Zitiervorschlag: Anonym (Hrsg.): "Préface du Traducteur", in: Le Spectateur ou le Socrate moderne, Vol.1\000 (1716), S. NaN-XI, ediert in: Ertler, Klaus-Dieter (Hrsg.): Die "Spectators" im internationalen Kontext. Digitale Edition, Graz 2011- . hdl.handle.net/11471/513.20.1152 [aufgerufen am: ].


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Preface du Traducteur

Ebene 2► Metatextualität► Il n’y a peut-être jamais eu aucun Ouvrage, ni ancien, ni moderne, qui ait fait tant de bruit dans le Païs de sa naissance, ni dont on ait vendu tant d’Exemplàires, que celui dont j’ai entrepris la Traduction. Tous les Discours qui le composent ont paru d’abord un à un, sur des Feuilles volantes, en forme de Gazettes, & il s’en est debité jusques à vingt mille par jour. Ce n’est pas tout, il s’en est fait depuis deux Editions in douze, & une in octavo, & l’on ne doute pas qu’on ne soit bien tôt obligé d’en venir [IV] à une quatriéme. Le premier Discours de ce Volume est du I. Mars, & le dernier du XI. Juin 1711: de sorte que les LXX, dont il est composé, renferment l’espace de trois mois & dix jours. Cette remarque est d’autant plus nécessaire, que la plûpart des Lecteurs ne sauroient où raporter certains Evenemens, ausquels on y fait allusion, s’ils n’étoient instruits de cette circonstance.

Les deux principaux Auteurs, qui travaillent à cet Ouvrage, s’y désignent, à la fin de leurs Discours, l’un par une R, & l’autre par un C, ou une des lettres qui forment le Nom de CLIO. Il n’y a que le LIV. & le LXI, qui soient marquez d’un X; mais il y a grande apparence que cette lettre désigne l’Auteur R, puisque *celui du LXI. se caractèrise sous l’idée d’un Hom-[V]me taciturne, avec un petit visage, 1 tel que le premier s’est dépeint lui-même: Ainsi, dans la Table des Matieres, on ne trouvera ces Auteurs enrôlez que sous les Lettres C & R, & nous ne chercherons pas à leur ôter ce voile, dont ils jugent à propos de se couvrir.

Qu’il me soit permis, avec tout cela, de remarquer ici, à l’honeur de celui qui se cache sous une R, qu’il fait pratiquer lui-même ce qu’il veut enseigner aux autres, & profiter des avis qu’on lui donne, de quelque part qu’ils viennent. Voici en peu de mots de quoi il s’agit: Sous le regne du feu Roi Guillaume, il avoit publié une Comedie intitulée, Les Funerailles, ou Le Deuil à la mode, où Mr. Campley, un de ces Personnages, & l’Amant d’une jeune Demoiselle de qualité, nommée Harriot, disoit [VI] en parlant d’elle, 2 Oh, cette charmante Harriot! Que ne puis-je la tenir entre mes bras, & la voir succomber à la fin, après avoir fait quelque résistance! Une jeune Dame, qui en 1711. se trouva un soir à la représentation de cette Piece, fut si choquée de cet endroit, qu’elle en écrivit dès le lendemain une Lettre à Mr. Le Spectateur, pour se plaindre de la trop grande licence que se donnent les Poëtes Comiques, & le prier de leur faire là-dessus une vive Mercuriale. L’Auteur ne manqua pas de publier 3 le Billet de cette Dame, & d’aprouver son indignation. Il est vrai qu’il tâche d’abord d’extenuer un peu le foible des Poëtes à cet égard, mais il l’attribue par tout au manque de Genie; & l’on voit, avec plaisir, qu’après avoir [VII] soutenu une espèce de combat interieur, sa Vertu triomphe à la fin de son Amour propre. Ce n’est pas un petit éfort pour un Auteur, bel Esprit, & d’une grande reputation, de recevoir ainsi la Censure d’une jeune Dame, & de se condamner en public. Il a poussé plus loin, puisqu’il a corrigé cet Endroit dans la nouvelle Edition de cette même Pièce qui parut en 1712. On n’y trouve aujourd’hui que ces mots: 4 Oh, cette charmante Harriot! Que ne puis-je l’embrasser!

