Le Spectateur ou le Socrate moderne: Préface

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Nivel 1

Préface du traducteur

Nivel 2

Après ce que j’ai dit à la tête du premier Volume de ces discours, où l’on doit avoir toujours égard, du moins en général, il ne me reste pas grand’ chose à dire sur celui-ci. J’avertirai seulement le Public que ceux qui composent ce nouveau Tome ont paru en Anglois depuis le 12. ou 23. Juin jusqu’au 27. Octobre ou 7. Novembre 1711 ; Ce qu’il est bon d’avoir présent à l’esprit, pour mieux entendre certaines allusions qui s’y trouvent, soit à l’état des affaires publiques, ou à quelques Personnes distinguées dans la Grande Bretagne. Du reste le premier a été si-bien reçu du Public, que le second ne sauroit manquer d’un acueil favorable, puis sur tout que les discours en sont plus intéressans & d’un goût plus universel. D’un autre côté, il m’étoit facile de savoir les Noms des Auteurs qui les ont composez ; & j’ai déjà insinué dans la Préface du I. Tome, que les deux principaux ne me sont pas inconnus : Mais puisqu’ils ont voulu se cacher sous l’envelope de certaines Lettres Capitales, je ne croi pas qu’il soit de la bienseance de les en tirer, sans leur permission. Si c’est par une fausse modestie qu’ils se déguisent de cette maniere, le silence des autres sur leurs véritables Noms doit les en punir ; mais s’ils ont eu des motifs légitimes pour en user de la sorte, comme je n’en doute pas, c’est violer une espèce d’Asyle sacré que de les exposer aux yeux du Public. D’ailleurs il n’y en a guère que deux qui ayent fait quelque bruit dans la République des Lettres, & il seroit presque inutile de nommer les autres dans les Païs étrangers. Quoi qu’il en soit, il faut bien prendre garde à ne pas juger de ce qu’ils sont par le Caractère qu’ils se donnent, puisqu’ils s’attribuent tous le même. C’est ainsi que l’Auteur du xxx. discours & de divers autres dans ce Volume, où il se désigne à la fin de chacun par un T, parle comme s’il avoit écrit tous ceux qui précedent, depuis le xiv. jusques au xxix. inclusivement, quoique la plûpart soient marquez à la fin d’une L. ou d’un C. Mais quand on ne sauroit pas que ces deux Lettres Capitales en désignent un autre, la différence du Stile suffiroit pour les distinguer. Avec tout cela, si l’Historien futur, dont il est parlé dans le x. discours page 57, vouloit s’en tenir à ce que ces Auteurs publient d’eux-mêmes, il risqueroit de tomber dans la même bévue que j’ai commise, lorsque, sur un pareil fondement, j’ai conjecturé, dans la Préface du i. Volume page v, que les Discours liv & lxi, marquez d’un x, étoient de l’Auteur qui le désigne par une R. Du moins Messieurs les Journalistes de la Haye, dans les Mois de May & de Juin 1714, page 5, ont averti le Public que ces deux Discours sont de Mr. Budgel. Je les remercie de la découverte, & je leur promets de ne faire plus à l’avenir de pareilles Conjectures, où il est si facile de se tromper, & qui n’aboutissent à rien. Du reste fort éloigné de prétendre que ma Traduction ait conservé toutes les graces de l’Original, sur-tout de celui de Clio, je souhaite que les Connoisseurs, qui entendent les deux Langues, n’en jugent qu’après en avoir comparé avec soin quelques endroits, en particulier dans les discours, signez d’un T. Pour ce qui regarde la Critique de certains Lecteurs, qui se félicitent d’avoir trouvé une faute d’Impression ou d’Ortographe, une legere inadvertence, ou quelque inexactitude, ils peuvent jouir en paix de leur petit triomphe, je ne chercherai point à leur ravir cette gloire, & je les exhorterai seulement à nous donner eux-mêmes quelque chose de mieux tourné. C’est là tout ce que je leur demande ; & au Public, d’excuser les autres fautes de cette nature qui peuvent m’être échapées dans une tache aussi pénible que celle de la Traduction.