Le Spectateur françois pendant le gouvernement révolutionnaire: IVe Discours.
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Livello 1
IVe Discours.
Sur la chûte du Clergé.Livello 2
Esempio
Il falloit user et ne pas abuser :
telle fut la réponse que je fis il y a quelques années à un
prêtre effrayé des progrès de l’incrédulité : en voyant
l’impuissance de ses efforts contre le torrent
de l’opinion publique, il regrettoit que les ministres de
son culte n’eussent pas plutôt composé avec la raison pour
conserver le domaine immense qu’ils avoient conquis sur la
foiblesse humaine.
Metatestualità
Malheureusement je ne suis qu’un
moraliste sans pouvoir, et mes idées de réformes religieuses
ne seront encore que des rêves !
Lettre d’un faux Patriote.
Livello 3
Lettera/Lettera al direttore
Je ne sais plus quel systême
adopter, ni sous quels étendards je dois me ranger. Je
vois la persécution pleuvoir sur tous les partis ;
j’ignore si dans ce moment il ne vaut pas autant être
signalé aristocrate qu’ardent républicain. La même
prison renferme le dénonciateur et le dénoncé. Tous les
jours le royaliste et le patriote sont cités au même
tribunal, sont condamnés par les mêmes voix, s’avancent
dans le même char vers le terme fatal. Autant j’ai
montré d’ardeur pour attirer sur moi les suffrages et
parvenir aux premiers emplois de la république, autant
j’emploie d’adresse pour me plonger dans un oubli total.
J’entends retenir à mes oreilles les mots
d’exagérateurs, d’ultrarévolutionnaires. Puisque le
titre de modéré étoit une injure, il falloit bien donner
dans l’exagération. L’homme a tant de peine à garder un
juste milieu, qu’on doit lui pardonner d’aller au-delà
de la révolution lorsqu’il ne veut pas demeurer en-déça.
Toute ma crainte dans ce moment est d’aller grossir le
nombre de ceux qui gémissent dans nos
prisons. Quel accueil ils me feroient ceux qui m’ont vu
animé d’un zèle si farouche ! Quelle joie ils
éprouveroient à l’aspect de ce républicain impitoyable
qui les frappoit de terreur ! Combien plus je mérite le
sort qu’ils éprouvent ! Indolens, inactifs, tout leur
crime est d’avoir attendu que la victoire se décidât
pour embrasser le parti du plus fort ; d’avoir montré de
l’horreur pour nos brigandages, de s’être refusés à être
nos complices. La plupart d’entr’eux, loin de nuire à la
république, offroient de la servir par des moyens
honnètes ; nous, nous la rendions odieuse : nous avions
sans cesse le mot de liberté sur les lèvres ; et nous
exercions la plus horrible tyrannie : nous persécutions
les riches ; et nous ne soulagions pas les indigens :
nous renversions les autels, nous dépouillions les
temples ; et nous ne substituions point de morale au
culte que nous nous efforcions de détruire : nous
enlevions au malheureux toutes ses consolations, toutes
ses espérances ; et nous prétendions au titre de
bienfaiteurs de l’humanité ! Notre zèle n’étoit pas
moins incendiaire que celui des inquisiteurs ; toute la différence qu’il y avoit entre eux et
nous, c’est qu’ils plantoient la foi avec le fer et la
flamme, et que nous, nous l’arrachions avec les mêmes
moyens. Pouvions-nous prévoir que l’incrédulité que nous
prêchions au nom de la loi seroit désavouée par nos
législateurs ; qu’ils élèveroient sur les débris de nos
églises un temple à l’Eternel ; qu’ils préserveroient
l’humanité de sa dégradation, en maintenant l’antique
idée de l’immortalité de l’ame ? Ne seroit-il pas bien
affligeant pour moi qu’on donnât aux prêtres le plaisir
de me voir les précéder à l’échafaud dont je les ai tant
de fois menacés ? Déjà le prélat de la capitale a senti
sa tête tomber à côté de celle de cet ardent zélateur de
l’athéisme qui l’avoit entraîné à une abjuration
solemnelle. Le prédicant et le prosélyte ont obtenu la
même couronne de martyre. Je suis si peu jaloux de leur
sort, qu’il n’y a pas de pénitence à laquelle je ne me
résigne, pas de cérémonies auxquelles je ne me soumette,
pas de rétractation que je ne sois prêt à faire pour me
garantir du malheur d’offrir un pareil exemple.
Qu’importe à la société ma profession de
foi. J’ai cru à l’avantage d’être riche et de dominer
les autres ; j’ai tout fait pour avoir de l’or et des
emplois ; est-ce ma faute si pour se les procurer il n’y
avoit pas d’autres moyens que d’outrager la Divinité et
d’affliger ceux qui lui rendoient hommage ? Dans toutes
autres circonstances, j’aurois fait le contraire pour
arriver à l’objet de mes vœux. Le beau moment que celui
où je pouvois, d’un seul mot, me défaire de mes ennemis,
me délivrer de mes créanciers, humilier les superbes qui
m’avoient dédaigné ; où je me voyois applaudi par ceux
qui favorisoient mes rapines pour avoir part à mes
largesses ! Hélas ! trop confiant dans la durée de mon
empire et de mes succès, j’ai tout dissipé ; il ne me
reste que la terreur. Il n’y a pas jusqu’à mes complices
qui ne m’accusent et rejettent sur moi seul tous leurs
forfaits.
Lettera/Lettera al direttore
Misérable ! tu as
trahi la cause que tu feignois d’embrasser, il est juste que
tu sois puni de ta lâche hypocrisie. Tu avois raison de ne
pas croire à l’immortalité de l’ame, la tienne
est du limon le plus impur ; ton [Gott#F::Dieu( est celui
des serpens, tu ne lui dois pas plus de culte que tous les
animaux qu’il n’a créés pour s’entre-détruire. Que la
crainte demeure attachée à ta criminelle existence ; elle
est le premier supplice des méchans. La fin que tu redoutes
est si douce qu’il est bon qu’elle demeure encore éloignée
de toi, et que le glaive ne tombe sur ta tête que
lorsqu’elle aura été troublée long-temps par les remords et
les terreurs.