Le Philosophe nouvelliste: Article X.

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Article X.

Du Jeudi 21. au Samedi, 23. Juillet 1709.

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Du Caffé de White, 22. Juillet.

Allgemeine Erzählung

Je me promenois, l’autre jour, dans les Champs, sans y suivre aucune Route certaine. Insensiblement je me trouvai aux pieds d’une Haye vive qui bornoit le Jardin d’une Maison de Plaisance. J’entendis-là quelqu’un qui me crioit derriere la Haye, Monsieur ! Monsieur ! La curiosité me fit prêter l’oreille, & la même voix me dit d’un ton plus bas, avancez, avancez. M’étant approché, la Personne qui parloit im’appella par mon nom, & me pria de suivre par la main gauche ; en me disant que j’y rencontrerois une de mes anciennes Connoissances, dans un état à me faire pitié. Les Loix de la Chevalerie errante ne me permirent pas de negliger l’Avanture. Après avoir fait quelques Pas, j’arrivai à une Poterne qui s’ouvrit aussi-tôt. Une Servante, qui m’introduisit dans le Logis, me fit traverser plusieurs Chambres, & me conduisit enfin à une Galerie, au bout de laquelle je découvris une Dame qui me parut fort belle. Elle étoit parée comme pour aller au Bal ; mais je n’ai jamais vu de visage plus triste. On y lisoit une douleur qui approchoit du desespoir. Dès que je me fus approché, elle fondit en larmes, & me dit,

Dialog

Monsieur, ne reconnoissez vous pas l’infortunée Teraminte ? Je me la rappellai d’abord, & lui répondis, je vous avoue, Madame, que les Ajustemens si simples que je vous voyois dans la Maison de Mr. votre Pere, & que l’Air si riant que vous y aviez toujours, ressembloient si peu à ce que je vois à présent, qu’il ne m’auroit pas été facile de vous reconnoitre. Vos Habits étoient alors décens & modestes. Vos regards étoient sereins & charmans. Que vous êtes changée ! Vous paroissés d’une Tristesse affreuse, pendant que votre Parure est toute des plus gayes ! D’où vient Contraste, & comment comprendre ? « Helas ! Monsieur, me répondit-elle, que j’ai de plaisir de voir enfin un Homme de ma Connoissance, & de pouvoir faire confidence de mes malheurs à une Personne qui a quelques sentimens d’Humanité !

