Le Spectateur ou le Socrate moderne: XLIX. Discours
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Nivel 1
XLIX. Discours
Cita/Lema
Illie postquam se
lumine vero
Implevit, stellasque vagas miratur, & astra
Fixa Polis, vidit quanta sub nocte jaceret
Nostra dies, risitque sui ludibria tronci.
Implevit, stellasque vagas miratur, & astra
Fixa Polis, vidit quanta sub nocte jaceret
Nostra dies, risitque sui ludibria tronci.
Lucan. Lib. IX. 11.
Après que l’Ame de ce Héros, remplit d’une lumiere céleste, eut admiré le cours des Etoiles & des Astres qui brillent à l’un & à l’autre Pole, elle s’aperçut que nos jours ici bas sont couverts de terribles nuages, & sentit bien le ridicule de tous les amusemens qu’elle y avoit eu.Metatextualidad
Lettre sur l’Orgueil
mal entendu des Hommes.
Metatextualidad
Lettre sur l’Orgueil
mal entendu des Hommes.
Nivel 2
Nivel 3
Carta/Carta al director
Mr. le Spectateur « Les Lieux
communs que les Orateurs mettent en usage contre
l’Orgueil de l’Homme, sont pris de la bassesse de son
origine, des imperfections de sa Nature, & de la
courte durée de ces biens, dont il se glorifie. Quoi
qu’il n’y ait rien en nous qui dût exciter notre Vanité,
avec tout cela un sentiment interieur de notre merite
peut quelquefois être louable. Le mal donc consiste en
ce que, d’un côté, nous sommes prêts à nous enorgueillir
de niaiseries, ou même de choses indignes, & que, de
l’autre, nous regardons comme deshonorable, ce qui fait
notre solide gloire. De là vient que ceux qui sont
avides de louanges prennent de fausses
mesures pour les obtenir. Si un Orgueuilleux se donnoit
la peine de consulter son propre cœur, il trouveroit
que, si les autres étoient aussi bien instruits de ses
foiblesses que lui-même, il n’auroit jamais l’impudence
de prétendre à l’estime du Public. L’Orgueuil naît donc
du manque de reflexion, & du peu de connoissance
qu’on a de soi-même. Plus on se connoit, & plus on a
d’humilité. L’un suit naturellement de l’autre, &
ils s’accompagnent toûjours. Le plus sûr moïen pour
juger de nous est d’examiner de près ce que nous
estimons ou que nous méprisons dans les autres. Un Homme
qui se vante des biens de la Fortune, d’un Habit
magnifique, ou d’un nouveau titre d’Honeur se rend
par-là ridicule. Ainsi nous ne devrions pas admirer en
nous-même ce qui nous engage à nous moquer des autres.
Il y a beaucoup moins de raison à nous enorgueuillir de
ce que nous mépriserons certainement quelque jour.
Malgrè tout cela, si nous voulons reflechir sur les
divers changemens que nous avons essuïé & ceux qui
nous attendent encore, nous trouverons que plus notre
sagesse & notre connoissance
augmentent, plus elles servent à nous découvrir nos
imperfections. A mesure que nous passons de l’Enfance à
la Jeunesse, nous regardons avec dédain les Jouets &
les Amusemens qui avoient fait jusques-là tout notre
plaisir. Lors que nous approchons de l’âge viril, on
nous estime vertueux à proportion de la honte & du
regret que nous avons pour les desordres & les
égaremens de la Jeunesse. La Vieillesse est pleine de
reflexions mortifiantes sur une vie mal emploïée à se
procurer des biens & des Honeurs incertains. A
suivre cette gradation de pensées, on peut conjecturer
avec assez de fondement, que, dans le Siécle à venir, la
Sagesse, l’Experience & les Maximes de la Vieillesse
seront regardées, par un Esprit separé de son Corps, à
peu près du même œuil, dont un Vieillard regarde
aujourd’hui les folies & les badinages des Enfans.
Les Pompes, les Honeurs, la Politique & les Ruses
des Hommes faits paroîtront alors aussi ridicules que
tous les Jeux & les Exercices qui occupent
aujourd’hui toute l’adresse, la force & l’ambition
des Créatures raisonnables depuis l’âge de quatre ans
jusqu’à neuf ou dix. Si l’idée d’une
élevation graduelle parmi les Etres, depuis le plus bas
jusques au plus haut, n’est pas chimerique, il est assez
probable qu’un Ange regarde un Homme à peu-près de la
même maniere qu’un Homme regarde une Créature qui
aproche le plus de celle qui est douée de Raison. Par la
même Regle s’il m’est permis de donner carriere à mon
Imagination sur cet Article, une Bête d’un ordre
superieur regarde avec une espece de mépris celle qui
lui est inferieure. Si elles étoient capables de
reflechir à juger des pensées de quelques-unes par leurs
actions, nous pourrions conjecturer qu’elles croient
être les Souveraines du Monde, & que toutes choses
ont été faites pour elles. Cette pensée dans les Bêtes
brutes ne seroit pas plus absurde que celle de certains
Hommes qui s’imaginent que toutes les Etoiles du
Firmament ont été créées pour plaire à leurs yeux &
divertir leur esprit. Mr. Dryden, dans sa Fable du Coq
& du Renard, fait, pour le Coq son Heros un petit
Discours qui ne quadre pas mal avec ce que je viens
d’avancer :
Je conclus sur le tout, que nous ne devons nous
estimer que pour ces choses que des Etres superieurs
croient dignes d’estime ; puisque c’est le seul moïen de
ne perdre jamais la bonne opinion que nous avons de
nous-mêmes. »
Nivel 4
Fábula
Faisant un caracol, il
dit à sa Compagne,
Voi, ma Chere, l’émail de toute la Campagne :
La Nature pour nous prodigue à pleines mains
L’Herbe, le Blé, les Fruits, la Rose & les Jasmins ;
Les Oiseaux sont pour nous entendre leur ramage ;
L’Homme aussi nous imite, &, pour paroitre sage,
Perché sur ses deux piez, il trote comme nous,
Peut se tenir debout, ou se mettre à genoux.
Voi, ma Chere, l’émail de toute la Campagne :
La Nature pour nous prodigue à pleines mains
L’Herbe, le Blé, les Fruits, la Rose & les Jasmins ;
Les Oiseaux sont pour nous entendre leur ramage ;
L’Homme aussi nous imite, &, pour paroitre sage,
Perché sur ses deux piez, il trote comme nous,
Peut se tenir debout, ou se mettre à genoux.