Sugestão de citação: Jean-François de Bastide (Ed.): "IX. Discours", em: Le Nouveau Spectateur (Bastide), Vol.3\009 (1758), S. 210-216, etidado em: Ertler, Klaus-Dieter / Fischer-Pernkopf, Michaela (Ed.): Os "Spectators" no contexto internacional. Edição Digital, Graz 2011- . hdl.handle.net/11471/513.20.2069 [consultado em: ].


Nível 1►

Discours IX.

Nível 2► Metatextualidade► J’ai reçu depuis quelques jours plusieurs lettres, plus ou moins intéressantes, & qui demanderoient d’être accompagnées de réflexions. Je vais commencer par les donner telles que je les ai reçues ; & suivant l’impression qu’elles feront sur les esprits, j’aurai l’attention d’y revenir ; & de leur faire l’honneur que le public aura jugé qu’elles méritent. ◀Metatextualidade

Nível 3► Carta/Carta ao editor► Monsieur,

Mon pere est un radoteur, ma mere une sotte, mon frere un fat, ma sœur une coquette, & je me deplais avec tous ces gens-là. Je leur ai [211] dit que je voulois les quitter, & mon dessein est en effet de me transplanter dans une autre famille, par un mariage. Mais un homme d’âge & d’esprit, m’a assuré qu’il me seroit impossible de trouver dans tout Paris une famille où il n’y eût pas un de ces quatre personnages. J’ai en effet cherché inutilement depuis six mois, & je m’adresse à vous, Monsieur, pour pouvoir le trouver. On dit que vous allez partout ; personne ne peut donc mieux que vous, me fournir ou m’indiquer ce que je cherche. Mes sots parens sont très-riches, & ne peuvent me souffrir ; ainsi pour se débarrasser de moi, ils me feront un établissement avantageux. Le plus ou le moins de fortune ne sera donc pas un obstacle dans la femme que vous pourrez me proposer ; je n’exige pas même qu’elle ait un grand mérite : pourvu qu’elle n’ait point de défauts, [212] ni ses parens non plus, je serai très-content.

J’ai l’honneur d’être, &c. ◀Carta/Carta ao editor ◀Nível 3

Nível 3► Carta/Carta ao editor► Monsieur,

J’ai beaucoup d’esprit, & encore plus d’audace ; j’étois hier au soir seul avec Madame de * * *, qui a précisement ces deux mêmes qualités. Nous nous parlâmes confidemment de nos aventures, la tête s’échauffa, & l’esprit entraina le cœur. Il n’y eut pas la moindre témérité de ma part, ni de la sienne la moindre résistance. Jamais affaire ne fut mieux conclue à l’amiable <sic>. Il y avoit un an que nous nous connoissions, & nous n’avoins jamais pensé l’un à l’autre ; j’allois la voir quelquefois, & elle ne songeoit pas même à regarder ma jambe & mes dents, qui sont très-dignes d’un regard ; je parcourois sa personne avec la même indifférence, & hier [213] même, un moment avant que notre imagination prit feu, nous étions l’un pour l’autre de vrais galçons. Ecrivez cela, Monsieur, afin que les femmes sçachent qu’elles ne doivent jurer de rien, ni entrer dans de certaines conversations avec un homme d’esprit qui a tout fait ici. Nous nous quittâmes, Madame de * * *, sans prendre jour pour nous recevoir, mais nous nous reverrons certainement, car je suis poli ; & j’aurai l’honneur de vous faire part de la nouvelle conversation que nous aurons eue ensemble, qui peut-être vaudra bien la premiere pour un moraliste.

J’ai l’honneur d’être, &c. ◀Carta/Carta ao editor ◀Nível 3

Nível 3► Carta/Carta ao editor► [214] Monsieur,

Je vous ai promis le détail de ma seconde conversation avec Madame de * * *, je me suis trop engagé ; il n’y a pas eu de conversation. J’allai hier au soir chez elle, son carrosse étoit à la porte, & cependant la porte me fut refusée, On me dit qu’elle étoit sortie, & je fus obligé de me retirer ; je viens de lui écrire pour me plaindre de ce procédé, voici sa réponse : M. le Chevalier ignor-t’il que Madame de * * * ne doit plus raisonnablement se trouver chez elle pour le recevoir ? J’ai senti mon étourderie, Monsieur, qu’apparemment vous sentirez vous-même, sie vous avez quelque connoissance des usages ; & c’est pour m’en punir que j’ai l’honneur de vous écrire.

Je suis, &c. ◀Carta/Carta ao editor ◀Nível 3

Nível 3► Carta/Carta ao editor► [215] Monsieur,

Je dinai il y a quelque temps dans une maison où je vis quelque chose de très-singulier. C’étoit un Samedi, & la table étoit servie en gras. Madame de * * *, arriva très-tard, & ne voulut jamais faire gras. La disette de provisions fit qu’elle fut obligée de se contenter de quelques œufs. J’admirai une austérité si exemplaire, dans une femme qui est d’ailleurs très-jeune, très-vive & très-jolie. Je demandai son nom, ne l’ayant jamais rencontrée dans le monde ; celui à qui je m’adressai me mit au fait dans l’instant, & j’appris que cette femme si respectable, au premier coup d’œil, étoit depuis dix ans sur la liste de trente petits-Maîtres. Elle acheva elle-même sa réputation, quand on eut dîné, par la contenance la plus indécent, & les propos [216] les plus libres. J’ai cru, Monsieur, devoir vous faire part de cette decouverte, car c’en est une, malgre les exemples d’audace ou de sottise que quleques femmes ont pu donner jusqu’à présent.

Je suis, &c. ◀Carta/Carta ao editor ◀Nível 3 ◀Nível 2 ◀Nível 1