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Allgemeine Erzählung

Vous savez qu’à la mort de mon Pere, je fus abandonnée à moi-même. Je me trouvai tout d’un coup dans un grand Monde, où je n’avois qui que ce soit qui eût inspection sur ma conduite. A quelles tentations la jeunesse, & l’Innocence ne sont elles point exposées ? Je ne rencontrai, de tous côtez, que des Pieges. Vous connoissez nôtre Siecle. L’Honneur & la Vertu n’y sont plus que des Noms sans Idées : On ne les prononce que pour tromper les personnes qui sont encore assez novices pour les prendre dans leur signification primitive, & pour en respecter les Loix, & la Règle. Le plus vicieux des Mortels, l’infame Decius, qui n’a jamais songé, dans tout ce qu’il fait, qu’à contenter ses Passions, vint se mettre dans une Pension où j’étois, & dans laquelle on prenoit des gens des deux Sexes. Il m’avoit souvent vuë & entretenuë auparavant. Les occasions lui en furent alors plus fréquentes, & plus aisées. Il en vint plus facilement à bout du dessein criminel qu’il meditoit contre moi. Ma personne enflamma de plus en plus ses desirs, & l’état de ma fortune, qui étoit assez mediocre, flata son esperance. Je tins bon pourtant quelques mois. Je ne fus tentée ni par les avantages qu’il faisoit luire à mes yeux, ni par la crainte que j’avois quelquefois de tomber dans l’Indigence. Mais quoique son intention me déplût, sa Galanterie ne me déplaisoit pas, & j’allois toujours m’y offrir. Que les Femmes sont folles ! Quelque grossiere que soit la flatterie, & quelque mauvaise opinion que nous ayons du Flatteur, les Douceurs nous en sont toujours agréables, & nous aidons nous mêmes à nous tromper. Seduite ainsi par mon propre Cœur, je me prêtai à tous les Tête à Tête que Decius me demandoit. Enfin il réussit à me perdre, & me mit dans cette Maison où je ne suis que comme sa Prisonniere. Depuis le moment fatal que j’eus renoncé à mon Innocence, mon adorateur est devenu mon Tyran. Il ne me regarde plus que comme une Esclave reservée à ses plaisirs sensuels. Il veut que je sois parée, non parce qu’il me considere, ou qu’il m’aime, mais parce que ces Ornemens relevent ma Beauté naturelle, & raniment sa Passion languissante. Je ne sai à qui recourir dans mon malheur. On ne peut néanmoins couler plus tristement ses jours que je le fais en ce lieu. Dans la contrainte, & dans la solitude des Nonnes, j’y vis dans tout le crime, & avec tous les remords des Femmes Publiques. Au milieu de mes débauches, je me sens une frayeur religieuse, qui me souleve contre ce Ministre de l’Enfer, & lui-même il me reproche, ce qu’il fait pour moi, comme si ce qu’il fait en ma faveur, étoit quelque chose au prix de la jeunesse, de la Vertu, de l’Honneur, & de la Paix de l’Ame que je lui ai sacrifiées. Pardon, Monsieur, je m’apperçois que ce que je vous dis vous attriste. La seule grace que je vous demande, est de peindre si naturellement la chose, lors que vous en informerez le Public, que Decius s’y reconnoisse, & que voyant l’intrigue découverte, il m’affranchisse enfin de l’affreuse nécessité de me faire un devoir de mon crime. Heureuse si je pouvois ou ne plus penser, ou ne plus pécher ! Si vos Ecrits peuvent me rendre la liberté, je vous promets d’expier, par ma conduite à venir, toutes mes fautes passées, & de préférer toujours une Pauvreté sage & Vertueuse, à toute l’Abondance criminelle du Monde. »

Du Caffé de Guillaume, 21. Juillet.

Pour montrer à Mr. Powel, tout mon Ennemi qu’il est, que ma Haine n’est pas implacable, je veux bien publier une chose qui fait honneur à sa Profession. C’est que les Comédies de Marionettes 1sont permises dans nos Universités, & que nos Savans n’y dedaignent pas de s’exercer sur ce nouveau genre de Drames. Il y en a pourtant quelques-uns qui paroissent plus difficiles. On le verra dans la Lettre suivante, qui contient une partie des Objections que font ces derniers. Comme le sujet est trop relevé pour moi, je n’entreprendrai point de répondre à ces difficultés. M’en sentant incapable, je laisse modestement ce soin à Mr. Powel que je supplie de vouloir bien s’en charger. Voici la Lettre qui vient de l’un de mes Parens, qui est Bedeau à Oxford.

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Brief/Leserbrief

Mon cher Cousin, Si lors que vous étiez, en dernier lieu, à Oxford, la Famille des 2Beadlestaffs en eût été informée, elle n’auroit pas manqué d’aller, selon le dû de sa Charge, vous faire des Compliments, tant en son nom qu’en celui de l’Université. Mais vous fites ici si peu de séjour, que nous n’eûmes pas le loisir de vous rendre ce devoir, & que vous n’eûtes pas, non plus, celui de prendre part à un spectacle très spirituel, qui y divertit à présent tout le Monde. Le jeu des Marionettes nous tient à cette heure, lieu 3d’Acte. Nos Dames à là vérité, n’y ont plus le plaisir d’y entendre leurs Frères ou leurs Enfans, reciter des Vers, ou déclamer en Musique. Mais elles entendent des Machines, qui, à l’aide d’un Souffleur, parlent comme eux, & disent des choses qui ne sont ni moins de leur cru, ni moins utiles à savoir. La Licence du 4Terrӕ Filius est devenu plus supportable par la substitution qu’on lui a faite des bons mots de Polichinelle. Quoique ce dernier n’ai ni 5Bonnet à la Françoise, ni Longues Poches à son just’au corps, il peut passer pour un Homme du bel Air, & même de très bel Air. C’est même un Eveillé, puis qu’il ne paroit guere en compagnie, sans dire à quelqu’un des Injures, sans demander satisfaction, & sans appeler les gens en Duel. Quelquefois pourtant il s’émancipe si fort en présence 6des Dames, que l’on ne fait comment le bien définir.

