Zitiervorschlag: Laurent Angliviel de la Beaumelle (Hrsg.): "Amusement XLIII.", in: La Spectatrice danoise, Vol.1\043 (1749), S. 372-378, ediert in: Ertler, Klaus-Dieter / Hobisch, Elisabeth (Hrsg.): Die "Spectators" im internationalen Kontext. Digitale Edition, Graz 2011- . hdl.handle.net/11471/513.20.4224 [aufgerufen am: ].


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Amusement XLIII.

Ebene 2► Ebene 3► Brief/Leserbrief► Madame la Spectatrice!

« Vous nous aviés promis une réfutation de l’Ecrit, intitulé : « Réponse au Plaidoié en faveur des Francs Maçons, par Philothée », Vous ne nous l’avés pourtant point donnée ; quelques personnes vous en blament : pour moi, je trouve, que vous avés bien fait de vous reposer sur le Public du soin d’apprécier la brochure de cet Anonime. On en allégue quelques preuves ; on assigne certaines circonstances ; on débite plusieurs particularités, qui semblent appuîer cette imputation ; mais plus j’éxamine le caractère & la conduite de M. * * * ; plus je la compare avec l’ouvrage en question ; & plus je trouve ce sentiment destitué de vraisemblance. Vous en allés jnger <sic>.

Ebene 4► 1° M. * * * est grand Logicien ; aulieu que Philothée est un pitoiable Sophiste. « Presqu’à chaque page de sa piéce, comme l’a remarqué un de ses Confréres, il manque les premiers éléments du sens commun. » Ce sont ses termes ; & ces termes ne sont point hyperboliques. Voiés la 5. Page, ou il conclut du silence que gardent les Franc Maçons, mème dans les tortures de l’Inquisition, que leurs secrèts sont de nature à les exposer à une mort infame & cruelle : la 6e ou il dit, que les profonds mistéres de la Societé ne sont propres qu’à désunir les familles ; La 7e où il avance, que le seul moien qu’ont les Franc-Maçons de se justifier de l’accusation du crime Antiphisique, c’est d’ouvrir leurs loges à tout le monde : Comme si toute accusation non prouvée n’étoit point par cela mème frivole & calomnieuse-la 14 où il assure sans preuves, que s’il y a quelque honnete homme dans la Confrérie, on ne lui confie pas le secret : la 15 & 16 où il entasse suppositions sur suppositions pour répondre à vos argumens, où une probabilité est appuiée sur une possibilité ; où une conjecture est donnée pour une preuve ; ou les Peut etre & les Si prennent la place de la certitude : La 19. [373] oú il cite un passage de la Bible, sans s’embrasser de son véritable sens, la 20. ou il prend la partie pour el tout ! &c.

2° M. * * * est, autant que je puis m’y connoitre, fort galant homme, Philothée l’est-il ? Oui ; dira-t’on : mais malheureusement, ses déclamations perpetuelles contre un Corps, qu’il ne connoit pas, & qui, de son aveu, est impénétrable, ses invectives contre les Deïstes, ses sermons éternels sur les preuves de la Religion Chrétienne, le ton pédant, les phrases Théologiques qu’il emploie en traitant mal à propos ce chapitre mille fois rebattu, les sinistres interprétations, qu’il donne aux actions qui en sont le moins snsceptibles <sic>, les mauvais & faux jugemens qu’il forme sans cesse, répondent : non.

3° M. * * * est bon Chrétien. Il connoit & pratique, dit on, les devoirs de son etat, aulieu que, dans Philothée, on n’apperçoit pas l’ombre du Christianisme, si par Christianisme, vous entendés la charité, qui en constituë l’essence. Un bon Chrétien débutera-t’il par les plus solemnelles protestations de candeur & de sincérité ; & continûra-t’il par les plus hardis mensonges ? Dira-t’il d’abord, qu’il n’a garde de soupçonner les Francs-Maçons de Sodomie, & quelques lignes plus bas, que cette accusation est & grave & vraisemblable ? S’obstinera-t’il à calomnier un Ordre entier, un Ordre, dont quelques membres lui sont particuliérement chers, à ce qu’il dit, un Ordre dont il ne connoit que la moindre partie, puisqu’il ne connoit que les Francs-Maçons Danois ? Dissimulera-t’il avec soin tout ce qui sera contraire a ses préjugés, tout ce qui sera favorable aux Loges, tout ce qui tendra à la décharge des Accusés ? Si Philothée étoit bon Chrétien, auroit il passé sous silence tout ce que vous avés dit en faveur des Francs-Maçons dans la derniére Feüille que Vous avés donné, Madame, sur ce sujet ? Auroit-il artificieusement negligé toutes les réponses que vous avés déjà faites à ses raisonnemens : car je le défie de montrer dans son Libelle une [374] seule objection, qui ne vous ait été proposée, & à laquelle vous n’aiés déjà répondu ? Un homme qui auroit agi de bonne foi, c’est à dire Chrétiennement, auroit-il mis â l’écart ce qu’il y avoit de plus fort dans celles de vos Feüilles qu’il réfutoit ? Auroit-il commencé par assurer, qu’il n’avoit que des doutes, des scrupules à proposer centre <sic> Votre Plaidoier, & fini par eriger ces doutes, ces scrupules en preuves invincibles ? Ce procédé, je vous prie, est-il Chrétien ?