Après avoir donné cette idée de l’Auteur R, il est juste de dire un mot de celui qui paroît sous la lettre C, & à qui l’on attribue une bonne partie de cet Ouvrage. Il passe pour un des Ecrivains les plus polis, & un des meilleurs Poëtes qu’il y ait en Angleterre. Tous ceux qui le connoissent ou qui ont lû [VIII] quelques-unes de ces Pièces, avouent qu’il écrit avec beaucoup d’exactitude, qu’il possede à fond les Poëtes Latins, & qu’il fait faire une heureuse aplication de leurs plus beaux Endroits. C’est ce qui paroît sur tout dans notre Spectateur, où il y a divers Passages tirez des anciens Poëtes. Les Modernes, soit Anglois, François, ou Italiens, ne lui sont pas moins familiers, & l’on peut dire qu’il en connoît le fort & le foible.

La derniere Pièce qu’il a mise au jour, est une Tragedie sur la Mort de Caton, qu’on regarde comme un Chef d’oeuvre en son genre, & qu’on a traduite en François à Londres.

Comme cet Ouvrage est destiné à toute sorte de Personnes, & que les Dames y ont bonne part, j’ai traduit tous les Passages Latins qui s’y trouvent disperez, ou qui sont à la tête des Discours, en faveur [IX] de ceux qui n’entendent pas cette Langue morte. J’ai même cité les Endroits d’où ils sont tirez.

Pour ce qui regarde les Passages d’Horace, de Juvenal & de Perse, j’ai toujours suivi la belle Version que le Pere Tarteron en a donnée. A l’égard de Martial, je cite l’Edition que Mrs. Huguetan firent ici en 1701. sur la Copie de Paris à l’usage du Dauphin. J’ai d’ailleurs ajouté quelques petites Notes en divers endroits, où elles m’ont paru nécessaires pour les mieux entendre, & donné, en faveur du beau Sexe, l’explication de certains Mots tirez du Latin & du Grec. Peut-être même que j’aurois dû en inserer une à la page 309, ou 331, où il s’agit des rimes que les Anglois apellent doubles, pour avertir les Etrangers, que les meilleurs Poëtes de cette Nation méprisent les rimes que nous croïons les plus [X] exactes, & qu’ils n’en observent point du tout dans leurs Poëmes Heroïques.

Pour ce qui est du Titre général, il n’y a pas eu moïen de changer celui du Spectateur, comme on le verra facilement par la lecture de tout l’Ouvrage, quoique les François ne joiguent pas à ce mot la même idée que les Anglois, ou du moins nos Auteurs, semblent y avoir attachée ici. Afin donc de le déveloper en quelque maniere, je l’ai accompagné de celui du Socrate Moderne, qui répond assez juste au but que ces Messieurs se proposent, de bannir le Vice & l’Ignorance de leur Patrie, & à la méthode qu’ils y emploient.

Si mes Lecteurs découvrent quelque faute, je me flate qu’ils me la pardonneront aisément, & qu’ils auront égard à la peine que donne [XI] un Ouvrage de cette nature, lorsqu’on veut s’en acquitter avec soin. Du reste, je m’estimerai fort heureux, si ma Traduction est accompagnée, dans les Païs étrangers, d’aussi bons effets, que l’Original en a produit dans la Grande Bretagne, & que l’on peut attribuer qu’au merveilleux secret qu’ont les Auteurs de joindre par tout l’utile à l’agréable. Il n’y a rien du moins qui soit plus propre à me soutenir dans la continuation de ce rude travail, que l’esperance de ramener les Hommes de leurs égaremens, & de leur inspirer des principes d’Honeur & de Vertu. ◀Metatextualität ◀Ebene 2 ◀Ebene 1

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Aprobation

Ebene 2► J’ai lû, par ordre de Monseigneur le Chancelier, un Livre traduit de l’Anglois, intitulé: Le Spectateur, ou le Socrate moderne, où je n’ai rien vû qui me paroisse devoir en empêcher le debit. A Paris le 26 d’Avril 1716.