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Allgemeine Erzählung

J’eus un soir la curiosité d’aller à ce spectacle ; j’étois assis près d’un Jeune Homme, qui avoit une Robe veloutée, des Bas rouges, & une longue Perruque ; ce qui répond, si je ne me trompe aux Talons rouges, & à la Canne pendue au Bouton. Ce jeune Homme ne se possédoit point de colere, quand on en fut à un Scene très galante, que Polichinelle vint troubler de ses Obscenitez ordinaires.
Vous nous obligeriez tous extrêmement si vous vouliez bien nous donner les Regles que ce Rodomont doit observer sur le Théatre, & par conséquent écrire un Traité sur cette espèce de Poëme Dramatique que nos 7Savans, favorisent si fort, & entendent si peu. Peut-être que sur les Observations suivantes, a scavoir 8que la Troupe comme au temps de Thespis, est portée en Charrette ; que tous les Roles sont déclamès par un seul Personnage, comme on le pratiquoit avant Ӕschyle ; & que Polichinelle fait toutes les actions d’un Homme qui auroit gagné le Bouc ; peut-être, dis-je, que sur ces Observations, vous pourriez remonter à l’Origine de ce spectacle, & nous en donner une Histoire Chronologique, aussi sure que tant d’autres que les Savans de nos jours nous ont données. Il faudroit aussi remarquer que les Transitions y sont des plus naturelles ; car on y passe tout à coup de la tristesse à la joye ; une Gigue y vient immédiatement après l’apparition d’un Spectre ; On danse sur la Corde aussi-tôt qu’un Amant desesperé s’est ôté la vie. Cela ne se voit guère que dans nos Tragi-Comédies. Mais je ne me souviens pas que c’est à vous que je parle. Il ne m’appartient point de vous donner des leçons, j’ai pourtant été bien aise de vous faire voir qu’on apprend quelque chose en marchant devant les Personnes Lettrées, & que bien que nous ne fassions que tenir la queue aux Arts, & aux Sciences, nous ne laissons pas, à l’exemple des autres Pages, d’entrer un peu dans les Secrets de nos Maitresses. Je suis tout à vous Benjamin Beadlestaff.

De mon Cabinet, 22. Juillet.