4° M. * * * est Tolérant. Et que Philothée, le saint, l’ardent, le dêvot, le zélé Philothée l’est peu ! Il a, si le terme peut m’ètre souffert, toute l’encolure d’un Persécuteur. Comme les Intolérans, il se pare d’un grand zèle, d’un grand amour pour la vérité & pour la Patrie : Comme eux, il sollicite la perte, le bannissement des Francs-Maçons : Comme eux, il emploïe l’artifice, pour intéresser les Princes dans sa querelle ; Comme eux, il veut s’attacher les Ecclesiastiques, sachant bien que ces Messieurs, fort-enclins à la Persécution, ne demandent que quelque prétexte pour donner carrière à leur charité brulante, à leur zèle homicide. Relisés la 24. 25. 26. & 27. Pages : Vous y trouverés dans la bouche d’un Prince le langage de l’intolérance la plus hardie.

5° M. * * * est extremement modeste ; l’Auteur du Libelle est extrèmement orgueilleux ; Il faut, en vérité, bien présumer de ses lumiéres, pour oser parler avec tant confiance sur un sujèt aussi obscur, que l’est la Franche-Maçonnerie ? Que dirai-je de la magnifique louange qu’il se donne, en se qualifiant du Titre de Philothée ? C’est, en un seul mot, rassembles <sic> toutes les vertus. M. * * * est trop humble pour avoir pris un nom si fastueux. C’est bien peu le connoitre, que de le croire capable d’une pareille vanité. ◀Ebene 4

Vous voiés, Madame, que Philothée & M. * * * sont deux personnes différentes. Quelles suppositions ne faudroit-il pas [375] faire, pour croire, que c’est le mème Etre ? Il faudroit supposer, que, par un Phénemène <sic> dont on ne sauroit rendre raison, le bon sens s’est, dans le mème individu, changé tout-à-coup en folie, l’humilité en orgüeil, la probité en calomnie, la charité en intolérance. Il faudrois <sic> supposer, que cet homme dont nous admirons la candeur Suisse, fait d’aussi fortes protestations de sincérité qu’un Jesuite, & n’est pas plus exact à les tenir, qu’il est capable d’avancer par piété des faits évidemment faux, de ne prendre conseil que de ses préjugés, de se contredire grassiérement, de s’abandonner au torrent des Consequences odieuses ; & encor, quelles conséquences ! des consequences tirées de pures pétitions de principe. En un mot, il faudroit supposer, que M. * * * n’est ni bon Philosophe, ni bon Chrétien, ni bon Protestant : Or est-il, qu’il posséde ces trois qualités au suprème degré & surtout la première ; donc Philothée & Lui, sont deux personnes distinctes. Je le prouve par un autre argument dans les formes. Deux contraires ne sauroient subsister dans le mème sujèt ; or est-il, que le caractere de Philothée & celui de M. * * * sont contraires, donc ils ne sauroient subsister dans le mème sujèt. La Majeure, on ne me la niera pas. La Mineure, je l’ai prouvée ci dessus. Ergo, la conséquence est juste, ergo, quoique M. * * * ne se défende que fort foiblement d’étre Philothée, cependant il ne l’est pas. Je pourrois ergoter davantage ; mais il y auroit de la Pédanterie. Je vous prie d’insérer cette Lettre dans vos Feüilles, & de ne répondre à Philothée, qu’après qu’il aura lui mème réfuté pié à pié vos trois Amusemens sur les Francs-Maçons ; la condition est assés douce. Vous pourriés éxiger de lui la preuve de tous les faits qu’il avance ; mais, en vérité, ce seroit trop demander d’un homme, je le repéte, assés vain pour se qualifier ami de Dieu, assés Intolérant pour condamner un corps nombreux sur des Peut ètre, assés téméraire pour faire imprimer les invectives les [376] plus outrées, d’assés mauvaïse-foi pour ne répondre qu’à une partie de ce qu’il réfutoit. Du reste, nous autres Francs-Maçons, nous ne daignerons pas nous justifier contre ce Libelle : Nous nous souviendrons toujours, que nous sommes Francs-Maçons. c.à.d. obligés par les constitutions de l’Ordre à mépriser en silence les insultes des Profanes. Je suis &c.