Signé, Bourgois du Chastenet. ◀Ebene 2

Privilege du Roy

Louis par la grace de Dieu, Roy de France & de Navarre: A nos amez & feaux Conseillers les Gens tenans nos Coers de Parlement, Maîtres des Requêtes ordinaires de notre Hôtel, Grand Conseil, Prevôt de Paris, Baillifs, Sénéchaux, leurs Lieutenans Civils, & autres nos Justiciers qu’il appartiendra, Salut. Notre bien amé Etienne Papillon, Libraire à Paris, Nous ayant fait remontrer qu’il souhaiteroit faire imprimer un Livre qui a pour titre, Le Spectateur, ou le Socrate moderne, où l’on voit un Portrait naïf des Mœurs de ce Siecle, traduit de l’Anglois, & donner au Public s’il Nous plaisoit lui accorder nos Lettres de Privilege sur ce nécessaires; Nous avons permis & permettons par ces Presentes audit Papillon, de faire imprimer ledit Livre en telle forme, marge, caractere, conjointement ou separément, & autant de fois que bon lui semblera, & de le vendre, faire vendre & débiter par tout notre Royaume pendant le temps de six années consecutives, à compter du jour de la date desdites Presentes: Faisons défenses à toutes sortes de personnes, de quelque qualité & condition qu’elles soient, d’en introduire d’impression étrangere dans aucun lieu de notre obéïssance; & à tous Libraires, Imprimeurs & autres, d’imprimer, faire imprimer, vendre, faire vendre, debiter, ni contrefaire ledit Livre ci-dessus specifié, en tout ni en partie, ni d’en faire aucuns Extraits sous quelque prétexte que ce soit d’augmentation, correction, changement de titre ou autrement, sans la permission expresse & par écrit dudit Exposant, ou de ceux qui auront droit de lui, à peine de confiscation des Exemplaires contrefaits, de deux mille livres d’amende contre chacun des contrevenans, dont un tiers à Nous, un tiers à l’Hôtel Dieu de Paris, l’autre tiers audit Exposant, & de tous dépens, dommages & interests; à la charge que ces Presentes seront enregistrées tout au long sur le Registre de la Communauté des Libraires & Imprimeurs de Paris, & ce dans trois mois de la date d’icelles; que l’impression dudit Livre sera faite dans notre Royaume, & non ailleurs, en bon papier, & en beaux caracteres, conformément: aux Reglemens de la Librairie; & qu’avant que de l’exposer en vente il en sera mis deux Exemplaires dans notre Bibliotheque publique, un dans celle de notre Château du Louvre, & un dans celle de notre très-cher & feal Chevalier Chancelier de France le Sieur Voysin, Commandeur de nos Ordres; le tout à peine de nullité des Presentes, du contenu desquelles vous mandons & enjoignons de faire jouir l’Exposant ou ses ayans cause, pleinement & paisiblement, sans souffrir qu’il leur soit fait aucun trouble ou empêchement. Voulons que la copie desdites Presentes, qui sera imprimée au commencement ou à la fin dudit Livre, soit tenue pour dûement signifiée, & qu’aux copies collationnées par l’un de nos amez & feaux Conseillers & Secretaires, foit soit ajoûtée comme à l’Original. Commandons au premier notre Huissier ou Sergent de faire pour l’execution d’icelles tous Actes requis & nécessaires, sans demander autre permission, & nonobstant clameur de Haro, Charte Normande, & Lettres à ce contraires: Car tel est notre plaisir. Donné à Paris le douziéme jour du mois de May, l’an de grace mil sept cens seize, & de notre Regne le premier. Par le Roy en son Conseil, FOUQUET.

Registré sur le Registre n. 3 de la Communauté des Libraires & Imprimeurs de Paris, page 1053. n. 1391, conformément aux Reglemens, & notamment à l’Arrest du Conseil du 13 Aoust 1703. A Paris le 13 May 1716.

Signé, De Laulne, Syndic. ◀Ebene 1

1Voïez p. 25.- 31.

2Acte II. Sc. I

3On ne le trouve p. 242, & 243, de ce Vol.

4Page 20. de l’Anglois