Virg. Ecl. III. 16.
C’est-à-dire, Que ne feront pas les Maîtres, puisque leurs Valets entreprennent de telles choses ?
Spectateur
« Je louë de tout mon cœur les efforts que vous emploïez, pour exposer aux yeux de tout le monde ce qui pourroit échaper à leur observation, & qui peut être d’une si grande utilité. Vous avez très bien réussi à plusieurs égards, & vous paroissez connoître à fonds les divers états de la Vie. Mais en qualité de Spectateur, il me semble que vous n’auriez pas dû négliger les Personnes du bas étage, non plus que celles du premier rang. Je m étonne sur tout que vous aïez omis cet Article, qui regarde la corruption universelle qu’on voit parmi nos Domestiques. Après avoir couru le Monde, & vu bien de Païs, il y a sept ans que j’ai fixé ma residence à Londres, ou à une Campagne qui n’en est qu’à vingt Milles : de sorte que j’ai contracté, par ce moien de grandes liaisons, avec nombre de Personnes distinguées, mais je n’en ai pas trouvé une seule qui eût de bons Domestiques. Tous les Etran-Angleterre : Ils n’ont aucune part une si bonne table, ni de si gros gages, ni tant de liberté. Il n’y a point d’endroit où ils travaillent moins, ni où, malgré tout cela, ils aïent si peu de respect, d’économie, ou de zele, ni où ils changent si souvent de Maître. De là viennent, en partie, les Vols & les Larcins, auxquels nous sommes exposez sur les grands chemins & dans nos Maisons même. J’avoue que ce qui me donne l’occasion de vous écrire là-dessus, est la négligence d’un Palefrenier qui m’a gâté la plus jolie Haquenée qu’il y eut au monde, pour ne l’avoir montée que l’espace de dix milles ; mais si je voulois dresser une Liste de tous les Chevaux, que des Valets imprudens ou yvrognes ont estropiez, de ma connoissance, je vous cautionne qu’il s’en formeroit un bon Regiment. Aïez donc la bonté, mon cher Mr. de nous donner un Discours sur les Domestiques en général, & de nous apprendre les moïens qu’il faudrait emploïer pour les corriger de leurs vices : Souvenez-vous sur tout des Palefreniers, & vous obligerez infiniment, &c. »
ami des Anglois.Philo-Britannicus.
L’obscurité où je vis & mon humeur taciturne, me permettent, si je le trouve à propos, de dîner, sans aucun scandale, à un Ordinaire, dans un petit Cabaret borgne ou chez le Traiteur le plus magnifique.
James. & conduit au Palais de Konsington.Hide-Parc, où ils se tiennent, pendant que les Dames & les Messieurs s y proménent en Carrosse. Chacun y est suivi de ses Laquais, pour relever l’éclat de sa magnificence, & ils sont bien païez de leur vanité, puisque tout ce qui sedit à leurs Tables, ou qui se fait dans leurs Maisons est communiqué ici au public. Il faut avouer d’ailleurs qu’il y a des Gens d’Esprit dans tous les Etats de la vie, & mêlé quelquefois avec cette Canaille occupée à se divertir, je leur ai entendu railler des Coquettes & de fausses Prudes, & tourner en ridicule l’insolence & l’Orgueil, avec autant de bon sens & Wite, ou dans les meilleures Loges de la Comédie. Il y a quelques années que nous eûmes ici une plaisante avanture à cet égard. Le Valet d’un Capitaine aux Gardes, accoutumé à des Rendez-vous amoureux la nuit, ne manquoit jamais d’y aller revêtu des Habits de son Maître, lorsqu’il ne craignoit pas son retour au Logis. Ce Drôle n’étoit pas mal tourné, & il y a bien des Femmes qui ne s’arrêtent qu’à l’exterieur d’un Homme ; outre qu’il n’en sçavoit guére moins que le Capitaine. Il pouvoit aussi grissonner des Billets doux, & soutenoit sî bien une Conversation sur les Lieux communs, qu’il avoit nombre de ce qu’on appelle de bonnes Fortunes. Mais il arriva un soir qu’en descendant les degrez d’un Cabaret, avec le plus bel Habit de son Maître sur le corps, & une Femme masquée & bien mise, qu’il conduisoit par la main, il trouva le Capitaine qui montoit en aussi bonne compagnie : Là-dessus il quitta sa Dame, & s’approcha de lui, d’un air assuré, pour lui dire, Monsieur, je sai que vous avez trop d’égard à vo-tre honneur pour me donner des coups de canne, avec ce digne Habit que je porte : Vous voïez d’ailleurs qu’il y a une Da,e intéressée ; ainsi je me flate que voua aurez la bonté de differer votre ressentiment jusqu’à ce que j’aie pû vous découvrir tout dans une autre occasion. Le Capitaine, choqué d’abord à la vûe de ce spectacle, fit une pause ; mais il reprit bientôt sa contenance ordinaire, & dit à l’oreille de son Valet, d’un ait assez familier, Coquin, ramene ici ta Dame, afin qu’elle demande grâce pour toi : Il ajouta tout d’une suite à haute voix, Pensez-y bien, Guillaume, autrement je ne vous pardonnerai de ma vie.
Quoi qu’il en soit, les insolences que les Valets commettent, presque toujours par la faute de leurs Maîtres, dans tous ces Rendez-vous publics, aussi-bien qu’à la Comédie, sont trop nombreuses,
R.