K. D. R. N. ◀Brief/Leserbrief ◀Ebene 3

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Vers

à Mlle De B. - - -
En lui envoiant des Gands de Maçon.

Ces Gands, ma divine Maitresse !

Sont un gage de nos amours :
Ce présent vous dit sans détours,
Que, certaine de ma tendresse,
Iris, vous me devés toujours
Ces tendres sentimens, cette délicatesse,
Qui si lontems de mes jours
Ont fait des jours d’allegresse.
De ces heureux momens, Dieux ! ramenés le cours.

Enfin, l’amour vous rend Maçonne :

Sentés-vous tout votre bonheur ?
Le plus puissant Roi, sur son throne,
Malgré l’éclat qui l’environne,
Malgré sa pompe & sa grandeur,
S’il doit tout son mérite à sa seule Couronne,
Vaut à peine la moindre Soeur.

[377] Les Maçons se piquent d’ètre Hommes :

Fidelles aux devoirs renfermés dans ce nom,
Dociles à la voix de la saine Raison,
Ils veulent ramener, dans le siécle où nous sommes,
La probité, les moeurs & la discrétion,
La fraternité, l’union,
Qui souvent ne sont plus, mème dans le Maçon,
Qué chimères & que fantômes.

Hélas ! à la contagion

On oppose envain le mérite ;
Le sot Public est prévenu ;
Des Humains la paisible élite
En veut, dit-il, à la Vertu.
Sur ce raisonnement cornu
La Maçonnerie est proscrite.
Le Secret en seroit connu,
Si ce Secret n’étoit un crime ;
Le Séxe seroit bien-venu
Si tout étoit en Loge & sage & légitime :

Ainsi, des soupçons la victime,

L’Ordre est souvent persécuté.
On diroit, que l’Homme s’envie
Son plaisir, sa félicité ;
Car, la Franche-Maçonnerie
Est l’Ile de la volupté ;
Non d’une volupté grossiére,
Qui fait son idole des sens ;
Et dont les plaisirs fatiguans,
Sortis du sein de la Matière,
S’envolent sur l’aîle du tems ;
[378] Mais de cette volupté pure,
Qui naît du gout de la vertu ;
Et perfectionnant le lois de la Nature
Abbat l’homme orgueilleux, releve l’abbattu ;
De cette volupté sévère, Qui met un frein à nos desirs,
Et ne nous permet les Plaisirs,
Qu’autant que la Raison austère
Veut, qu’aux travaux succedent les loisirs.

Si Votre Séxe, Jris ! est banni de la Loge,

Hélas ! en devenons nous moins
Les esclaves, malgrés nos soins ?
Notre fuite fait son éloge.
C’est reconnoitre le pouvoir,
Qu’auront toujours sur nous ses charmes ;
C’est dire, en lui rendant les armes ;
Que, pour faire notre devoir,
Il va nous en couter de larmes !
Beau séxe ! sois moins dangereux
Sois si tu le peux, moins aimable,
De nos signes mistérieux
Bientot le sens impénétrable
Pour toi deviendra lumineux.
Sans toi, l’on ne peut ètre heureux ;
Avec toi. sexe redoutable !
On ne peut ètre vertueux.

« Pas le moindre mot de tendresse,

Dirés-vous, parmi tant de vers ?
Si l’on n’a le coeur de travers,
Perd-on de vuë sa Maitresse ? »
Pardon ! charmante Iris ! Pardon !
Tout amour est une foiblesse,
Etre foible, est-ce ètre Maçon ? ◀Ebene 3 ◀Ebene 2 ◀Ebene 1