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Allgemeine Erzählung

Me voici heureusement de retour ; mais je n’ai jamais passé si mal mon temps que ce soir. J’y ai été cinq heures avec trois Bons Compagnons, & deux Bonnes-Gens. Les premiers ont entonné avec bruit tous les Airs qu’ils savoient, & les autres en rioient de bon cœur. Comme j’étois le seul qui ne se divertît point, le Sr. Belfroi m’a dit, En vérité Mr. Biquerstaff, vous autres Gens de Lettres, n’êtes bons à rien dans les Compagnies. Cela est vrai, a repris un de ses Camarades, vous êtes tout triste ce soir ; allons un peu de joye. Me voyant pressé de la sorte, j’ai crié de toutes mes forces un Vive le Roi, j’ai sauté par dessus la Table, & retombant de l’autre côté sur mes pieds, je me suis mis à rire à gorge déployée. He bien ! a dit-un de nos Bonnes-Gens, que dites vous à présent de Monsieur Biquerstaff, il n’y a qu’à le mettre en train, & je vous le donne pour l’Homme du Royaume qui est de la meilleure Compagnie. M’approchant alors de celui qui venoit de parler le dernier, je lui ai pris son Chapeau, qu’il avoit à la Tête, je l’ai posé gravement sur la mienne, & faisant ensuite le pot à deux Anses, comme pour me tenir les cotez, j’ai encore ri de toute ma force. A mon exemple tout le monde a jetté de terribles éclats ; ce qui a duré plus d’une demie heure, & n’auroit pas même fini si tôt, sans un de ces Messieurs les Bons Compagnons, qui est venu par derriere me donner un grand coup de poing sur le Dos. Cette affaire a mis tous le rieurs de son côté, & franchement le mal, que je sentois, ne me laissoit guere l’envie de rire. J’étois à demi en colère de cette mauvaise plaisanterie. Cependant je n’ai pas voulu troubler la joye publique, & pour reprendre un peu contenance, j’ai avalé un grand Verre, en poussant de nouveau un Vive le Roi, qui a fait resentir toute l’Auberge. Avouons, Messieurs, a dit alors quelqu’un de la Troupe, que Mr. Biquerstaff prend bien les choses. Il n’y a point de conversation à tout ceci. Que signifient les sauts, ou les jeux de main ? Beuvons plûtôt à la ronde. Il en a été cru, & nous n’avons fait autre chose depuis sept heures jusqu’à Onze que la Compagnie s’est retirée.
A présent que je suis chez moi, &, qu’à l’imitation du sage Pythagore, je repasse ma journée, je ne puis me rappeller que le coup de poing que j’ai reçu parmi ces Messieurs, & quelques efforts que je fasse pour chercher dans ma Mémoire ce que j’aurois appris de bon dans leur Societé, je n’y retrouve absolument que ce que j’y ai souffert. Cela même pourtant me fait revenir au grand Philosophe, que je viens de nommer. Il croyoit que le Ames humaines, en sortant de nos Corps, passent en des Créatures vivantes d’une autre espece que la Notre. Pour moi, je serois plutôt tenté de croire que ce sont les autres Animaux qui prennent des Formes Humaines. Ne le diroit-on pas, à voir ce grand nombre d’Etres, qui marchent, comme nous, sur deux Pieds, & qui n’ont guere que cela de commun avec nous ? C’est le cas de ces Esprits tout Corps avec lesquels j’ai passé la soirée. Tout leur fait n’est que mouvement & que force. O que leur bruyante bonne humeur m’a fait regretter l’aimable Compagnie où je me trouvai la semaine passée ! Florio en étoit.

Fremdportrait

C’est un Homme qui n’interrompt jamais les autres, & qui ne parle jamais lui même qu’on ne soit fâché qu’ils finisse. Il tire toujours du sujet même de la Conversation, toutes les belles choses qu’il dit, sans qu’il y laisse entrevoir le moindre dessein de briller. Chez lui ces belles choses coulent de source, &, vous ne diriez pas qu’il s’en appercoive. D’ailleurs il ne lui échappe jamais rien de desobligeant pour personne, ce qui doit moins venir de la connoissance qu’il a du monde, que de la bonté de son cœur. Aussi n’y a-t-il point de Commerce qui soit plus recherché que le sien. La Conversation d’un Homme de ce caractère est toujours agréable, parce que les agrémens s’en doivent bien plus à la bien-veuillance qu’à la circonspection.

