Le Spectateur ou le Socrate moderne: L. Discours
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L. Discours
Zitat/Motto
Qui purè tranquillet,
honos, an dulce lucellum,
Au secretum iter, & fallentis semita vitae.
Au secretum iter, & fallentis semita vitae.
Hor. Lib. I. Epist. XVIII. 102.
Enfin ils vous feront connoitre si les honeurs, la vie privée, ou la douceur qu’on sent à faire profiter son argent, nous rendent parfaitement heureux.Metatextualität
La Vertu fait la
véritable Grandeur de l’Homme.
Metatextualität
La Vertu fait la
véritable Grandeur de l’Homme.
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Brief/Leserbrief
Mr. le Spectateur, Vous avez
observé dans 1quelcun de
vos Discours que la veritable Grandeur ne se trouve pas
au milieu de la Pompe & du bruit où la
plûpart des Hommes la cherchent. Vous y ajoutez que la
Vertu cachée dans l’obscurité paroit souvent plus
illustre aux yeux des Etres superieurs, que tout ce qui
passe pour grand & magnifique dans l’esprit du
monde. Lors que nous lisons l’Histoire de ceux qui ont
porté les glorieux titres de Rois, de Ministres d’Etat
ou de Genéraux, ils nous paroissent dépouillez de tous
ces ornemens exterieurs qui éblouissoient les yeux de
leurs Comtemporains, & nous les trouvons grands ou
petits, dignes ou indignes de notre estime, à proportion
de la noblesse de leurs Vertus ou de l’énormité de leurs
Vices. Les sages maximes, les beaux sentimens, & la
conduite desinteressée d’un Philosophe, au milieu d’une
fortune très-modique, l’élevent plus haut dans notre
estime que les plus grands Potentats de la terre, lors
que nous les considerons, lui & les autres, à
travers un éloignement de plusieurs siécles. Si les
Mémoires d’un Homme qui a vêcu dans l’obscurité, mais
aussi d’une maniere digne de sa Raison, & conforme
aux Regles de la Vertu, étoient exposez à nos yeux ;
nous ne trouverions rien dans ce Caractére
qui ne le pût mettre à niveau des Personnes les plus
élevées. L’Extrait suivant des Papiers manuscrits d’un
honête Gentilhomme de la Campagne donneront un nouveau
jour à ma Thése, peut-être que vos Lecteurs se formeront
une idée plus avantageuse de lui à cause de ces actions
faites en secret & sans témoin, que de ceux qui se
sont attiré l’admiration de la multitude.
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Mémoire.
Fremdportrait
A l’âge de 22. ans, je sentis une
violente passion pour la Femme de mon Cousin
Charles, & peut-être que j’aurois eu le
malheur de réussir, si à cause de cela-même je
n’avois entrepris d’aller voir les Païs etrangers.
Peu de tems après mon retour en Angleterre, j’eus
une entrevûe avec mon Oncle François . . . . . qui
vouloit me donner tout son Bien ; mais je le
refusai & j’obtins de lui qu’il ne
desheriteroit pas son Fils Edouard. N. B. II faut
se souvenir de ne dire jamais cette particularité
à mon Cousin Edouard de peur qu’il n’eût mauvaise
opinion de feu son Pere, quoi qu’il parle toujours
mal de moi à cette occasion. Afin de
prévenir un Procès scandaleux entre mon Neveu
Henri * * * & sa Mere, j’alouë à celle-ci,
sous main & de mon propre argent la somme
annuelle, qui causoit leur dispute. J’ai procuré
un Benefice à un jeune Homme, parce qu’il étoit
Néveu de mon honête Précepteur, qui est mort
depuis une vingtaine d’années. Donné dix Livres
sterlin a la pauvre Mlle * * * Veuve de mon Ami
H . . . . . N. B. II faut se souvenir de
retrancher un plat de ma table, jusqu’à ce que
j’aie recouvré cette Somme. N. B. Je ne dois pas
oublier non plus de reparer ma Maison & de
finir mes Jardins pour emploїer les pauvres
Paїsans à ce travail après la Recolte. Ordonné à
Jean de relâcher, de nuit les Brebis du bon-Homme
D . . . . . qui avoient été enfermées, pour avoir
été prises en défaut, & de n’en rien dire à
mes autres Valets. Obtenu de Mr l’Ecuїer M. T.
qu’il ne poursuivra pas en Justice le Fils du
Fermier qui avoit tiré une Perdrix, & qu’il
lui rendra son Fusil. Paїé l’Apoticaire, pour
avoir guéri une vieille Femme qui se croїoit
Sorciere. Remis à la discretion d’un
Mendiant mon chien favori qui l’avoit mordu. Amené
le Ministre de la Paroisse & un Juge à Paix
Whig à la même opinion, après les avoir engagez
tous deux à s’expliquer leurs idées. N.B. II faut
chasser Pierre de ma Maison, pour avoir tué une
Daine d’un coup de Pistolet pendant qu’elle
mangeoit des Glands sur sa main. Lorsque mon
voisin Jean, qui m’a fait souvent tort, viendra
demain pour me presenter sa Requête, je dois me
souvenir que je l’ai pardonné. Quitté mon Carrosse
& vendu mes Chevaux pour être en état de
secourir les Pauvres dans une disete de Grain.
Rabatu, cette même année, à mes Fermiers, un
cinquiéme de la Rente qu’ils me doivent. Lors que
je me promenois aujourd’ui (sic), il m’est venu
une pensée dans l’Esprit qui m’a rempli le cœur de
joie, & je me flate qu’elle aura une heureuse
influence sur moi le reste de mes jours. N. B. Il
faut ordonner à mon Fils, en particulier, de ne
m’ériger aucun Monument après ma Mort ; mais je
n’en dois rien dire dans mon Testament. »
1C’est le XL.