Citazione bibliografica: Armand de Boisbeleau de La Chapelle (Ed.): "Epitre dedicatoire du Traducteur", in: Le Philosophe nouvelliste, Vol.1\000 (1735), edito in: Ertler, Klaus-Dieter / Fischer-Pernkopf, Michaela (Ed.): Gli "Spectators" nel contesto internazionale. Edizione digitale, Graz 2011- . hdl.handle.net/11471/513.20.2267 [consultato il: ].


Livello 1►

Livello 2► Epitre dedicatoire du Traducteur,

à Mr. De F. **

Lettera/Lettera al direttore► Monsieur,

En qualité d’Interprête du Sr. Bickerstaff, je souhaiterois d’ê-[II]tre aussi bien entré par tout dans son esprit, que je le fais en vous dédiant mon Travail. Il crut ne pouvoir choisir de Patron plus convenable au sien, qu’en jettant les yeux sur un de ses Amis, parfaitement galant homme, que le discernement & la probité rendoient excellent Juge en cette sorte d’Ouvrages. Agissant dans les mêmes vues, je me flatte d’avoir aussi bien rencontré que lui.

Le plaisir que vous avez toujours pris, Monsieur, à la lecture de l’Original, devroit me faire appréhender de vous en offrir la Traduction. Cette derniere a de grands desavantages. On ne [III] prend plus le même interêt à la plûpart des choses. On a perdu certaines idées qui faisoient découvrir de la finesse où l’on n’en voit presque plus. On ne sauroit douter que toutes les Langues n’ayent des beautés qui leur sont particuliéres, & dans cette grande diversité de tours & de stiles, tant en Prose qu’en Vers, quelle apparence qu’un Traducteur puisse se prêter & se plier à tout également ? Oserai-je pourtant vous l’avancer, Monsieur ? S’il n’y avoit à dire que cela dans mon travail, je ne redouterois pas tant ni le jugement du Public ni le vôtre. Mais comment excuser quelques libertés que j’ai prises, & que des Lecteurs sévéres ne [IV] manqueront pas de traiter d’Attentat ? Des espèces de Paraphrases en quelques endroits, des Rétranchemens en d’autres ; ici des Transpositions arbitraires & là des Transitions ajoutées. Me pardonnera-t-on cette audace ?

S’il me falloit plaider ma Cause, je pourrois représenter que les Ouvrages purement d’esprit ne demandent, ni ne permettent pas même une Traduction si gênée que le doit être celle d’une Histoire, par exemple, ou d’un Systême de Philosophie ; Que nos François exigent tant de carté dans le discours, qu’il faut bien se donner des licences, pour leur rendre intelligibles des Etrangers qui quelquefois ne parlent qu’à [V] demi-mot, ou qui quelquefois aussi se chargent de Synonymes, de Parentheses, & de Périodes d’une grande longueur ; & qu’enfin, si je suis coupable, c’est peut-être pour avoir trop déféré, en ceci, à l’exemple de quelques-uns de nos plus grands Maîtres, que j’ai, sans doute, mal imités. Je ne sai si ces raisons seroient goûtées ; mais je sai bien que personne ne peut être plus disposé, que je le suis, à recevoir des avis, & à en profiter. C’est principalement pour cela, Monsieur, que je m’adresse à vous ; quoique d’ailleurs je sois charmé d’avoir une occasion de vous témoigner publiquement l’estime sincère que je fais de votre Mérite, & de vo-[VI]tre Amitié. Je suis avec le plus parfait attachement.

Monsieur,

Votre très-humble & très obéissant Serviteur

A.D.L.C. ◀Lettera/Lettera al direttore ◀Livello 2 ◀Livello 1