vor dem Ziel zusammenbrechen wird. Die sklavische Abhängigkeit der Zamenhofschen Erfindung von den Nationalsprachen setzt sie dabei noch tief unter die geistreichen Dekokte früherer Sprachenerfinder, über die soeben L. Wiener (in der ,Internationalen Wochenschrift‘) eine lehrreiche Parade abhält“ (1).

3 Esperantaj prozaĵoj. Fabeloj, Noveloj kai Skizoj, Paris: Hachette, 31907 (Kolekto Esperanta aprobita de Do Zamenhof) . Der genannte Brief findet sich auf S. 239-246 (Übers. aus dem Russischen).

4 Bis hierher maschinenschriftlich; das Folgende per Hand.

5 Schuchardt, Zur Frage der künstlichen Gemeinsprache, Beilage zur Allgemeinen Zeitung (Augsburg, München) 107, 1907, 259-261

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