Fremdportrait

Il y avoit, avec lui, un Vieillard, qui est le meilleur homme du monde, & de la plus charmante Compagnie ; La bonté qu’il a pour les jeunes gens, quand il s’en rencontre aux lieux où il est, lui en attirent le plus sincere respect, & déjà très-estimable pour les bonnes qualitez qu’il possede, il le devient encore davantage par le support qu’il temoigne pour les foiblesses d’autrui. On sent qu’il aime mieux donner des exemples, que de contraindre personne. Comme il ne fait point le jeune Homme devant la jeunesse, celle-ci ne contrefait point des airs de Vieillesse en sa présence, de sorte que là où il paroit, vous ne voyez point de ces personnages gênez qui sortent du serieux, ou de la gayeté de leur âge. Aussi ne se plait il qu’avec des gens qui suivent le bon sens, & la Nature, & qui par consequent ne se voyent que pour se communiquer utilement ce qu’ils savent, & non pour faire assaut perpetuel de savoir & d’esprit. C’est-là, je le repete ce qu’on doit appeler une charmante Compagnie. Le plaisir mutuel qu’on s’y procure en fait l’essence, & s’imaginer qu’un dessein de superiorité l’assaisonne, c’est une contradiction dans les termes.
Je pose donc pour constant que c’est le Naturel, &, non l’Aquis qui fait un Homme de bonne Compagnie. La science, le Bel-Esprit, la Politesse, & l’Education, ne tiennent que le second rang dans l’ordre des qualitez qui sont necessaires pour les agrémens de la Societé. Ces choses là même n’y contribuent qu’autant que la bonté du cœur les dirige, & qu’elles produisent certaine maniere apparente ou reelle d’être en égalité avec les personnes que nous frequentons. En toute Societé qui a la Conversation pour objet, les Hommes y entrent, entant qu’hommes, & non entant que distinguez les uns des autres par la Fortune. Si le Gentilhomme n’y porte avec lui que sa Noblesse, il seroit juste qu’il payat tout l’Ecot, puis qu’il y vient pour s’y faire rendre hommage, bien plus que pour y voir des Amis. Mais où est ce que je m’égare ? Je m’étois proposé d’examiner à fond cette espece d’Hommes qu’on appelle gens de bonne Compagnie, & le bruit de ceux avec qui j’ai été ce soir, m’a si fort étourdi que je ne sai plus ou j’en suis. Je finirai donc par un mot que j’en ai ouï dire au bon Homme Senecio, dont je viens de parler. S’expriment comme on faisoit dans sa jeunesse, qui étoit le temps des jeux de Mots, & de Pointes, il dit souvent, qu’il n’est jamais en plus mauvaise Compagnie que lors qu’il se trouve avec des bon Compagnons.

1La dispute entre Mrs. Blackhall & Hoadly, faisant beaucoup de bruit, au sujet de l’Obéissance passive, l’Université d’Oxford se declara pour le premier par une Approbation publique, & ne fit en cela que suivre les sentimens qu’elle fit paroitre par son fameux Decret de l’an 1683. Il y eut pourtant des gens, mois en petit nombre, qui se déclarerent pour Mr. Hoadly.

2C’est-à-dire, Bâtons de Bedeaux. Voyez Tom. I. Art. Xi. p. 188.

3On appelle Actes, dans les Universités, les Assemblées qui se font pour conferer les Degrez. Il se fait alors des Disputes, des Declamations &c.

4C’est-à-dire, Fils de la Terre. On donne ce nom à un jeune- Etudiant qui, dans les Actes Publics fait des Declamations arbitraires, qui sont souvent très Satyriques. On a imprimé quelquefois sous ce Titre des Pieces fort spirituelles & fort hardies. Il en parut sous le Regne de George I. deux petits Volumes qui n’étoient point à l’honneur de l’Université.

5Il insinuë que l’Université étoit portée pour le Pretendant, que la France soutenoit, & pour lequel aussi les Whigs prétendoient qu’agissoit sous main un Seigneur, très zèlé Anglicain, qui conserva toujours la mode des longues Poches à son habit.

6On remarquoit alors en Angleterre, comme une chose bien singuliere, que les Femmes, dont si peu veulent obéïr à leurs Maris, se declaroient presque toutes pour l’obéïssance passive, comme duë au Prince.

7Quoi que le gros du Clergé Anglicain se soit toujours declaré pour l’Obéïssance passive, il ne semble pas prétendre que ce devoir le regarde, puis qu’il est rarement le premier ou à souffrir, ou à ne se point mettre sur la defensive ; dès que l’on touche à l’Eglise. Jaques II. en fit une triste expérience. Voyez Bibl. Angl. Tom. Vi. p. 499

8Les gens de Lettres entendront bien ceci sans mon secours. Mais en faveur des autres, il faut leur apprendre, que la premiere représentation dramatique ne fut d’abord qu’un Divertissement de Village, que les Pieces se jouoient sur une Charrette ; que le recompense de l’Acteur étoit un Bouc qu’on immoloit à Bacchus, que Thespis qui donna la premiere forme á ce divertissement rustique vivoit du temps de Solon, & qu’Eschyle introduisoit deux Acteurs, au lieu d’un seul qu’il y avoit auparavant. Il en resulte que comme la liberté du Théatre en a précedé la contrainte, aussi le gouvernement Monarchique n’est pas le premier qu’il y ait eu dans le monde, & que de tout temps même il y a eu des Peuples Libres, & des Gouvernemens Republicains.